C’est un cauchemar éveillé. Une vision d’horreur qui se concrétise, lentement, mais sûrement.
Patrick Roy, l’homme de caractère, le héros de toute une génération, voit son rêve de deuxième vie dans la LNH s’écrouler sous ses yeux.
Et cette fois, il n’y aura pas de miracle. Il n’y aura pas de retour glorieux. Il n’y aura peut-être même pas d’au revoir officiel. Seulement du silence, des murmures sur les terrains de golf de Québec, et une LNH qui ferme les portes une à une.
Le dernier coup de massue est venu d’une rumeur devenue trop persistante pour être ignorée : Jeff Gorton, l’actuel vice-président exécutif du Canadien de Montréal, serait le favori pour devenir président – et potentiellement directeur général – des Islanders de New York.
Selon le journaliste Chris Botta, très bien branché à Long Island, les propriétaires des Islanders rêvent de tout confier à Gorton sur un plateau d’argent.
Le même Gorton que Geoff Molson avait empêché de rencontrer les Blue Jackets de Columbus. Le même Gorton qui affirme vouloir finir le travail à Montréal. Mais peut-il vraiment refuser cette offre si elle se concrétise?
La rumeur voulant que le vice-président du CH soit ciblé par les Islanders a provoqué une onde de choc jusque dans les tribunes du Centre Bell… et sur les réseaux sociaux.
Immédiatement, les partisans du Canadien ont rejeté avec rage l’idée d’un départ de Gorton. Sous les publications de Chris Botta, les messages se sont multipliés pour dire au journaliste que jamais au grand jamais Gorton allait quitter "son paradis de Montréal".
Pendant ce temps, en coulisses, tout semble s’accélérer. L’annonce d’un nouveau président ou DG pourrait survenir de jour en jour. Et ce sera à ce président – peut-être Gorton, peut-être un autre – de trancher le sort de Patrick Roy.
Alors que plusieurs croyaient que les Islanders attendraient jusqu’à la semaine du 20 mai pour annoncer leur nouvelle direction hockey, les choses ont changé rapidement. On parle maintenant d’une décision imminente. Si l’organisation obtient un engagement clair d’un candidat de haut niveau – que ce soit Ken Holland, Marc Bergevin, Jarmo Kekäläinen ou Jeff Gorton – l’annonce pourrait tomber dans les prochains jours.
Un autre nom commence à circuler pour calmer les ardeurs des partisans : celui de Kevin Weekes. Plusieurs espèrent voir un visage nouveau prendre les commandes, avec une vision moderne.
Mais pour Patrick Roy, peu importe le profil du prochain président, le sentiment d’être à la merci d’un autre décideur s’amplifie. Chaque jour sans nouvelle devient un pas de plus vers la sortie.
Le coach attend avec désespoir. Il attend que les grands de ce monde décident de son sort. Il attend qu’on lui tende une perche.
Il attend une entrevue qui ne viendra peut-être jamais. Il est en bas de l’échelle. Il n’a aucun pouvoir. Il n’a plus de voix.
Et s’il croyait que le départ de Lou Lamoriello allait lui ouvrir la voie, c’est plutôt l’inverse qui se produit. Car dans ce ménage à Long Island, Roy ne sera pas promu. Il pourrait même être congédié.
C’est l’ironie cruelle de cette histoire. Lou Lamoriello, avec qui Roy était en guerre froide depuis son arrivée, a été écarté.
Le prochain président sera celui qui décide du DG. À moins que ce président décide de cumuler les deux fonctions. Selon Botta, cela se joue entre Jeff Gorton, Marc Bergevin et Karmo Kekalainen.
Et peu importe qui sera nommé, le journaliste pense qu'il se nommera président-DG.
Le prochain "big boss" décidera si Roy demeure derrière le banc.
Entre Gorton et Bergevin, il est clair que Patrick Roy prie pour Gorton et non Marc Bergevin.
L’ennemi juré de Patrick Roy. L’homme qui l’a barré trois fois à Montréal : en 2012, en 2017 et en 2021. À chaque fois que Roy a levé la main, Bergevin l’a ignoré.
Pire, il a préféré Michel Therrien, Claude Julien, puis Dominique Ducharme. Trois hommes qui ont chacun eu droit à une chance que Roy n’a jamais eue.
Et maintenant, voilà que Bergevin fait partie des finalistes pour devenir DG… voire président… des Islanders. Ce n’est plus une rumeur. C’est une possibilité réelle. Et c’est le cauchemar de Roy.
Imaginez la scène : Patrick Roy, encore sous contrat pour un an, se voit forcé de travailler sous les ordres de Marc Bergevin.
L’humiliation serait totale. Et si Bergevin, comme plusieurs l’anticipent, décide de ramener son ancien protégé Dominique Ducharme, alors Roy ne sera pas seulement ignoré. Il sera remplacé.
Par l’homme qui l’a toujours devancé dans les bureaux du CH. Par celui qu’il considère comme une pièce du système qu’il a toujours voulu détruire.
Pendant ce temps, Patrick Roy parle. Il parle beaucoup. Sur les terrains de golf, à ses amis, à ses proches, à ceux qui veulent bien l’écouter. Il laisse planer l’idée que c’est fini. Qu’il ne sera pas retenu. Qu’il n’aura pas d’entrevue. Que la LNH le barre, encore.
Certains y voient une forme de stratégie : se poser en victime, créer un élan de sympathie. D’autres voient simplement un homme dévasté, qui ne peut pas croire que tout lui échappe, encore une fois.
Car ce n’est pas seulement à Long Island que les portes se ferment. Dans toute la LNH, sept postes d’entraîneur-chef sont actuellement vacants : Anaheim, Boston, Chicago, Philadelphie, Pittsburgh, Seattle et Vancouver.
Sept équipes. sept opportunités. Et pas une seule ne songe à Patrick Roy. Pas une seule n’a mentionné son nom. Pendant que Dominique Ducharme, Jeff Halpern, Todd Reirden, Jay Woodcroft, Pascal Vincent et même Adam Foote sont sur les listes de candidats, Patrick Roy, lui, n’existe pas dans le discours public.
Frank Seravalli, l’un des journalistes les mieux branchés de la ligue, a publié une liste de 24 candidats potentiels. Roy n’y figure pas. Ce silence est éloquent. Il est déchirant. Il est accablant. Roy est rayé. Barré.
Comme s’il était devenu toxique. Comme si son style émotif, sa tête dure, ses conflits passés, son autorité naturelle étaient devenus des défauts irréparables. Comme si la LNH avait décidé qu’elle avait eu assez de Patrick Roy.
Et pourtant, il y croyait. Il avait attendu dix ans. Après sa démission fracassante au Colorado, il avait fait amende honorable. Il était retourné dans le junior. Il avait appris, guidé, formé. Il avait gagné. Il avait calmé ses ardeurs.
Il avait montré qu’il pouvait être un homme de groupe. Il pensait que la LNH lui pardonnerait. Il pensait que le temps avait joué pour lui. Et puis les Islanders l’ont appelé. Ce était sa chance.
Mais le timing était catastrophique. Il a hérité d’une équipe vieille, usée, sans plan clair, avec un DG autoritaire qui refusait tout changement. Il a vu les unités spéciales s'effondrer.. Et il a vu les critiques pleuvoir. Aujourd’hui, il paye pour tout ça. Et personne ne le défend. Même le public du Québec, qui l’a tant acclamé, se fait discret.
Le pire, c’est que Roy avait encore de l’espoir. Il croyait qu’il pourrait devenir DG. Il se voyait bâtir quelque chose à Long Island. Il imaginait une reconstruction à sa façon. Il avait déjà son coach en tête : Benoît Desrosiers, son fils spirituel. Il pensait pouvoir mettre ses valeurs au coeur d’un projet. Mais le rêve s’est éteint. Définitivement.
Et maintenant, il attend. Roy est un lion en cage. Imaginez la honte d'attendre de savoir si c'est Jeff Gorton ou Marc Bergevin qui va le congédier.
Peut-être que c’est mieux ainsi. Peut-être que le hockey moderne n’a plus de place pour des figures aussi imposantes. Peut-être que la LNH est passée à autre chose.
Mais l’un des plus grands de l’histoire du hockey vit aujourd’hui la fin de son rêve, non pas dans la gloire, mais dans l’indifférence. Et ça, c’est le vrai cauchemar.