Il existe une dynamique fascinante et complexe entre José Théodore et Carey Price, deux gardiens de but légendaire du Canadien de Montréal, qui semble être marquée par une rivalité "en-dessous de la table" nourrie par un sentiment de jalousie.
Cette rivalité, bien que discrète, a régulièrement refait surface au fil des années, à travers des déclarations subtiles mais révélatrices de Théodore, qui ne cache pas son ambivalence à l’égard de son successeur dans le filet du Tricolore.
«Je pense que son numéro pourrait être retiré, c’est tellement dur de jouer pendant 15 ans à Montréal dans le contexte d’aujourd’hui et il a probablement été le meilleur joueur de l’équipe pendant 15 ans. C’est une question de longévité.» a-t-il affirmé au Journal de Montréal.
Mais Théo semblait pratiquement obligé de l'avouer du bout des lèvres. Son regard voulait tout dire. Dans sa tête, il ne veut rien savoir de voir le chandail de Price se retrouver au plafond du Centre Bell.
José Théodore comptait parmi les invités, mardi, au club de golf Le Mirage, à Terrebonne pour honorer la dynastie du Canadien de Montréal qui a gagné 4 Coupes Stanley de suite entre 1975 et 1979.
Absolument tous les invités, de Ken Dryden à Serge Savard lui-même, ont affirmé que le chandail de Price se devait d'être retiré.
Théo a été obligé de l'avouer, mais son langage verbal et corporel voulait tout dire. Si ce n'était que de lui, jamais au grand jamais il donnerait son accord.
«Si on pense à retirer le chandail de Price, il faut absolument qu’on pense à celui d’Andrei Markov aussi parce qu’il a réalisé l’équivalent» a ajouté avec un certain mépris.
Pour comprendre les racines de cette jalousie, il faut remonter à un incident qui, même s'il semble minime en apparence, a profondément marqué Théodore.
Un jour, alors qu’il travaillait comme analyste pour TVA Sports, il a voulu interviewer Carey Price. À sa grande surprise, et surtout sa grande déception, Price ne savait pas qui il était.
Pour Théodore, qui avait lui-même été un gardien vedette du Canadien, gagnant du trophée Hart en 2002, ce moment a sans doute été perçu comme un affront, une sorte de déni de sa place dans l’histoire du club.
Comment Price, le successeur de son héritage, pouvait-il ignorer qui il était?
Cet incident a laissé des traces, et depuis, on perçoit chez Théodore une attitude de dédain, voire de mépris, envers Price.
À première vue, il semble lui accorder un soutien mesuré, reconnaissant parfois ses qualités, mais cette façade dissimule mal une jalousie persistante.
Cette jalousie s'est manifesté notamment dans la manière dont Théodore a parlé des performances de Price, en particulier lors des séries éliminatoires, alors qu'il était le meilleur joueur de l'équipe.
Pour Théodore, qui a lui-même connu la pression des séries avec le Canadien, le fait que Price n’ait jamais réussi à mener l’équipe à une conquête de la Coupe Stanley est un point sensible.
Théodore n’hésite pas à rappeler que, malgré tout son talent, Price s’est souvent effondré au moment crucial. Il souligne que le numéro 31 a certes livré de bonnes performances ici et là, mais n’a jamais été capable de transporter l’équipe sur ses épaules lorsque cela comptait le plus.
Et c’est précisément là que réside la critique évidente : pour Théodore, l’incapacité de Price à exceller en séries est un échec personnel qu’il semble presque espérer voir se répéter, comme pour justifier sa propre carrière et relativiser l’impact de Price.
Cette rivalité prend également un tournant malsain lorsque Théodore fait l’éloge de Price tout en mettant l’accent sur la pression immense qui pèse sur lui.
C’est comme s’il a toujours souhaité secrètement qu'il flanche sous cette pression, de "choker", comme on dit dans le milieu du sport.
Cette attitude contraste avec le respect que Théodore affiche publiquement, mais en creusant un peu, on découvre une jalousie profondément enracinée, une envie que Théodore semble incapable de surmonter.
Ce sentiment de rivalité s’étend même au-delà des performances sur la glace. Quand il est question du futur de Price, notamment du potentiel retrait de son chandail, Théodore adopte une position mitigée.
Il reconnaît les accomplissements de Price, mais s’empresse de rappeler que d’autres, comme Andrei Markov, méritent autant cet honneur.
En apparence, c’est une réflexion équilibrée, mais elle trahit un désir de minimiser les réalisations de Price, de ne pas lui accorder cette place parmi les immortels du club sans y mettre des réserves.
Dans le monde de la LNH, où l’ego et les comparaisons sont omniprésents, cette rivalité entre Théodore et Price est un exemple fascinant des compétition personnelles complexes qui peuvent exister entre anciens et actuels joueurs d’élite.
Pour Théodore, Carey Price a représenté à la fois un successeur et une figure contre laquelle il se mesure constamment, un miroir qui lui renvoie ses propres succès et échecs.
Et si la jalousie de Théodore envers Price peut sembler exagérée, elle est peut-être simplement le reflet des pressions et des attentes incroyablement élevées qui accompagnent le fait d’être le gardien de but numéro un à Montréal.
Alors que le Canadien de Montréal continue de naviguer dans une ère post-Price, avec de jeunes talents qui cherchent à prendre la relève, on peut se demander si cette rivalité cachée entre Théodore et Price continuera à hanter les discussions autour du numéro 31.
Peut-être que, dans un futur proche, lorsque Price aura vu son chantail être retiré et que le temps aura passé, Théodore trouvera la paix avec cette relation complexe. Mais pour l’instant, la jalousie demeure un fil rouge qui tisse la toile de leurs histoires croisées.
Pourquoi cette jalousie? La réponse est simple.
José Théodore est un nom gravé dans l’histoire du Canadien de Montréal, aux côtés des légendes qui ont marqué cette franchise légendaire.
Gagner le Hart et le Vézina la même année est incroyable. Pourtant, malgré ses accomplissements impressionnants, Théodore semble être l’un des grands oubliés du club.
Son nom n’est pas mentionné lors des cérémonies, son visage n’apparaît pas sur l’écran géant du Centre Bell, et il n’est jamais invité aux événements officiels du Canadien.
Cette absence de reconnaissance, surtout pour un joueur qui a marqué l’histoire de l’équipe, laisse un goût amer chez celui qui a pourtant été, pendant une décennie, le visage du Tricolore.
José Théodore est l’un des trois gardiens de l’histoire du Canadien à avoir remporté le trophée Hart, remis au joueur le plus utile à son équipe dans la LNH, aux côtés de deux autres légendes : Jacques Plante et Carey Price.
Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, seuls sept joueurs du Canadien ont eu l’honneur de recevoir ce trophée prestigieux.
Théodore, en 2002, a également remporté le trophée Vézina, remis au meilleur gardien de la ligue, un exploit qu’il partage avec Patrick Roy et Carey Price dans l’ère moderne.
Malgré ces distinctions, Théodore n’a jamais reçu la reconnaissance qu’il mérite de la part du Canadien. Bien qu'il figure parmi les dix meilleurs gardiens de l'histoire de l'équipe en termes de victoires, son nom est rarement évoqué lorsqu'on parle des grandes figures du club.
Si Théodore n'avait pas été échangé à l'âge de 29 ans, il aurait probablement grimpé au troisième rang des gardiens les plus victorieux de l’histoire du Canadien, derrière Price et Plante.
Cependant, malgré ses contributions significatives, le Canadien semble l'avoir effacé de sa mémoire collective.
Théodore admet que cette absence de reconnaissance le perturbe. Il ne cache pas son désarroi face à l’indifférence de l’organisation pour laquelle il a tout donné.
« Je n’ai jamais joué pour les honneurs, et je n’en fais pas un drame, mais je me pose la même question », confie-t-il. (crédit: La Presse)
Il voit beaucoup d’anciens coéquipiers qui ont eu droit à une petite mention, à une invitation au tournoi de golf du club ou à une reconnaissance quelconque, mais lui, rien.
« Même avec les anciens du Canadien, à moins que le Canadien ait perdu mon numéro, je n’ai jamais été invité au tournoi de golf de l’équipe."
"Est-ce que ça me fatigue ? Oui, ça me fatigue un peu. Je me suis toujours donné aux médias, j’ai été le premier à acheter une loge pour les enfants malades, j’étais impliqué pour le club et, dès que j’ai quitté l’organisation, j’ai comme été oublié. »
Théodore n’est pas naïf et se doute des raisons pour lesquelles il a été mis à l’écart. Il croit que les distractions extérieures à la glace, qui ont marqué sa carrière, ont probablement joué un rôle dans cette mise à l’écart.
Il sait que l’image est extrêmement importante pour le Canadien, et il soupçonne que les histoires qui l’ont entouré ont laissé une empreinte négative aux yeux de l’organisation.
Pourtant, il ne peut s’empêcher de ressentir une certaine amertume :
« J’ai fait ce que j’avais à faire, ce n’est pas à moi de me donner les honneurs. Il faut que ce soit fait de bonne foi. »
La situation de Théodore est d’autant plus troublante qu’il n’est pas le seul à avoir été écarté par le club après sa carrière.
Des légendes comme Serge Savard, Guy Lafleur et Patrick Roy ont aussi mis du temps à retrouver une place au sein de la famille du Canadien.
Pour Théodore, il est difficile de comprendre pourquoi les joueurs francophones qui ont eu du succès avec le Canadien semblent avoir plus de mal à être reconnus par l’organisation.
« Être francophone avec le Canadien, au lieu de détenir un avantage, il faut se battre deux fois plus fort. La réalité, c’est quand même ça », souligne-t-il.
Théodore se console en se disant qu’il n’est pas seul dans cette situation, mais cela n’efface pas pour autant la déception qu’il ressent.
Après tout, il a donné ses meilleures années à Montréal, a porté l’équipe sur ses épaules lors de saisons difficiles, et a marqué l’histoire du club avec des exploits que peu de gardiens peuvent revendiquer.
Aujourd’hui, Théodore vit une belle retraite en Floride, loin des projecteurs et des pressions de Montréal. Il est devenu un homme d’affaires prospère, collaborant avec Serge Savard dans l’immobilier.
Mais même avec cette réussite, le manque de reconnaissance de la part du Canadien reste un point sensible. Il garde des souvenirs impérissables de ses dix saisons avec l’équipe, mais ne peut s’empêcher de se demander ce qui aurait pu être si les choses avaient été différentes, si le club lui avait offert ne serait-ce qu’une fraction du respect et de l’honneur qu’il mérite.
José Théodore restera à jamais l’un des grands gardiens du Canadien de Montréal, un joueur qui, malgré l’indifférence de l’organisation, a laissé une marque infinie sur l’histoire du club.
Il est regrettable que cette légende n’ait pas reçu la reconnaissance qu’elle mérite. Surtout que cela l'a amené...à tomber dans la jalousie envers Carey Price.
La jalousie est le pire sentiment humain. Au final, c'est l'organisation du CH qui a créé cette émotion dans le coeur de Théo.