Retour au Centre Bell après le meilleur match de la saison contre Edmonton, une victoire où tout le monde avait sorti la pelle pour Jacob Dobes, bloqué des tirs, gagné des batailles et joué comme une équipe affamée.
Quarante-huit heures plus tard, changement de décor brutal.
Défaite contre les Flyers, frustration collective, gestes mal contrôlés, maturité absente, et une conférence de presse beaucoup trop douce pour ce qui s’est réellement passé sur la glace.
Ce qui ressort d’abord de l’après-match, c’est cette annonce glissée presque sans bruit par Martin St-Louis sur la situation devant le filet.
Samuel Montembeault n’est pas envoyé à Laval pour être puni ou tassé sur une tablette.
Le message du coach est clair et volontairement apaisant.
« Ça ne m’importe pas comment on est arrivés où on est. La question, c’est comment on la rebâtit. »
Pour St-Louis, le séjour à Laval est un outil, pas une condamnation.
« Avec la façon dont l’horaire est organisé pour nous à Laval, où il va être, il va nous rejoindre à Pittsburgh. Je pense que c’était un scénario parfait pour aller chercher quelques matchs et recommencer à bâtir quelque chose. »
Le plan est déjà tracé.
Montembeault va jouer à Laval, reprendre du rythme, puis rejoindre l’équipe pour le voyage à Pittsburgh après le match du 20 décembre à Montréal.
Autrement dit, le Canadien va rouler avec Fowler et Dobes cette semaine, puis ramener Monty dans le portrait dès l’aller-retour contre les Penguins.
Rien d’improvisé. Rien de dramatique. Une gestion froide, assumée, presque clinique.
Mais derrière cette annonce rassurante, la réalité du match contre les Flyers reste impossible à camoufler.
Le Canadien n’a jamais contrôlé le rythme.
Dominé au cercle des mises au jeu de façon humiliante, incapable d’avoir la rondelle, constamment en réaction.
67 pour cent pour Philadelphie, 32 pour cent pour Montréal.
Quand une équipe commence chaque séquence à courir après la rondelle, aucune structure ne tient.
Aucune identité ne survit. Et personne, dans la salle, n’a jugé bon de poser la question.
Sur la glace, le ton a été donné très tôt.
Rasmus Ristolainen a fait exactement ce qu’il voulait.
Mise en échec lourde sur Juraj Slafkovsky, présence physique constante, aucune réplique réelle.
Aucun joueur n’a calmé le jeu. Aucun défenseur n’a imposé de limites.
La seule réaction est venue d’Ivan Demidov, double-échec mal placé, pénalité inutile, symbole parfait d’un groupe qui agit sous l’émotion plutôt que sous le contrôle.
La séquence la plus troublante reste pourtant celle qui n’apparaît pas sur la feuille de pointage.
Slafkovsky, après la mise en échec, blâme publiquement Adam Engstrom sur la glace.
Regard appuyé, paroles visibles, linge sale lavé devant 21 000 personnes. Aucun vétéran pour couper court. Aucun leader pour ramener le calme. Ce genre de geste dit tout sur l’état mental du groupe.
Martin St-Louis n’a pas haussé le ton devant les médias.
Ton posé, réponses mesurées, même lorsqu’on revient sur les erreurs coûteuses.
Une attitude presque trop calme pour une défaite aussi révélatrice. Et surtout, un après-match où les vraies questions ne sont jamais venues.
Personne n’a challengé le coach sur l’absence totale de réponse face à Rasmus Ristolainen, pourtant libre de faire ce qu’il voulait pendant soixante minutes.
Personne n’a demandé pourquoi le Canadien a laissé un défenseur adverse imposer sa loi sans jamais envoyer un message clair, physique, collectif.
Personne n’a osé revenir sur la réaction publique de Juraj Slafkovský après le jeu qui a changé le match, ce long regard, ce blâme visible envers un jeune coéquipier, dans un amphithéâtre plein, devant toute la ligue.
Les mises au jeu, dominées de façon humiliante, sont aussi passées sous silence.
Un aspect fondamental du contrôle d’un match, surtout contre une équipe structurée comme les Flyers, mais qui n’a suscité aucune relance.
Pas un mot sur la façon dont le Canadien a constamment couru après la rondelle.
Pas un mot sur cette incapacité à calmer le jeu quand tout commence à glisser.
La bonne humeur soudaine de St-Louis a fait le travail.
Elle a désamorcé la salle.
Elle a protégé ses joueurs.
Elle a aussi détourné l’attention.
Derrière ce calme, difficile de ne pas sentir une correction de trajectoire, une volonté d’éviter de refaire l’erreur des derniers jours, celle d’avoir exposé Arber Xhekaj publiquement par frustration.
Cette fois, le message est passé sans fracas. Trop proprement, peut-être.
Parce que la réalité demeure. Ce groupe a manqué de maturité, de contrôle émotionnel et de répondant.
Et tant que personne ne forcera ces conversations-là en pleine lumière, tant que ces zones d’inconfort resteront intactes, le Canadien continuera de se raconter des histoires après ses défaites.
Protéger ses joueurs, c’est une chose.
Refuser d’affronter les vrais enjeux, c’en est une autre.
Misère...
