Le Centre Bell ne pardonnera jamais à Jonathan Marchessault

Le Centre Bell ne pardonnera jamais à Jonathan Marchessault

Par David Garel le 2024-12-05

L’histoire de Jonathan Marchessault est celle d’un joueur qui a tout connu : la gloire, le rejet, et maintenant, la désillusion.

Alors que les Predators de Nashville s’apprêtent à affronter le Canadien de Montréal ce soir au Centre Bell, l’équipe traverse une crise sans précédent.

Une cinquième défaite consécutive face à Montréal pourrait non seulement sceller le sort de l’entraîneur-chef Andrew Brunette, mais aussi faire de Marchessault une cible des huées montréalaises, conséquence de ses propos désobligeants envers le Québec et les partisans du CH.

Tout avait pourtant si bien commencé pour Marchessault à Vegas. En 2023, il avait mené les Golden Knights à leur première Coupe Stanley, remportant au passage le trophée Conn Smythe en tant que joueur le plus utile des séries

. Mais, malgré ses exploits, il a été laissé de côté par le directeur général Kelly McCrimmon, qui a choisi de ne pas lui offrir de prolongation de contrat.

« J’aurais aimé obtenir une reconnaissance pour ce que j’ai fait. Je ne comprends pas comment on peut laisser partir un joueur après tout ce qu’il a accompli pour l’organisation. »

Ces paroles, prononcées avec amertume, illustrent le début d’une période sombre pour Marchessault, forcé de quitter une ville et une équipe où il s’était établi comme une figure incontournable.

Recruté par Barry Trotz, directeur général des Predators, pour 27,5 millions de dollars sur cinq ans, Marchessault devait être un pilier de la reconstruction de Nashville.

Avec Steven Stamkos et Brady Skjei, il était censé donner une nouvelle identité à une équipe qui voulait rivaliser avec les meilleures formations de la ligue.

Mais après 24 matchs, le constat est accablant : Nashville est engluée dans les bas-fonds du classement avec un dossier de 7-13-6, un différentiel de -22, et une attaque moribonde qui marque seulement 2,33 buts par match, la pire moyenne de la LNH.

La frustration s’est intensifiée au fil des défaites, et les tensions dans le vestiaire sont devenues invivables.

Après une défaite en prolongation contre Tampa Bay, Steven Stamkos a exprimé son mécontentement de manière à peine voilée, semblant viser Marchessault et d’autres joueurs offensifs :

« Si tu ne marques pas, qu’est-ce que tu fais d’autre pour aider ton équipe? On ne peut pas se permettre de ne pas travailler. Quand tu es dans une léthargie, il faut trouver d’autres moyens de contribuer. »

« Nous avons des gars qui peuvent mettre la rondelle dans le filet, c’est sûr, mais nous devons trouver des façons de générer de l’attaque. Les gars doivent se rendre libres, voir des choses, trouver des occasions. » 

« C’est correct d’être frustré parce que nous ne marquons pas. Mais vous devez répliquer avec une éthique de travail et une façon différente d’approcher le match. 

Ces mots, interprétés comme une critique directe envers Marchessault, ont mis en lumière une fracture dans le vestiaire des Predators. Marchessault, recruté pour sa capacité à marquer des buts, est devenu le symbole des attentes déçues de l’équipe.

L’entraîneur-chef Andrew Brunette, qui avait revitalisé l’attaque de Nashville l’an dernier, se retrouve aujourd’hui sur la sellette.

Les performances décevantes de l’équipe et l’incapacité à maximiser le potentiel de joueurs comme Marchessault et Stamkos lui valent des critiques croissantes.

Lors de la défaite contre les Maple Leafs de Toronto hier soir, Brunette a vu son équipe s’effondrer en troisième période, encaissant trois buts en moins de cinq minutes.

Malgré un but chanceux de Marchessault, qui marquait son 500e point en carrière, Nashville n’a pas su maintenir son avance.

Brunette, qui avait promis une équipe compétitive cette saison, pourrait voir son mandat écourté si les Predators perdent ce soir contre Montréal.

Une sixième défaite consécutive serait difficile à justifier, et Barry Trotz pourrait être contraint de prendre une décision radicale.

Comme si la situation à Nashville ne suffisait pas, Marchessault devra également composer avec l’accueil hostile des partisans montréalais.

Ses propos lors d’une entrevue à TVA Sports, où il avait qualifié la pression de jouer à Montréal de « peste », ont laissé un goût amer.

« Je venais une fois par année et je me disais que c’était correct. Il y a tellement de médias et de pression. Lorsqu’un joueur offensif connaît un passage à vide à Montréal, il se retrouve rapidement dans des rumeurs d’échange. »

Ces commentaires, perçus comme méprisants, lui vaudront sans doute une poussée de huées ce soir au Centre Bell.

Ces propos ont été perçus par certains comme un manque de respect envers les partisans montréalais et la culture hockey du Québec.

Certains fans ont interprété ces déclarations comme une indication que Marchessault n'a jamais sérieusement envisagé de jouer pour le Canadien, utilisant assurément l'intérêt de l'équipe pour augmenter sa valeur sur le marché.

Pour Marchessault, ce match contre le Canadien représente une double pression : répondre sur la glace et tenter de regagner un peu de crédibilité.

Le Québécois a également évoqué ses enfants pour justifier son refus de jouer à Montréal. Lors de la même entrevue, il a expliqué que la pression intense associée à l’environnement médiatique et aux attentes des partisans pouvait avoir des répercussions non seulement sur lui, mais aussi sur sa famille. 

« Ils sont assez vieux pour comprendre tout ça. À l’école, est-ce qu’ils se font écoeurer? Ce sont des choses à prendre en considération, pas juste comme joueur de hockey, mais aussi en tant que père. »

Ces propos ont fait réagir de nombreux partisans, qui y ont vu une tentative de détourner le fait d'avoir utilisé le CH pour faire monter les enchères en critiquant la pression montréalaise.

Marchessault a présenté cette justification comme un choix de protection familiale, préférant un marché moins intense comme Nashville pour permettre à ses enfants de vivre une vie plus normale, loin des projecteurs.

« À Nashville, il y a une passion pour le hockey, mais ce n'est pas comparable à l'intensité de Montréal. C'est plus facile pour ma famille, et mes enfants peuvent mener une vie plus normale. »

Ces remarques, bien qu’honnêtes, ont été perçues par plusieurs comme une critique implicite des médias et des fans québécois.

Elles ont alimenté l’impression que Marchessault ne voulait pas évoluer dans un environnement où chaque performance est analysée et où l’échec peut rapidement devenir une affaire publique, affectant même la vie privée des joueurs et de leurs familles.

Pour certains partisans du CH, cette justification n’est qu’une excuse parmi d’autres, renforçant l’idée que Marchessault a simplement utilisé Montréal pour maximiser son contrat à Nashville.

Mais ce n'est pas juste Marchessault qui est dans l'eau chaude.

Le match de ce soir pourrait être déterminant pour l’avenir de Andrew Brunette et de plusieurs joueurs clés des Predators.

Une nouvelle défaite prolongerait la crise à Nashville et pourrait forcer Barry Trotz à intervenir, que ce soit en remaniant le personnel ou en explorant des options sur le marché des échanges.

Pour Marchessault, il s’agit d’un moment charnière. À 33 ans, il est encore temps de redresser la barre, mais il devra rapidement prouver qu’il peut être plus qu’un joueur offensif unidimensionnel.

Avec Stamkos qui remet publiquement en question l’éthique de travail de l’équipe et Brunette qui lutte pour conserver son poste, l’avenir des Predators semble plus incertain que jamais.

Ce soir, tous les regards seront tournés vers le Centre Bell. Les Predators, en quête d’une victoire salvatrice, joueront sous une pression énorme.

Pour Andrew Brunette, ce pourrait être le dernier match à la barre de l’équipe. Et pour Jonathan Marchessault, c’est l’occasion de répondre à ses détracteurs, qu’ils soient dans le vestiaire ou dans les gradins.

Dans cette saga où frustration, ambition et désillusion s’entremêlent, le verdict tombera sur la glace.

Pour Marchessault et les Predators, il ne s’agit plus seulement de gagner, mais de sauver ce qui reste d’une saison déjà en miettes.