Certains remplaçants se présentent sans faire de bruit, mais leur présence change tout.
Depuis le début du camp d’entraînement, Joe Veleno a lentement gravi les échelons.
Sans forcer, sans réclamer d’attention, il a simplement convaincu Martin St-Louis qu’il pouvait être bien plus qu’un simple joueur invité à relancer sa carrière.
Et dans le contexte actuel, il représente exactement ce dont le Canadien avait besoin pour combler le vide laissé par Christian Dvorak.
Samedi soir, après le dernier match préparatoire contre Ottawa, St-Louis n’a rien voulu officialiser, mais tout était dans le ton.
Le coach a confirmé qu’il voulait commencer la saison avec treize attaquants.
Derrière ses mots polis, on devinait un plan bien clair : garder Veleno sous la main, parce qu’il donne au Canadien quelque chose que peu de joueurs offrent ...de la flexibilité.
« Je ne regarde pas une seule performance, a dit St-Louis. Je regarde comment les pièces s’emboîtent. »
Cette phrase résume tout.
Le rôle que Dvorak occupait n’était pas seulement celui d’un centre défensif ; c’était celui d’un stabilisateur.
Un joueur capable de gagner des mises au jeu à gauche, de fermer le jeu dans sa zone, et de relancer une séquence sans éclat, mais efficace.
Aujourd’hui, St-Louis veut ce même effet, mais d’une autre manière : en créant des duos interchangeables sur chaque ligne.
C’est là que Joe Veleno entre en scène.
Après sa performance face aux Sénateurs, l’ancien premier choix de Détroit a montré qu’il pouvait être cette pièce mouvante qu’un entraîneur rêve d’avoir.
« J’essaie juste de jouer mon rôle, de rester responsable et de montrer que je peux aider l’équipe à gagner, » a-t-il expliqué calmement.
« Je peux jouer au centre, à l’aile, sur le désavantage numérique… peu importe où on a besoin de moi. »
Ce n’est pas un hasard si St-Louis l’a fait pivoter dans plusieurs situations pendant le camp.
L’idée n’était pas de le tester, mais de vérifier jusqu’où il pouvait aller sans perdre sa structure.
Et Veleno n’a jamais déraillé.
« Joe a une maturité dans son jeu, a reconnu St-Louis. Il comprend le tempo, il ne force rien, il lit bien les situations. »
Une phrase simple, mais lourde de sens.
Quand un entraîneur parle de lecture du jeu à ce niveau, c’est le signe d’une confiance rare.
Ce qui rend cette équation encore plus intéressante, c’est l’architecture des lignes que St-Louis tente d’installer.
Avec Alex Newhook au centre d’Oliver Kapanen et Ivan Demidov, le Canadien retrouve une paire centre-ailier capable d’alterner selon le côté de la mise au jeu.
Newhook est gaucher, Kapanen droitier.
Même chose avec Zachary Bolduc et Kirby Dach : l’un gaucher, l’autre droitier.
Cette approche donne une polyvalence que Dvorak assurait seul auparavant.
Et Veleno devient le filet de sécurité de ce système.
Il peut glisser sur n’importe quelle ligne pour équilibrer les mises au jeu, stabiliser une séquence ou réveiller un trio en panne d’énergie.
« C’est ça que j’aime, » a reconnu St-Louis.
« Quand un joueur me donne des options.
Je peux le déplacer, le mettre dans un rôle différent, et il ne perd pas son identité. »
Difficile de ne pas entendre dans cette phrase un message direct à l’endroit du Québécois.
Parce qu’à ce stade, le coach ne parle plus d’expérimentation.
Il parle d’intégration.
Et pourtant, la place n’était pas acquise.
Veleno arrivait d’un été incertain, après un rachat de contrat à Seattle et une suite d’occasions manquées à Détroit et Chicago.
À 25 ans, il se retrouvait au carrefour d’une carrière.
Mais Montréal lui a offert un contexte parfait : un vestiaire en reconstruction, un entraîneur qui prône la responsabilisation, et un système où l’intelligence de jeu vaut plus que les statistiques.
Le message est clair.
Veleno n’est pas venu pour sauver quoi que ce soit ; il est venu pour s’ancrer.
Et si St-Louis voit en lui la solution temporaire à la perte de Dvorak, c’est parce qu’il incarne cette idée que le Canadien tente d’implanter : une structure fluide où chaque joueur peut soutenir le système, pas seulement son trio.
Dans cette logique, la hiérarchie au centre devient plus horizontale :
Suzuki mène, Dach soutient, Newhook ajuste, et Veleno complète.
Personne ne remplace Dvorak directement, mais le rôle qu’il laissait derrière lui se divise et se redéfinit, ligne par ligne.
La suite ?
Martin St-Louis décidera selon les performances, mais une chose est certaine : Joe Veleno a forcé la réflexion.
Et dans un vestiaire où chaque poste doit se gagner à chaque match, c’est déjà une victoire en soi.
À suivre ...