Le Canadien de Montréal a encore frappé un grand coup. Et cette fois, ce n’est pas avec un géant ou une montagne de muscles.
C’est avec un joueur que plusieurs recruteurs ont boudé à cause de sa taille, mais que le Tricolore, fidèle à sa nouvelle philosophie de repêchage axée sur le talent pur, a su identifier comme un diamant brut.
Avec la 113e sélection du repêchage 2025, le CH a jeté son dévolu sur LJ Mooney, un attaquant américain de 5 pieds 8 pouces (certains disent 5 pieds 7) et 160 livres tout mouillé, mais dont les mains, la vision et l’intelligence sur la glace dépassent de loin les standards physiques habituels.
LJ Mooney est le cousin du dynamique Logan Cooley, maintenant joueur étoile du Mammoth de l’Utah.
Leur relation dépasse le simple lien familial : ils s’entraînent ensemble, se conseillent, et partagent la même rage de vaincre, cette mentalité de « petit contre le monde » que les joueurs sous-estimés doivent cultiver pour s’imposer.
Les deux cousins ont grandi ensemble à jouer au hockey de rue et aux mini-bâtons dans les sous-sols de Pittsburgh.
« LJ est plus talentueux que nous tous », a déjà lancé Vincent Trocheck, le joueur de centre des Rangers.
Et Cooley abonde dans le même sens :
« Il est tellement bon. Il sera prêt pour tout ce qu’on lui lancera. »
L'idole de Mooney est Pavel Datsyuk. Il a grandi en regardant les Red Wings et non les Penguins, malgré qu’il ait été élevé dans la banlieue de Pittsburgh.
Ce n’est pas un hasard. Datsyuk, comme lui, était un génie de l’évasion, un maître du maniement de rondelle et un donneur de tasses de café dans les batailles à un contre un. Mooney aspire au même destin.
Et même si la comparaison peut paraître ambitieuse, plusieurs recruteurs s’entendent pour dire que son cerveau de hockey est déjà calibré pour la LNH.
Ce choix, c’est un véritable vol. LJ Mooney a longtemps été considéré comme un talent de première ronde. Certains le voyaient même dans le top 15, voire top 10, en raison de ses qualités offensives hors normes.
Mais la réalité cruel du repêchage est revenue le hanter : trop petit, pas assez explosif, pas assez robuste. Résultat? Les équipes frileuses l’ont laissé glisser… jusqu’à Kent Hughes, qui n’a pas hésité une seule seconde à appuyer sur la gâchette.
Parce que LJ Mooney, c’est du hockey haut de gamme. Il possède des mains fulgurantes, une vision périphérique de niveau élite, et un QI hockey au-dessus de la moyenne.
Avec le programme américain des moins de 18 ans (USNTDP), il a démontré qu’il pouvait créer des jeux dans des espaces restreints, manipuler les défenseurs avec des feintes intelligentes, et transformer des jeux brisés en passes parfaites.
Son taux de passes complétées vers des chances de marquer de type A frôle l’élite : 1,17 par match, avec un taux de succès de 88 %. Du jamais vu pour un joueur aussi souvent ciblé par la défensive adverse.
Son cas divise. D’un côté, les partisans du talent pur comme Scott Wheeler (The Athletic), qui le classait 38e sur sa liste. De l’autre, des observateurs plus prudents comme Corey Pronman, qui le plaçait 102e. Tous s’accordent sur une chose : c’est un joueur spectaculaire, mais difficile à projeter.
Car oui, Mooney a des lacunes. Son gabarit est un handicap. Son coup de patin n’est pas élite. Il ne crée pas suffisamment de séparation en accélération. Et surtout, son jeu devient trop périphérique quand le niveau d’opposition augmente.
Lors des matchs contre des équipes NCAA ou au Mondial U18, il a parfois semblé rebondir sur les défenseurs comme une balle de ping-pong.
Son taux de conversion sur les chances de type A est faible (8 %), et sa capacité à marquer en espace restreint est limitée.
Mais voilà : il a cette flamme, ce feu intérieur, cette détermination presque agressive à prouver qu’il peut le faire. Et c’est là que le pari du Canadien prend tout son sens.
Depuis deux ans, le CH a démontré qu’il était prêt à sortir des sentiers battus. Le repêchage de Lane Hutson fut la première preuve éclatante.
Et aujourd’hui, c’est Mooney. Des joueurs électrisants, imprévisibles, qui font lever les foules, mais qui ne font pas l'unanimité.
Dans le cas de Mooney, les conditions sont idéales. Il poursuivra son développement à l’Université du Minnesota, là où son cousin Cooley a explosé avant d’atteindre la LNH.
Le programme est solide, les entraîneurs comprennent comment gérer des talents atypiques, et l’encadrement académique est rassurant pour un jeune homme qui a grandi dans une famille de petit hockeyeurs déterminés.
Mooney ne s’en cache pas : il est conscient que sa taille est un sujet.
« J’en entends parler tous les jours. Toute ma vie. C’est ce que tout le monde me rappelle. Mais je vais continuer à prouver que je peux faire mentir tout le monde », a-t-il dit, avec cette colère contenue qui caractérise les meilleurs petits joueurs de l’histoire.
Dans ses entraînements d’été, il se mesure à des vétérans comme J.T. Miller et John Gibson. Il apprend à encaisser les coups, à jouer dans les coins, à ne jamais reculer.
Son modèle actuel? Conor Garland, attaquant des Canucks.
« J’adore son style, sa combativité, sa façon de créer des jeux même s’il est plus petit. C’est ce que je veux devenir. »
Repêcher Mooney au 113e rang, c’est le genre de coup de dés que les équipes intelligentes prennent. Si ça ne fonctionne pas? Il deviendra un bon joueur de la Ligue américaine, peut-être un spécialiste de deuxième vague en avantage numérique.
Mais si ça fonctionne? Montréal pourrait mettre la main sur un attaquant de premier plan qui deviendrait le vol du repêchage.
L’aspect rassurant, c’est que malgré son volume élevé de possession de rondelle, Mooney ne perd pas beaucoup de disques.
Son ratio de revirements est étonnamment bas (3.6 par match, contre 3.6 récupérations aussi). Cela démontre un joueur mature, réfléchi, capable de ralentir le jeu et de le contrôler malgré son déficit physique.
Avec Mooney, le Canadien envoie un message clair : la Ligue nationale n’est plus uniquement une ligue de géants.
Elle est aussi une ligue de cerveaux, de mains, de flair. LJ Mooney incarne cette nouvelle génération de joueurs « contre-courant », qui réussissent non pas en écrasant leurs adversaires, mais en les contournant avec style.
Il aura besoin de temps. Il devra ajouter de la masse, travailler son coup de patin, affiner son tir. Mais s’il réussit à cocher ces cases, Montréal pourrait bien avoir repêché un futur coup de circuit… dans la cour des petits.