C’était censé être une journée banale au Centre Bell. Un simple entraînement matinal des Kings de Los Angeles avant leur match contre le Canadien.
Tous les regards étaient tournés vers Phillip Danault, Corey Perry, Joel Edmundson, Joel Armia, des visages familiers d’un passé récent. Tous ont parlé aux médias.
Même Danault, pourtant en pleine léthargie offensive (3 points en 16 matchs), a pris le temps de répondre aux questions. Tous… sauf Marc Bergevin.
Dans les gradins, juste derrière les journalistes, Bergevin était là. Immobile. Froid. Muet. Aucun bonjour, aucun hochement de tête, aucune ouverture.
Son silence était volontaire, assumé et surtout méprisant. Il avait beau se tenir à deux pas des caméras, il restait inaccessible, comme s’il avait décidé que le Québec médiatique ne méritait plus sa voix.
Ce mépris, elle ne vient pas de nulle part. Elle a des racines profondes, et le moment déclencheur est bien connu : la fameuse histoire de l’ascenseur du Centre Bell, où le journaliste Marc-Antoine Godin de Radio-Canada a lancé, sourire en coin, à un Bergevin piégé dans un ascenseur bondé :
« Tu sais où tu vas, Marc ? »
Une phrase qui se voulait drôle, mais qui a glissé dans l’humiliation publique. Une attaque "cheap", un rappel condescendant de son passé, de son congédiement. Devant témoins. Devant d’autres journalistes. Devant membres du personnel.
Bergevin n’a rien répondu. Il est resté figé, le regard sur son téléphone. Ce jour-là, il a choisi le mépris froid au lieu de réagir. Et depuis, il s’est enfermé dans un silence qui perdure. Plus aucun mot aux médias québécois. Ni à RDS. Ni à TVA Sports. Ni à Radio-Canada. Ni à La Presse. Ni à personne.
Et pourtant, s’il avait parlé cette semaine, on aurait peut-être pu lui poser la question la plus pertinente : pourquoi tente-t-il de reproduire à Los Angeles le même modèle qui a échoué à Montréal ?
Car les similitudes sont troublantes :
Des vétérans en surnombre : Kopitar (36 ans), Doughty (35 ans), Perry (40 ans), Edmundson (32 ans), Talbot (37 ans).
Un manque flagrant d’espoirs offensifs : après Byfield, Laferrière et Clarke, c’est le désert.
Une équipe lente, qui plafonne : 8 points en 16 matchs pour Kopitar, 3 pour Danault, et aucune relève en vue.
C’est du patchage à la Bergevin. Des vétérans, de l’expérience, de la robustesse, de la loyauté… mais pas de vision à long terme. Une fenêtre qui semble déjà refermée.
Et derrière Ken Holland, l’homme en poste officiellement, c’est Marc Bergevin qui chuchote à l’oreille comme on l'a vu aujourd'hui au Centre Bell.
Mais dans les faits, il ne peut plus se permettre d’assumer la responsabilité publique de ses idées. Trop risqué. Trop chargé émotionnellement face au Québec.
On parle d'un homme qui ne veut plus être jugé
Et c’est là qu’on touche au nœud du problème. Bergevin refuse de parler aux médias francophones parce qu’il refuse d’être jugé. Parce qu’il ne supporte plus d’être confronté. Parce qu’il voit chaque micro comme un tribunal.
Ce n’est pas seulement du ressentiment. C’est de l’épuisement moral. Dix ans à Montréal l’ont vidé. Et aujourd’hui, chaque mot qu’il pourrait prononcer serait déformé, critiqué, analysé à outrance.
Alors il se tait. Il regarde les journalistes dans les yeux, et il les ignore.
Mais ce silence devient le problème en soi. Parce qu’il renforce l’idée que Marc Bergevin a quelque chose à cacher. Que s’il ne parle pas, c’est parce qu’il ne veut pas qu’on fasse le lien entre le "choke" des Kings et les démons du CH de 2021.
Connaissant l'orgueil de Marc Bergevin, cela doit le rendre complètement fou de voir les succès du CH.
La différence entre le Canadien et les Kings fait mal au coeur.
Le CH : 25,8 ans de moyenne d’âge, le plus jeune groupe de la LNH.
Les Kings : 29,7 ans, le deuxième plus vieux.
Le CH : Suzuki, Caufield, Slafkovsky, Dobson, Hutson, Demidov, Bolduc.
Les Kings : Perry, Doughty, Kopitar, Edmundson, Danault, Armia.
Il est fascinant de constater que l’organisation où Bergevin agit en coulisses est celle qui s’éloigne le plus du modèle qu’il a refusé à Montréal (une vraie reconstruction)
Ce n’est pas de la nostalgie. C’est une reconstruction ratée du passé, une tentative de faire revivre un noyau semblable à celui de 2021, mais sans la magie, sans Carey Price, sans Shea Weber, sans même la jeunesse pour faire vibrer.
Le plus ironique dans toute cette histoire, c’est que tout le monde a parlé aux médias cette semaine :
Phillip Danault, malgré son absence sur la feuille de pointage.
Corey Perry, même à 40 ans, toujours disponible.
Joel Edmundson, qui a même fait le tour de ses anciens coéquipiers comme une tournée d’adieu.
Jake Evans, Josh Anderson, Caufield, Xhekaj, tous ont évoqué les retrouvailles.
Bergevin, lui, n’a même pas salué... et n'a même pas été mentionné par les joueurs.
Pas un mot aux journalistes. Pas un regard aux anciens collègues. Pas un geste envers ceux qui l’ont défendu dans ses pires moments.
Marc Bergevin pensait peut-être qu’en revenant au Centre Bell avec les Kings, il pourrait se fondre dans la masse. Qu’il pourrait observer, contrôler, exister en périphérie. Mais dans une ville comme Montréal, le silence est bruyant. Et plus il se tait, plus il crie son refus de réintégrer l’espace public québécois.
Ce n’est pas l’homme qu’on juge. C’est l’attitude. Cette fermeture rigide, ce refus de dialoguer, cette incapacité à faire face aux critiques.
Même les grands joueurs, même les entraîneurs, même les patrons de la LNH font tous face aux médias. Mais Marc Bergevin reste dans son bunker.
Et on espère pour lui… qu’il ne croisera plus jamais un journaliste dans un ascenseur.
