Martin St-Louis perd patience : Arber Xhekaj joue sa dernière carte

Martin St-Louis perd patience : Arber Xhekaj joue sa dernière carte

Par André Soueidan le 2025-10-18

Le ton était lourd. Les mots, mécaniques.

Quand un journaliste lui a demandé : « Comment vois-tu la suite avec les joueurs qui vont remplacer celui-là ? », Martin St-Louis n’a pas cherché à meubler le silence.

« On continue. On continue. Il faut que tu sois capable de continuer. »

Trois phrases, aucune émotion.

Et pourtant, tout y est.

Un message d’entraîneur qui refuse de s’apitoyer, même quand les fondations de son équipe s’effritent sous ses pieds.

Car la vérité, c’est qu’à force de “continuer”, St-Louis perd des munitions.

Kaiden Guhle est tombé.

Kirby Dach est encore sur la touche.

Patrik Laine aussi.

Et pour boucher les trous, il n’a pas d’autre choix que de ressortir Arber Xhekaj, celui qu’il venait tout juste d’écarter pour ses erreurs.

C’est toujours la même réponse, mais cette fois, elle sonne différemment.

Le « on continue » de Martin St-Louis n’a plus rien du message rassembleur des débuts.

C’est devenu une phrase réflexe, comme pour se convaincre lui-même que tout va bien.

Mais les faits, eux, racontent une autre histoire.

En l’espace de 24 heures, tout a basculé.

Trois morceaux essentiels de la recette ont sauté d’un coup : Guhle, Dach et Laine.

Et du jour au lendemain, Martin St-Louis s’est retrouvé forcé de cuisiner avec ce qu’il restait dans le garde-manger.

On ne parle plus ici d’ajustements progressifs, mais d’une improvisation forcée.

Le genre de journée où tu n’as plus le choix : tu brasses tes lignes, tu changes tes ingrédients, et tu pries pour que le plat tienne encore debout.

C’est exactement ce qui se passe en ce moment à Montréal ... une équipe rafistolée à la hâte, portée par la foi d’un vestiaire jeune, mais à bout de souffle.

Le mot-clé du jour, c’est remplacer.

Et pour remplacer, St-Louis doit ramener Arber Xhekaj, un joueur qu’il avait lui-même sorti de la formation pour des raisons évidentes : trop de revirements, trop de risques, trop d’erreurs.

Le coach ne le nomme pas, mais tout le monde sait de qui il parle.

« Il faut que tu sois capable de continuer. »

Ça s’adresse à tout le monde, oui.

Mais ça vise quelqu’un en particulier.

Un défenseur qui a déjà perdu la confiance du coach, et qui se bat maintenant pour sauver sa place ... voire sa carrière à Montréal.

Deux coups durs en une seule décision

La blessure de Kaiden Guhle, c’est la tuile de trop.

Mais ce qui fait encore plus mal à St-Louis, c’est le remplaçant.

Dans son monde à lui, un joueur absent, c’est un test collectif.

Mais dans celui des partisans, c’est une perte nette : tu perds un de tes meilleurs jeunes défenseurs… et tu ramènes le plus imprévisible.

Un double désavantage.

Un pari dangereux.

Martin le sait. Il le sent.

Mais il reste fidèle à son discours :

« C’est une ligue compétitive. Comme jeune, tu dois gagner ton poste. »

Et si Xhekaj veut regagner le sien, il devra le faire à la dure.

Pas de zone de confort, pas d’indulgence.

Chaque présence sera jugée comme un test de confiance.

À l’opposé du chaos, Jaden Struble et Lane Hutson représentent la stabilité silencieuse.

Ceux qui ne font pas de vagues, mais qui inspirent la confiance.

St-Louis a confirmé que Struble remplacerait Guhle à la gauche d’Hutson :

« C’est pas nouveau pour moi de jouer avec Lane, . On se comprend bien. Il parle peu, mais on se lit bien sur la glace. » a expliqué Struble

Des propos simples, mais rassurants.

Et surtout, un contraste frappant avec le mystère Xhekaj : un duo fluide, calme, moderne.

Le genre de hockey qui colle parfaitement à la philosophie de St-Louis : vitesse, lecture, instinct, relance.

C’est là qu’on comprend mieux ce qui se trame.

Le “on continue” n’était pas une réponse à la question.

C’était une façon de masquer la réalité : il sait qu’il avance avec une pièce manquante.

Le Shérif n’a jamais eu peur de la bagarre.

Mais cette fois, il se bat contre le jeu lui-même.

Trop lourd pour suivre les transitions rapides.

Trop hésitant pour exécuter la première passe.

Et souvent à genoux ... littéralement ... dans des séquences où tout le monde, même les partisans, soupire avant la reprise du jeu.

Les chiffres ne mentent pas : il a coûté deux buts directs lors de son dernier match.

Mais plus inquiétant encore, il a coûté la confiance de son coach.

Et dans la hiérarchie de St-Louis, ça, c’est une blessure qui ne guérit pas vite.

« La ligue ne s’arrête pas pour toi, a-t-il ajouté. Il faut continuer, avancer, peu importe qui tombe. »

Ce matin-là, on aurait dit que St-Louis parlait autant à ses joueurs qu’à lui-même.

Quand tu regardes son visage, tu le sens : Martin St-Louis en a assez.

Pas des journalistes, pas des partisans ... mais de la situation d’Arber Xhekaj.

De cette situation qui revient sans cesse, comme une vieille cassette qu’il pensait avoir effacée.

Il en a marre de devoir défendre un joueur qu’il n’a jamais vraiment voulu dans son système.

Marre de répéter qu’il faut « continuer » alors qu’en dedans, il sait très bien que c’est une impasse.

Parce qu’à chaque fois qu’il réinsère Xhekaj dans l’alignement, il le fait à contrecœur.

Il sait que le jeu va ralentir, que les relances vont mourir dans le fond de la zone, que le risque d’erreur est toujours là.

Mais il n’a pas le choix.

Les blessures l’obligent à rouvrir un dossier qu’il aurait préféré classer pour de bon.

Et dans ses yeux, ce matin-là, il y avait ce mélange de résignation et de frustration qu’on voit chez les entraîneurs quand ils sentent qu’ils perdent le contrôle de leur tableau.

Sa réponse n’est pas une déclaration de guerre, c’est une défense automatique.

On continue, parce qu’il ne peut pas dire on coule.

Et c’est ce qui rend la situation si humaine, si fragile.

Martin St-Louis, le coach philosophe, l’homme des grandes phrases inspirantes, s’est transformé en capitaine de navire pris dans la tempête.

Et devant lui, Arber Xhekaj, ce n’est pas juste un joueur.

C’est un symbole.

Le symbole d’un choix entre le passé et l’avenir du Canadien.

Ce soir, quand Xhekaj sautera sur la glace, ce ne sera pas une rotation.

Ce sera un test. Un test pour lui, mais aussi pour Martin St-Louis.

Parce qu’à force de dire on continue, il devra finir par montrer avec qui il veut continuer.

Et dans cette phrase répétée comme une prière, il y a peut-être un aveu : le coach a cessé d’espérer que tout le monde suivra la route.

Certains tomberont.

Et lui, il ne s’arrêtera pas pour les relever.

Sous la surface, ce n’est pas juste une histoire de profondeur ou de blessures.

C’est une histoire d’évolution.

D’un entraîneur qui sait que le hockey change, que la vitesse et la tête prennent le pas sur la force brute.

Et que s’il veut mener le Canadien jusqu’au bout, il devra faire des choix cruels.

« Il faut que tu sois capable de continuer. »

Cette fois, la phrase ne sonnait plus comme un ordre.

Plutôt comme un adieu voilé.

Ouch...