Malaise à Quebecor: Benoit Dutrizac dans de beaux draps

Malaise à Quebecor: Benoit Dutrizac dans de beaux draps

Par David Garel le 2025-02-12

Comme si le Québec n’avait pas déjà eu son lot de controverses cette semaine, voilà que Benoît Dutrizac en rajoute une couche en crachant sur le spectacle de Kendrick Lamar lors du Super Bowl.

Après l’énorme malaise provoqué par Louis Lacroix et son commentaire ouvertement non-tolérant (pour ne pas utiliser le mot qui commence par r...), on aurait pu espérer un peu de retenue du côté de QUB Radio, la station de Québecor. Mais non.

Dutrizac, qui ne rate jamais une occasion de jouer la carte de la provocation mal placée, a démontré un mépris absolu envers le rap et, par extension, envers la culture qui l’entoure.

Il n’a peut-être pas osé traiter Lamar et ses danseurs de « gangs de rue » comme Lacroix, mais le fond du message était tout aussi dédaigneux.

Ce qui est fascinant avec Benoît Dutrizac, c’est qu’il n’a jamais rien de pertinent à dire sur la culture hip-hop… jusqu’à ce qu’il puisse en parler négativement.

Son passage en ondes avec Jean-Charles Lajoie s’inscrivait dans la lignée classique des critiques simplistes:

Ce n’est pas de la vraie musique .Les artistes de ce genre n’ont rien à offrir à la société.

Toujours le même refrain, toujours la même incompréhension totale d’une culture qui domine l’industrie musicale mondiale depuis des décennies.

Mais ce qui est encore plus hypocrite, c’est que Benoît Dutrizac est le premier à se présenter comme un homme de vérité, un libre penseur. 

Un gars qui dénonce la censure et le politiquement correct. Pourtant, dans sa petite vision étriquée du monde, il refuse d’accepter que le hip-hop est un mouvement culturel influent, avec des artistes d’envergure comme Kendrick Lamar, qui a gagné un prix Pulitzer pour ses paroles percutantes.

Une station qui tolère tout… sauf le rap. Ce qui choque encore plus, c’est l’énorme hypocrisie de QUB Radio et de Québecor dans cette affaire.

Dutrizac crache ouvertement sur une performance artistique qui ne cadre pas avec leur vision dépassée de la culture, et tout passe comme une lettre à la poste.

À QUB Radio, on peut mépriser la culture rap sans conséquence.

À croire que dans certaines sphères médiatiques, tout ce qui touche au hip-hop est automatiquement assimilé aux choses les plus dégoûtantes de la vie.

C’est un affront non seulement envers Kendrick Lamar, un artiste qui a élevé le rap à un niveau littéraire et engagé rarement atteint, mais aussi envers toutes les communautés qui se reconnaissent dans cette musique.

Cette semaine aura été un triste rappel que certaines figures médiatiques québécoises sont encore enfermées dans un conservatisme culturel d’un autre siècle.

Benoît Dutrizac n’aurait jamais osé parler ainsi d’un chanteur de rock ou d’un artiste country.

Mais le hip-hop ? Facile à mépriser. Facile à associer aux clichés les plus réducteurs. Facile à critiquer sans jamais l’avoir réellement écouté.

Pendant ce temps, les artistes hip-hop québécois – qui luttent déjà pour une reconnaissance dans un marché frileux – voient encore des animateurs de radio tenir des discours dignes d’un autre siècle.

Si Dutrizac avait voulu démontrer qu’ils sont complètement déconnectés de la réalité culturelle d’aujourd’hui, ils n’auraient pas pu mieux faire.

Et pendant que Louis Lacroix est temporairement suspendu, ces deux-là continuent de ternir les ondes sans aucune conséquence.

Une autre journée normale dans le monde des médias québécois.

Il y a des jours où l’on se demande si certaines voix des médias québécois vivent dans une bulle totalement déconnectée de la réalité. 

Benoît Dutrizac en a donné un parfait exemple.

Alors que Louis Lacroix a été suspendu pour son commentaire comparant la performance de Kendrick Lamar à des "gangs de rue prenant le contrôle de sa télé", Dutrizac, lui, continue d’étaler son intolérance avec son immunité qui dure depuis des décennies.

Louis Lacroix ne s’attendait sûrement pas à provoquer une telle onde de choc.

D’abord, Cogeco a hésité. Alors que Jeremy Filosa avait été suspendu pendant des semaines pour une déclaration aussi inoffensive qu’un doute sur les missions lunaires, Louis Lacroix a d’abord été protégé.

Une immense hypocrisie.

Il a fallu une énorme pression médiatique et des réactions indignées, notamment celle d’Isabelle Racicot sur les ondes de Rythme FM, qui a fondu en larmes en dénonçant l’impact destructeur de tels propos sur son fils et toute une communauté.

Finalement, Cogeco n’a eu d’autre choix que de suspendre Lacroix et de réévaluer son avenir dans l’entreprise.

Dutrizac, lui, s’en sort toujours

Mais alors que Lacroix paie (partiellement) le prix de ses paroles, Benoît Dutrizac, lui, continue de déverser son mépris en toute impunité sur les ondes de QUB Radio.

Pas besoin d’aller très loin pour voir que Dutrizac a toujours fonctionné de la même façon :

2006 : En entrevue avec une femme musulmane, il a comparé les femmes portant le niqab à des « sacs de vidange ».

2010 : Il s’attaque aux Premières Nations en les qualifiant de profiteurs du système. Dans certaines émissions, Dutrizac a fait des déclarations controversées sur les Autochtones, notamment en critiquant les avantages fiscaux et les subventions gouvernementales, ce qui a été perçu comme une généralisation négative.

2016 : Il ridiculise le mouvement #MeToo en minimisant les plaintes de plusieurs femmes. Il a fait plusieurs commentaires sceptiques sur le mouvement, affirmant que certaines accusations étaient exagérées et qu’il y avait une forme de « chasse aux sorcières » contre les hommes.

2021 : Il traite de tous les noms publiquement une invitée en ondes, provoquant une nouvelle controverse.

L’histoire se répète :

Quand on parle de musique rap, ce n’est jamais vu comme une performance artistique. Non. Pour Dutrizac et d’autres, c’est de la "sous-culture", du bruit, un problème.

C’est exactement cette mentalité dépassée qui alimente des stéréotypes dangereux et qui contribue à la banalisation du racisme dans nos médias.

Deux poids, deux mesures. La réalité est frappante.

Jeremy Filosa : suspendu, humilié, envoyé en formation pour une déclaration anodine sur la Lune.

Louis Lacroix : suspendu, mais seulement après une énorme pression publique.

Benoît Dutrizac : intouchable, malgré des décennies de propos incendiaires.

Une tolérance inquiétante. Pourquoi Dutrizac peut-il continuer sans conséquence ? Parce que Québecor protège les siens.

Parce que dans certaines sphères médiatiques, on ferme les yeux sur les préjugés grossiers, tant qu’ils viennent de voix "populaires".

Mais il arrive un moment où les auditeurs doivent dire : assez, c’est assez.

Alors que le Québec évolue, que des artistes comme Kendrick Lamar sont célébrés partout dans le monde pour leur engagement social, leurs paroles profondes et leur impact culturel, Dutrizac et Lajoie s’accrochent à une vision réductrice et dépassée.

La vraie question : Quand est-ce que ça va cesser ? Louis Lacroix, au moins, a subi des conséquences.

Mais Benoît Dutrizac, lui, va-t-il un jour être tenu responsable de son mépris constant et de ses propos incendiaires ?

Il est temps que ces figures médiatiques qui ne font qu’entretenir des préjugés soient enfin mises face aux conséquences de leurs paroles.

De cette façon, on pourra tous avancer en tant que société.