Vol à Montréal: Lane Hutson inquiète

Vol à Montréal: Lane Hutson inquiète

Par David Garel le 2025-11-14

On croyait avoir fait le vol du siècle. Un défenseur offensif d’élite, un vainqueur du trophée Calder, un quart-arrière de supériorité numérique à moins de neuf millions de dollars par année.

Lane Hutson était présenté comme l’incarnation même du génie de Kent Hughes : une pièce centrale de la reconstruction, un vol de repêchage devenu vol de contrat. Mais aujourd’hui, la belle illusion a quelques taches noires. Et ça inquiète.

Depuis une semaine et demie, le phénomène de 5 pieds 10 pouces semble méconnaissable. Une seule passe à ses quatre derniers matchs. Un différentiel de moins -8...

Et surtout, un naufrage complet lors des deux dernières rencontres contre les Kings de Los Angeles et les Stars de Dallas, deux équipes de séries, deux formations bâties pour le mois de mai, deux systèmes qui ferment le jeu, éliminent les espaces, frappent, dominent les coins de patinoire.

Le résultat? Un Lane Hutson effacé, dominé, exposé. À moins-7 sur ses deux derniers matchs, il est devenu un boulet sur la glace, au point d’être désigné, statisques avancées à l’appui, comme le pire joueur défensif du Canadien. Pas le pire défenseur. Le pire joueur, toutes positions confondues.

Et soudainement, tout ce que l’on avait voulu balayer sous le tapis refait surface. Les doutes. Les critiques. Les mises en garde des recruteurs, trop souvent ignorées dans l’euphorie de son éclosion.

On se souvient de ce que plusieurs disaient déjà avant son repêchage : Lane Hutson n’est pas fait pour les matchs serrés.

Il est magnifique avec de l’espace, brillant quand le tempo est ouvert, dominant contre les clubs à la défensive toute croche de bas de classement ou en prolongation à 3 contre 3.

Mais dans les moments de tension, dans les séries éliminatoires, dans les coins de patinoire quand ça brasse, il recule. Il ne gagne pas ses batailles. Il se fait manger. Et c’est exactement ce que l’on a vu cette semaine.

Le problème, c’est que ce n’est pas la première fois que cela se produit. Les observateurs attentifs se souviendront de la série contre Washington, l’an dernier.

Déjà là, contre une équipe plus physique, mieux structurée, Hutson avait semblé dépassé par les événements. Plus effacé, moins mobile, hésitant, nerveux.

Et voilà que le même scénario se répète, mais cette fois en saison régulière, face à deux adversaires de l’Ouest qui imposent un style de jeu similaire. Ce n’est plus une anomalie. Ce n’est plus une mauvaise soirée. C’est un signal d’alarme.

Et c’est précisément pour cette raison que Kent Hughes n’a jamais voulu franchir la barre symbolique des neuf millions par saison avec lui.

C’est la raison pour laquelle les négociations ont été longues, tendues et inconfortables. Le père de Lane, Ron Hutson, exigeait la lune. Il voulait un contrat historique.

Il parlait de 11, voire 12 millions. Il voulait faire de son fils un coup de circuit financier, comme si la valeur offensive de Lane suffisait à faire oublier toutes ses lacunes.

Mais Hughes tenait son bout. Et quand il a senti que le clan Hutson allait tout faire sauter, il a sorti le joker : la convention de retraite. Un montage financier brillant qui permettait à Lane de toucher un montant garanti à long terme, sans faire exploser la masse salariale du Canadien.

Un compromis qui a tout changé. Une manière de ménager les susceptibilités et de préserver l’équilibre dans le vestiaire.

Parce que tout le monde, autour de Hutson, avait déjà accepté un rabais. Cole Caufield, à 7,85 millions. Juraj Slafkovský, à 7,5. Nick Suzuki, à 7,875. Même Noah Dobson, fraîchement arrivé de Long Island, avait signé à 9,5 pour s’inscrire dans cette culture.

Une culture d’effort, de responsabilité et de sacrifices collectifs. Une culture à laquelle Lane Hutson voulait adhérer, mais que son entourage menaçait d’ébranler.

Au final, c’est Lane lui-même qui a forcé son père à se retirer. C’est lui qui a accepté de prendre moins pour rester fidèle à ses coéquipiers. C’est lui qui a voulu incarner cette culture.

Mais aujourd’hui, en voyant son nom accolé à un différentiel de moins 7 sur deux matchs, en le voyant incapable de sortir une rondelle de sa zone face à des attaquants plus gros, en le voyant douter et reculer dans l’exécution, une question s’impose : et si Kent Hughes s’était trompé?

Et si ce contrat, vanté comme une aubaine il y a deux semaines encore, devenait un boulet dans trois ans? Un joueur unidimensionnel, incapable de s’adapter aux exigences du jeu serré? Un autre prodige du mois de novembre, incapable de produire quand les séries arrivent?

Bien sûr, il faut garder une certaine mesure. Lane Hutson travaille fort. Il est toujours le premier sur la glace le matin, souvent le dernier à en sortir. Il ne triche pas. Il ne s’écrase pas volontairement. Il traverse peut-être une mauvaise passe. Mais c’est une très mauvaise passe, et elle arrive à un moment crucial.

Parce que les attentes sont immenses. Parce qu’on ne parle pas ici d’un prospect de troisième paire. On parle d’un défenseur numéro un. D’un visage de la franchise. D’un contrat de 8,85 millions sur huit ans.

Et s’il n’est pas capable de livrer la marchandise quand le jeu se referme, quand la pression monte, quand l’adversaire serre l’étau, alors Montréal aura un très sérieux problème entre les mains.