Le Canadien s’envole pour l’un des voyages les plus ingrats de la saison… et Martin St-Louis vient de jeter une poignée de gravier dans son propre engrenage.
Après deux victoires avec Jakub Dobes devant le filet ... deux matchs où le jeune gardien a respiré la confiance, la lecture et un calme presque insolent, voilà que St-Louis décide de briser le rythme.
Dobes cède le filet à Samuel Montembeault pour le premier duel du back-to-back : Vegas vendredii, Colorado samedi.
C’est un choix qui soulève les sourcils partout à Montréal. Parce qu’on a déjà vu ce film.
La dernière fois que St-Louis avait ignoré la logique du « ride the hot hand », la décision s’était retournée contre lui.
Dobes, qui surfait alors sur un élan, avait été puni par le système; Montembeault, froid comme un banc de parc en février, s’était effondré au premier test.
Résultat : deux gardiens en perte de repères, plus personne sur qui se reposer, et une séquence désastreuse qui avait coûté cher au classement.
Aujourd’hui, St-Louis rejoue exactement avec la même allumette.
Dobes sort d’un match solide contre Toronto, suivi d’une performance plus que compétente face à Utah.
Mais voilà que le coach le retire volontairement pour « gérer le back-to-back » et redonner un filet à Montembeault.
On comprend la logique théorique.
On comprend l’idée du partage de responsabilités. Mais la réalité du moment, elle, dit autre chose : c’est Dobes le gardien en forme, Dobes le plus structuré, Dobes le mieux placé pour affronter un monstre comme Vegas… pas Montembeault, qui revient d’une période sans rythme.
Et c’est là que la décision devient risquée.
Parce que le Canadien s’en va affronter deux clubs qui ne pardonnent rien.
Au fond, personne ne demande à ce que Jakub Dobes devienne un cheval de traînement qui garde les buts 65 fois par saison.
La seule demande, c’est simple : quand ton gardien est brûlant, tu le laisses dans son filet.
Tu le récompenses. Tu protèges son momentum.
Tu ne l’éteins pas volontairement pour « respecter un plan ».
Contre Vegas, Dobes méritait ce départ-là, point final.
Tu mets ensuite Montembeault contre Colorado, et tout le monde est content.
Mais Martin St-Louis a fait l’inverse… et ça raconte quelque chose.
Indirectement, sans jamais le dire, parce qu’il ne le dira jamais, il a choisi son numéro un.
Il a décidé d’envoyer celui qu’il considère comme son gardien le plus fiable dans le plus gros affrontement du voyage : Colorado, la machine offensive numéro un de la Ligue.
Dix victoires de suite.
La meilleure attaque de la ligue avec 94 buts, la meilleure défensive avec le moins de buts accordés… et un différentiel obscène de +44.
Le deuxième meilleur différentiel de la LNH n’est qu’à +16. C’est dire la marge.
Pendant ce temps, Montréal navigue à −3.
Et ce n’est pas parce que l’attaque ne produit pas.
Le CH est huitième dans la ligue pour les buts marqués.
Le problème, c’est ce qui rentre derrière.
Vingt-quatrième pour les buts accordés.
On ne gagne pas dans la LNH moderne avec ce genre de blessure ouverte au cœur de ta structure.
C’est précisément dans ce genre de semaine ... quand la route devient glaciale, que les équipes matures se présentent, que chaque erreur ramasse une baffe ... que tu as besoin de ton gardien le plus en confiance.
Et cette semaine, ce gardien-là, c’est Dobes.
Voilà pourquoi l’annonce de St-Louis frappe dur.
Si Montembeault répond samedi, la décision aura l’air d’un coup de maître. Si Montembeault flanche ... et que Dobes se retrouve le lendemain contre Colorado avec un club qui vient peut-être d’être plié par Vegas, alors Montréal retombera exactement dans le piège de l’automne : deux gardiens glacés, aucune certitude, et une spirale dont on connaît déjà l’odeur.
Le voyage commence ce week-end, et il dira beaucoup de choses sur ce que le Canadien est réellement.
Montréal s’en va au désert, puis en altitude. St-Louis, lui, a décidé de s’y rendre sans le gardien qui venait de lui sortir la tête de l’eau.
La route est longue.
On s'en reparle au fil d'arrivé.
À suivre ...
