Marc Bergevin subit un malaise dans l’ascenseur

Marc Bergevin subit un malaise dans l’ascenseur

Par Marc-André Dubois le 2025-05-24

Marc Bergevin en a vu d’autres. Des journalistes arrogants, des phrases mielleuses suivies de poignards dans le dos, des analyses sans pitié faites avec un air supérieur.

Mais celle-là, il ne l’a pas digérée. Et il a bien fait. Parce que cette fois, dans l’ascenseur du Centre Bell, il ne s’agissait pas d’un débat d’idées, ni d’une question difficile. Il s’agissait d’une tentative ratée d’humour, d’un moment d’ego mal placé signé Marc-Antoine Godin.

Tout le monde en parle depuis quelques jours, mais remettons les faits dans leur contexte. Marc Bergevin, l’ancien directeur général du Canadien de Montréal, aujourd’hui conseiller spécial chez les Kings de Los Angeles, se trouvait au Centre Bell.

Une routine. Un homme de hockey dans un temple du hockey. Rien de plus. Jusqu’à ce que Marc-Antoine Godin, chroniqueur à Radio-Canada, décide de lui lancer une blague qui a glacé l’air ambiant.

«Tu sais où tu vas, Marc?»

Dans un ascenseur bondé, avec d’autres journalistes et des membres du personnel autour. Un ton condescendant, un sourire en coin.

Comme si Godin voulait rappeler à Bergevin que son règne était derrière lui. Comme si cette simple question anodine camouflait un jugement à peine voilé : tu ne fais plus partie du paysage ici.

Marc Bergevin a subi le malaise de la mauvaise blague, et ce dans un ascenseur remplo de gens. Imaginez à quel point il devait être inconfortable.

En plus, Godin, baveux comme jamais, raconte l'histoire en montrant Bergevin comme un être humain méprisable. Godin paraît très mal dans cet extrait vidéo:

Mais voilà, Bergevin n’est pas du genre à se plier aux jeux médiatiques. Il ne l’a jamais été. Il a ignoré. Froidement. Sans même détourner les yeux de son téléphone. Un silence lourd. Un silence qui en disait long.

Et depuis, on voit les médias québécois se donner à cœur joie pour le ridiculiser. On parle d’un homme «amer», «isolé», «froid».

Mais personne ne remet en question le comportement initial du journaliste. Personne ne se demande ce qu’aurait fait un autre dirigeant dans cette situation.

Parce que soyons honnêtes : si un joueur, disons Cole Caufield, avait été victime d’une telle remarque publique, les mêmes journalistes auraient crié au manque de respect.

Mais comme c’est Bergevin, on s’en permet. Et c’est précisément pour ça qu’il refuse de donner des entrevues aux médias francophones. Parce qu’il connaît la game. Parce qu’il sait que plusieurs d’entre eux rêvent de le voir échouer.

Il suffit de regarder la couverture médiatique entourant sa candidature avec les Islanders de New York. Chaque fois que son nom surgit, c’est pour rappeler ses erreurs, ses échecs, ses décisions impopulaires.

Personne ne souligne ses bons coups.

Alors quand Bergevin est ignoré pour le poste de directeur général à Long Island au profit de Mathieu Darche, plusieurs dans les médias québécois jubilent.

Ils ne le disent pas ouvertement. Mais entre les lignes, dans les soupirs radiophoniques, dans les sous-entendus des chroniques, on sent le soulagement. Comme si la province entière se vengeait de dix ans de frustrations accumulées contre un homme qui n’a jamais cherché à plaire.

Mais l’histoire de l’ascenseur, c’est la goutte qui fait déborder le vase. C’est l’incarnation parfaite de cette relation brisée entre Bergevin et le milieu médiatique québécois. Et ce n’est pas juste une question de susceptibilité. C’est une question de respect.

Marc-Antoine Godin a tenté une blague, soit. Mais dans un contexte aussi tendu, aussi sensible, où la carrière d’un homme est constamment scrutée, ridiculisée, jugée… ce n’était pas le moment. Ce n’était pas le lieu. Et ce n’était surtout pas le ton.

En refusant de répondre, Marc Bergevin n’a pas fait preuve d’arrogance. Il a fait preuve de maîtrise. Il a refusé de donner un moment viral à quelqu’un qui cherchait exactement ça. Il a gardé sa dignité. Et dans un monde où chaque micro-expression est disséquée, c’est peut-être l’attitude la plus mature qu’il pouvait adopter.

La vérité, c’est que Bergevin en a marre. Marre des jugements hâtifs. Marre des procès médiatiques. Marre d’un climat où la moindre ouverture est perçue comme une faiblesse. Et on le comprend.

Aujourd’hui, il n’a plus rien à prouver. Il pourrait décrocher n’importe quel poste ailleurs dans la LNH. Son téléphone sonne. Et s’il refuse d’accorder des entrevues, ce n’est pas parce qu’il a quelque chose à cacher. C’est parce qu’il a compris que dans cette province, certains journalistes ne cherchent pas la vérité. Ils cherchent à le piéger.

Et pendant qu’on se moque de lui parce qu’il regarde son téléphone dans un ascenseur, lui regarde la LNH dans son ensemble. Il vise haut. Et il n’a plus besoin de plaire à personne.

Alors oui, cette fois, on est du bord de Bergevin. Parce que cette fois, c’est lui qui a su se taire avec classe pendant qu’on essayait de le rabaisser avec une blague de mauvais goût.

Et ça ne se fait pas. Question de respect... et de politesse...

Et au fond, c’est peut-être ça le vrai malaise. Ce n’est pas juste Marc-Antoine Godin. C’est tout le climat médiatique québécois.

Un climat où, étrangement, on a senti une forme de jubilation collective à l’idée que Marc Bergevin n’obtienne pas le poste à Long Island.

Comme si, pour certains journalistes, ce refus avait une saveur de revanche. Comme si on célébrait, à demi-mot, la « punition » d’un homme qui, à leurs yeux, n’a jamais assez payé pour son silence, son mépris, ses décisions ou son franc-parler.

Mais cette euphorie mal camouflée trahit surtout une chose : le ressentiment. Ce n’est pas un secret que Bergevin a préféré les médias anglophones pendant son règne à Montréal.

Ce n’est pas un secret non plus qu’il a imposé ses règles, ses silences, ses limites. Mais est-ce impardonnable? Est-ce une raison valable pour espérer son échec?

En fin de compte, l’ascenseur du Centre Bell n’aura été que le reflet d’un système tordu où l’on réclame des entrevues avec ceux qu’on a plaisir à détester.

Où l’on exige l’accessibilité de ceux qu’on ridiculise ensuite à micro ouvert.

Et si Marc Bergevin a choisi l’ignorance glaciale comme seule réponse, c’est peut-être parce que, parfois, le mépris est la seule langue que le monde médiatique comprend.