C’est le genre de moment anodin qui fait exploser les réseaux sociaux.
Une simple entrevue entre coéquipiers. Une question rigolote, une réponse improvisée.
Et pourtant, ce sont parfois ces petits instants de vérité qui dévoilent le vrai visage d’un joueur.
Quand on demande à Jayden Struble et Arber Xhekaj quel joueur ils aimeraient entendre avec un micro pendant un match, les deux n’ont même pas besoin de réfléchir.
Lane Hutson.
Mais pas pour les raisons qu’on pourrait croire.
Ce n’est pas qu’il crie fort. Ce n’est pas qu’il est baveux comme Brendan Gallagher. C’est même le contraire.
« Lane Hutson, ce serait drôle à mic’d up juste parce qu’il est awkward », lance Struble en riant. « Il dirait probablement pas un mot du match. Il est drôle, mais dans son genre. Il est maladroit. »
Et là-dessus, Xhekaj en rajoute une couche.
« Une fois, un gars a pris une pénalité contre lui, pis Lane s’est tourné vers lui pour lui dire : ‘Je suis désolé.’ Je lui ai dit : ‘Tu peux pas faire ça dans la LNH, bro! Tu peux pas t’excuser à un joueur qui vient de prendre deux minutes pour t’avoir accroché!’ »
La vidéo a fait sourire tout le monde, mais en coulisses, plusieurs fans ont eu un pincement au cœur.
Lane Hutson once apologized to a player for taking a penalty on him 😭
— B/R Open Ice (@BR_OpenIce) July 31, 2025
(via YT/Royal LePage Atlantic Homestead) pic.twitter.com/aoMczmBbcC
Parce qu’on parle ici de Lane Hutson, le jeune défenseur talentueux que le CH a repêché en 2022, un génie du hockey offensif, mais aussi un gars discret, réservé, presque effacé dans un sport où les gueules fortes dominent.
Et là, ses propres coéquipiers le traitent d’awkward devant la caméra.
Il ne faut pas s’y méprendre : il n’y a aucune malice dans les propos de Struble et Xhekaj.
On sent l’affection derrière les rires, mais il y a quand même un malaise.
Parce que ce n’est pas la première fois que Lane Hutson est défini par ce qu’il n’est pas. Pas assez grand. Pas assez vocal. Pas assez intimidant.
Depuis qu’il a 15 ans, Lane Hutson se bat contre ce qu’on projette sur lui.
Un petit défenseur, au style audacieux, dans un monde de colosses qui te rentrent dans le mur à la première erreur.
Et malgré ça, année après année, il grimpe. Il domine les tournois internationaux. Il écrase la NCAA. Il s’impose à Montréal comme un espoir de premier plan.
Et pourtant, il reste ce « bon gars » qu’on décrit toujours avec des mots comme humble, gêné, effacé. Comme si son manque de flamboyance sociale faisait de lui un extraterrestre dans une chambre de hockey.
C’est là que l’histoire devient touchante. Parce que Hutson ne joue pas le rôle du gars réservé. Il est ce gars-là.
Un kid brillant, doux, respectueux. Le genre à dire merci à ses adversaires. Le genre à s’excuser après un accrochage. Le genre à sourire au lieu d'être baveux.
Et dans un monde saturé de trash talk, de gros ego et de mises en échec louche, ce genre de personnalité détonne. Ça dérange même. Pas parce qu’elle est mauvaise… mais parce qu’elle est rare.
Ce n’est pas un hasard si Lane Hutson a toujours été un peu à part dans ses équipes.
Il a dû apprendre à exister sans hausser le ton. À faire sa place dans des vestiaires remplis de voix fortes, sans jamais jouer au dur.
Et ça, c’est un exploit en soi.
Parce que la LNH, on le sait, est un monde impitoyable. Surtout pour les défenseurs. Encore plus pour ceux qui mesurent 5’10” et qui pèsent moins que certains attaquants junior.
Hutson, lui, a dû prouver à chaque étape qu’il pouvait survivre, puis dominer, sans trahir sa nature. Sans devenir quelqu’un d’autre.
Le plus ironique dans tout ça? C’est que sa timidité devient justement ce qui le rend unique.
Ce qui rendrait son mic’d up génial, c’est le silence. Ce serait de capter l’inconfort, les excuses maladroites, les demi-sourires, les petites phrases à voix basse. Ce serait du jamais vu. Une plongée dans la tête d’un gars qui ne joue pas au hockey pour se mettre en scène, mais pour créer des jeux sublimes, silencieux, invisibles.
Et si Struble et Xhekaj ont lancé ça à la blague, sans aucune mauvaise intention, ils ont sans le vouloir mis en lumière quelque chose de précieux : l’existence d’un joueur différent, authentique, qui ne joue pas la game des apparences.
Est-ce que Hudson est awkward? Oui. Et c’est parfait comme ça.
Est-ce qu’il parle peu? Oui. Mais quand il parle, c’est sincère.
Est-ce qu’il s’excuse trop? Peut-être. Mais entre un joueur baveux et un joueur respectueux, quel modèle voulons-nous pour nos futurs athlètes?
Hutson est l’antithèse du cliché du défenseur alpha.
Et pourtant, sur la glace, il est souvent le plus intelligent, le plus imprévisible, le plus créatif.
Un Mozart dans une ligue de percussions.
Alors oui, le Québec a souri en entendant cette entrevue. Mais au fond, ce qu’on a ressenti, c’est autre chose.
Une forme d’admiration. De respect. Et peut-être même un brin de protection.
Parce que dans une ligue où les voix fortes écrasent les autres, Lane Hutson continue de jouer, d’avancer, et de faire sa place, à sa manière.
Et ça, c’est mille fois plus fort qu’un trash talk.