Maxim Lapierre s'en prend à Martin St-Louis de manière cinglante, comme s'il venait de lui asséner un uppercut au menton.
Lappy sait exactement ce que c’est que vivre dans les tranchées de la Ligue nationale. Hier soir sur les ondes de TVA Sports, l'ancienne peste n’a pas simplement analysé un match du Canadien : il a attaqué sans pitié la philosophie défensive de Martin St-Louis, exposant séquence après séquence ce qu’il considère comme un système man-to-man chaotique, pourri, inefficace et, surtout, incapable de protéger les gardiens de but déjà fragiles du Canadien.
Si Martin St-Louis écoute cette vidéo, il va vouloir rencontrer Lapierre dans le parking pour s'expliquer:
Selon Lappy, ce n’est plus une question de talent individuel ou de blessures ; c’est une question de structure fondamentale qui étouffe les joueurs et met l’organisation en péril.
Lapierre a commencé son analyse en analysant une séquence précise, celle qu’il a qualifiée comme la démonstration parfaite que ce système n’aide personne.
« Je vais vous montrer une séquence qui prouve que le système de jeu, aussi, à un moment donné, peut protéger le gardien de but. »
Dès la mise au jeu, explique-t-il, tout part de travers.
« Evans perd la mise en jeu. Il y a deux joueurs qui sont sur le défenseur. Regardez Slaf et Demidov, ils s’en vont où? Il n’y a aucun bloc. »
C’est à ce moment que, selon lui, tout bascule dans l’"anarchie tactique de Martin St-Louis :
« Ça va faire, le système man-on-man. On n’est pas capable de sortir de la rondelle. On a cinq gars du même côté de la patinoire. »
Pour Lapierre, ce n’est pas seulement une erreur d’exécution, c’est l’essence même du problème : un système qui force les joueurs à courir, à réagir individuellement plutôt qu’à défendre collectivement, qui use physiquement les défenseurs et les attaquants jusqu’à ce qu’ils deviennent incapables d’offrir des minutes de qualité.
« Regardez les gars courir. Le nombre d’énergie qu’on peut brûler, c’est inacceptable. À un moment donné, ça prend un système de jeu qui protège tes gardiens, mais ton organisation aussi. »
Il insiste : ce n’est pas une séquence isolée, c’est une tendance.
« On n’a pas de momentum. On n’est pas capable de retrouver les rondelles libres. On n’est pas capable d’être en bonne position. »
Et pendant ce chaos, ce sont les mauvais joueurs, dans les mauvais rôles, qui se retrouvent exposés :
« Là, tu as ton jeune de 19 ans, Demidov, qui se bat un contre un dans le coin. »
Quelques secondes plus tard, la conséquence :
« On a quatre joueurs du Canadien dans le coin qui font rien. Et puis, c’est-tu pas beau ça? Une chance de marquer dans la Ligue nationale de hockey, comme dans une pratique s’il n’y avait personne sur la patinoire. »
Lapierre conclut son attaque avec un jugement qui frappe au cœur de l’identité de l’équipe :
« À un moment donné, les entraîneurs aussi doivent avoir un système pour protéger l’organisation. »
Pour lui, Martin St-Louis a imposé un système qui détruit son vestiaire. Dès que la fatigue, les blessures et la réalité d’une saison longue s’installent, ce modèle s’écroule et entraîne tout le reste avec lui : la production offensive, les jambes, la confiance, la qualité du jeu en zone défensive, et surtout, la stabilité devant le filet.
Si Lapierre a frappé fort, il n’a pas été seul dans la discussion.
Alexandre Carrier a tenu à répondre, sans confronter directement Lapierre, mais en défendant son coach.
Il reconnaît les problèmes, mais insiste sur le rôle central de l’exécution et de la constance.
« Ce qu’il faut dire là-dessus, c’est que le système man-on-man, ça marchait en début de saison. On avait tout notre effectif. Les joueurs n’étaient pas blessés, les joueurs sont en pleine santé. »
Pour Carrier, ce n’est pas le système en soi qui est fautif, mais le contexte dans lequel il est appliqué. Il note que ce modèle demande une condition physique élite, de la précision et une implication irréprochable de tous les joueurs.
Sans ça, tout s'effondre.
« Quand il y a un joueur qui ne sait pas où aller sur la glace, là, tout le monde se regarde et dit : qu’est-ce qu’on fait? »
Ouch. En voulant défendre St-Louis, Carrier... donne raison à Lapierre...
« Tu ne protèges pas personne lorsque tu arrives dans une situation comme en ce moment. Il y a des blessés, les gars sont fatigués. »
Donc, Carrier avoue... la faute de son coach...sans le vouloir..
Et c’est là que le point de Lapierre devient impossible à ignorer : un système efficace uniquement quand tout va bien est-il vraiment un système durable?
Carrier lui-même admet qu’une approche plus passive pourrait être nécessaire :
« Un système de zone où, des fois, juste d’attendre pour protéger ton territoire, tu sauves tes jambes, tu sauves ton mental un petit peu. »
La discussion prend un sens encore plus mordant lorsqu’on la replace dans le contexte de la crise actuelle des gardiens à Montréal.
Les buts faciles accordés, les séquences où Montembeault est abandonné à lui-même, les minutes exténuantes de Matheson, Dobson constamment en poursuite, et des jeunes comme Slafkovsky et Demidov exposés à des responsabilités défensives qui ne correspondent pas à leur profil, tout ça n’est plus seulement une question d’exécution individuelle. Lapierre y voit un problème de structure, un design stratégique qui brise les joueurs et les résultats.
Le plus frustrant, c’est que Montréal n’a jamais eu autant de talent offensif pur depuis une décennie, mais ce système défensif basé sur la poursuite individuelle transforme chaque présence en combat d’endurance.
Et quand ton équipe repose déjà sur un gardien fragilisé mentalement, un autre inexpérimenté, et une défensive remplie de jeunes, c’est un cocktail explosif.
Ce soir-là, malgré la victoire contre Toronto, Lapierre n’a pas voulu adoucir son ton. Il n’a pas modéré ses propos sous prétexte que l’équipe avait marqué des buts, qu’elle avait gagné ou que certains joueurs avaient bien performé contre l'une des pires équipes de la LNH.
Il a regardé la caméra et répété ce qui, pour lui, est maintenant l’éléphant au milieu de la pièce : ce système ne peut pas fonctionner à long terme.
Et le plus troublant dans tout ça? Ce qu’il a dit hier n’est que le miroir brutal d’une réalité que les partisans observent déjà depuis des semaines : cette équipe n’a pas un problème de finition, elle a un problème de structure.
Et tant que ce n’est pas réglé, St-Louis va continuer à manger des volées de Lappy.
