Entrevue déprimée: Kent Hughes avoue sa bourde estivale

Entrevue déprimée: Kent Hughes avoue sa bourde estivale

Par David Garel le 2025-12-20

Kent Hughes n’avait pas l’air d’un directeur général qui savourait un coup de théâtre ou une victoire médiatique facile.

Au contraire. Dès les premières secondes de sa conférence de presse suivant l’acquisition de Phillip Danault, le DG du Canadiens de Montréal a imposé le ton : sérieux, posé, presque déprimé.

Pas de sourire triomphant. Pas de célébration. Et surtout, un message clair : ce n’était pas un cadeau, et ce n’était pas un petit prix.

La première question, pourtant banale, a révélé beaucoup. Pourquoi ramener Danault à Montréal ? Hughes a répondu sans détour : l’organisation est rendue à une étape où l’expérience devient un besoin réel, accentué par les blessures et par la lourdeur du calendrier.

Il a insisté sur le fait que tout le monde connaît déjà le joueur, son jeu, son intelligence défensive, et surtout sa capacité à gérer la pression.

« Ce sont des éléments qui vont nous aider cette saison, mais aussi la saison prochaine », a-t-il précisé, ancrant immédiatement la transaction dans une vision qui dépasse le court terme.

Interrogé sur le fait de ramener un ancien joueur, un tabou pour certaines organisations, Hughes a été catégorique : ce n’est pas un facteur pour lui. Il a rappelé qu’il n’était pas en poste lors du premier passage de Danault, mais que tout ce qu’il a entendu à son sujet parlait d’un excellent coéquipier, respecté dans le vestiaire.

Le fait que Danault connaisse déjà le marché montréalais a été qualifié d’avantage secondaire, mais Hughes a martelé que la décision était basée sur le jeu, pas sur la nostalgie.

La question délicate du développement des jeunes n’a pas été évitée. Kapanen, Beck, la relève : Hughes a reconnu l’équilibre fragile entre le présent et le futur.

Il a été très transparent : il n’existe pas de plan figé écrit en septembre pour toute la saison. Les décisions se prennent semaine par semaine, en fonction des besoins, de la santé des joueurs et de la progression réelle.

Il a toutefois ajouté un point clé : un vétéran comme Danault peut justement servir de modèle défensif pour les jeunes, un joueur dont on apprend en observant les détails.

Quand la discussion a glissé vers la saison difficile de Danault à Los Angeles (zéro but, rôle réduit, perte de temps de jeu en avantage numérique), Hughes n’a pas fui. Il a reconnu le contexte, tout en rejetant l’idée que cette saison reflète la vraie valeur du joueur.

« S’il jouait 20 minutes par match à Los Angeles, il n’aurait probablement pas été échangé », a-t-il laissé entendre, expliquant que la situation des Kings et celle du joueur avaient ouvert une fenêtre.

Mais il a refusé de parler pour l’autre organisation ou pour Danault lui-même, répétant que Montréal croit que son potentiel est bien supérieur à ce que montrent les statistiques actuelles.

Un moment révélateur est survenu lorsqu’un journaliste a parlé d’un « simple choix de deuxième ronde ». Hughes l’a corrigé immédiatement, sans détour :

 « Ce n’est pas juste un choix de deuxième ronde. C’est un très bon choix de deuxième ronde. » Le message était cinglant. Il savait exactement ce qu’il cédait. Il savait que ce choix, acquis de Columbus, est élevé. Et il refusait que la transaction soit minimisée. Pour lui, ce n’était pas un rabais, mais un prix assumé.

Il a expliqué que les discussions avec Los Angeles avaient toujours tourné autour de choix au repêchage, et non de joueurs actifs.

Montréal n’était pas prêt à céder un joueur de son alignement pour en ajouter un autre :

« C’est difficile d’améliorer ton équipe si tu enlèves une pièce du même coup. » Cette phrase résume la logique du DG : ajouter sans déshabiller, même si cela coûte cher en capital de repêchage.

Sur le plan plus large, Hughes a replacé la transaction dans le contexte de la reconstruction. Il a rappelé que l’an dernier, à l’approche de la date limite, l’équipe avait choisi de ne pas vendre à outrance afin de permettre au groupe de vivre une course aux séries et d’acquérir de l’expérience.

Cette acquisition s’inscrit dans la même philosophie : l’expérience comme moteur de croissance, autant pour les vétérans que pour les jeunes.

La question du plafond salarial a été abordée franchement. Hughes a balayé les inquiétudes liées aux chiffres publics, rappelant que l’organisation travaille avec ses propres données internes. Il a confirmé que certains joueurs ont été placés sur la LTIR pour gérer la situation à court terme, et a répété un mantra devenu célèbre :

 « Quand il y a une volonté, il y a un moyen. » Autrement dit, si une transaction fait sens, le plafond ne sera pas un mur infranchissable.

Pourquoi il n'a pas gardé Christian Dvorak cet été alors, au lieu d'aller chercher un centre moins talentueux, plus vieux de 4 ans et qui a la réputation d'être un joueur proche de la fin?

Sur Dvorak, Hughes a été honnête sans entrer dans la controverse. Oui, des discussions ont eu lieu. Oui, c’était une option. Mais il n’a exprimé aucun regret. Il s’est dit heureux pour Dvorak, qui obtient un rôle plus important ailleurs, et a conclu simplement :

 « Nous sommes heureux d’avoir Phil. » Une phrase courte, mais lourde de signification. Hughes sait qu'il a foiré cet été.

Enfin, la question centrale est revenue : pourquoi croire que Danault peut rebondir ? Hughes a livré l’une de ses réponses les plus personnelles.

Fort de près de 30 ans passés de l’autre côté de la table en tant qu'agent, il a expliqué qu’un joueur n’oublie pas soudainement comment jouer au hockey.

Les baisses de régime sont souvent contextuelles : rôle, environnement, confiance, utilisation. Il a rappelé que Danault avait été excellent en séries la saison dernière, avec huit points en six matchs, dans un rôle extrêmement exigeant contre Connor McDavid. Pour Hughes, cela prouve que le joueur est toujours là.

En quittant le podium, Kent Hughes n’avait pas vendu un conte de fées. Il avait défendu une décision lourde, réfléchie, assumée... mais un "move" synonyme de panique...

Une transaction coûteuse, risquée, consciente. Et si son visage n’exprimait pas la satisfaction, c’est peut-être parce qu’il sait une chose : s'il avait gardé Dvorak, il n'en serait pas là aujourd'hui...