Quel moment avons-nous vécu à Brossard.
Un instant de de vérité, où un joueur ne parle plus comme un athlète formaté mais comme un être humain. Ce fut le cas de Kirby Dach llorsqu’il a pris la parole après l’entraînement du Canadien.
Ses mots ont traversé la glace pour aller toucher le cœur de tous ceux qui l’ont vu, au fil des ans, se briser, tomber, se relever encore, jusqu’à redevenir celui qu’on croyait perdu.
Il n’a pas parlé de buts, ni de statistiques. Il a parlé d’appui, de famille, de loyauté. Et dans le vestiaire du CH, on a senti que ce message-là, c’était bien plus qu’une déclaration d’après-match : c’était une reconnaissance.
« Martin a été bon pour moi. Il y a eu quelques années difficiles, quelques longues années, mais j’ai toujours eu l’appui de Martin et de son personnel. Tout le monde était derrière moi quand ça n’allait pas bien, et ça signifie beaucoup pour moi. On est une famille ici. »
Ces mots, prononcés avec la sincérité d’un jeune homme qui a connu l’humiliation, la douleur et le doute, ont figé la salle pendant un instant.
On pouvait sentir le frisson dans le dos des journalistes.
Car tout le monde, dans cette équipe, sait ce que Kirby Dach a traversé. Une opération au genou après seulement deux matchs en 2023-2024, des mois de rééducation, de solitude, de nuits à douter de sa place dans la ligue.
Une deuxième opération la saison suivante, et encore une fois le spectre de la rechute. À chaque étape, l’impression qu’on ne le reverrait plus jamais complet. Et pourtant, il est là. Debout, confiant, souriant, marqué mais grandi.
Ce n’est pas tant la renaissance d’un joueur que celle d’un homme. Kirby Dach aurait pu se refermer, céder au découragement, répliquer à tous ceux qui se moquaient de lui, rejeter la faute sur la malchance.
Il a plutôt choisi la gratitude. Il a compris que si le hockey est un métier impitoyable, il existe encore des entraîneurs et des organisations capables de voir plus loin que le tableau des pointeurs.
Et c’est précisément ce qu’il a voulu rendre à Martin St-Louis. Ce coach qui, malgré les pressions médiatiques, malgré les noms infinis de vederres, Suzuki, Caufield, Demidov, Slafkovský, Hutson, Dobson, a continué de croire que le jeune homme venu de Chicago méritait une nouvelle chance au centre.
Ce coach qui a insisté, qui a pris le temps, qui n’a pas oublié.
Dans un marché comme Montréal, où chaque erreur devient une manchette, cette loyauté est rare. Et aujourd’hui, elle est récompensée. Quatre buts en trois matchs, un jeu plus fluide, plus instinctif, une sérénité retrouvée sur la glace.
Mais au-delà des chiffres, c’est le regard de ses coéquipiers qui en dit long. Zachary Bolduc, qui partage sa ligne avec lui et Brendan Gallagher, parle d’un joueur transformé :
« C’est un gars qui joue avec énormément de confiance, qui est bon en protection de rondelle et qui gagne ses batailles à un contre un. »
Mike Matheson, le vétéran réfléchi, ajoute :
« Avec un corps comme ça, un coup de patin comme ça et les habilités qu’il a, il est difficile à affronter. »
Des compliments sincères, mais ce qui frappe, c’est le ton. Ce n’est plus celui de la compassion envers un joueur fragile, c’est celui du respect envers un coéquipier redevenu essentiel.
Dach ne s’est jamais plaint. Il n’a jamais utilisé ses blessures comme excuse. Il a disparu un temps, travaillé dans l’ombre, sans promesses ni garanties.
Quand il parle de famille, ce n’est pas un cliché. Dans ce vestiaire, on sait qu’il a passé plus de temps dans les salles de traitement qu’à patiner sur la glace du Centre Bell.
On se souvient de lui sur les béquilles, de ses regards perdus dans le corridor, de son silence face aux journalistes. Il n’y avait plus d’assurance dans son jeu, plus de lumière dans son visage. Et voilà qu’en ce mois de novembre, il redevient un moteur offensif.
Son discours est d’autant plus puissant qu’il vient d’un joueur souvent jugé froid ou distant. Derrière cette réserve se cachait un jeune homme fatigué, qui ne voulait pas qu’on le voie fragile.
En se livrant ainsi, en admettant sa reconnaissance envers St-Louis et ses coéquipiers, Dach a ému le Québec en entier.
Le Québec qui pense à lui aujourd'hui... et qui voit un gagnant...
Martin St-Louis a souvent répété qu’il voulait bâtir un environnement où les joueurs se sentent compris, pas seulement évalués.
Ce lundi, il a vu le fruit de cette philosophie. Le courage de Dach, c’est le miroir de celle de son équipe.
Quand il dit « on est une famille ici », ce n’est pas une formule "fake".. Il parle d’une équipe qui l’a porté quand il n’était plus capable d’avancer. D’un vestiaire qui a refusé de le laisser disparaître.
Ce message, c’est un rappel que la victoire se construit d’abord dans la fidélité. Le Canadien, dans son identité renouvelée, repose sur cette valeur-là : croire en ceux qui doutent, jusqu’à ce qu’ils n’aient plus besoin d’aide pour se relever.
Dans une époque où les déclarations formatées étouffent l’émotion, Kirby Dach a parlé vrai. Et cette vérité-là, fragile mais lumineuse, a redonné sens à tout ce que représente ce chandail bleu-blanc-rouge.
Montréal ne retient pas seulement les statistiques ; elle retient les histoires de courage. Ce lundi, c’est celle d’un jeune homme qui, après avoir tout perdu, a retrouvé sa voix.
Et dans cette entrevue, il y avait la reconnaissance, la confiance, et cette phrase simple, presque murmurée mais impossible à oublier :
« On est une famille ici. »
