Mises en échec et suspension: bienvenue à Montréal Samuel Blais

Mises en échec et suspension: bienvenue à Montréal Samuel Blais

Par Marc-André Dubois le 2025-07-01

Jeff Gorton avait promis du changement.

Mais il n’avait jamais promis d’être gentil. Et c’est exactement ce que vient de prouver le vice-président du Canadien de Montréal en signant Samuel Blais à un contrat d’un an, d’une valeur de 775 000 $ garantis.

Le fameux Samuel Blais qui avait été suspendu pour un coup à la tête de Devon Toews:

Son fait d’armes le plus célèbre? Une mise en échec d’anthologie contre David Backes lors de la finale de la Coupe Stanley, il y a six ans.

Un coup brutal, mais parfaitement légal, qui a projeté Backes dans une autre dimension. Les images avaient fait le tour du monde. Blais y avait gagné sa réputation : celle d’un joueur « sale », vicieux, borderline. Et il l’a assumée.

On se rappelle aussi de la fois qu'il a ramassé Milan Lucic comme jamais:

Une transaction anodine pour certains. Mais pour ceux qui suivent de près les tensions entre l’état-major du CH et les médias nationalistes québécois, ce geste est tout sauf banal.

C’est un bonbon. Un bonbon lancé avec un sourire en coin par Gorton, visiblement exaspéré par le climat médiatique toxique qui entoure tout ce qui touche aux joueurs québécois. Un bonbon sucré à l’extérieur, mais dont le cœur est empoisonné.

Car il faut se souvenir de ce qui s’est passé ces dernières semaines.

Tout a commencé avec Justin Carboneau. Ce jeune espoir québécois, élevé au rang de symbole identitaire par certains journalistes, était vu comme un incontournable pour le Canadien au repêchage 2025.

Les émissions de radio, les segments télé, les articles d’opinion : tous criaient à l’unisson que « c’était l’année de Carboneau ». Il fallait qu’un Québécois soit repêché. Il fallait que le CH réponde à l’appel de sa base.

Mais Gorton n’a jamais aimé qu’on lui dicte ses choix.

Non seulement il a ignoré la pression populaire, mais il a aussi posé un geste spectaculaire pour prouver son indépendance : il est allé chercher Noah Dobson contre ses choix 16 et 17, un défenseur étoile originaire des Maritimes, plutôt que de succomber à l’hystérie médiatique québécoise.

Puis, dans un surprenant revirement de situation, il est revenu par la porte d’en arrière… en mettant la main sur Zachary Bolduc dans la transaction impliquant Logan Mailloux.

Un Québécois, oui, mais un vrai de vrai. Un gars intense, talentueux, avec du chien. Pas un coup de pub. Un joueur de caractère qui peut jouer avec Ivan Demidov et lui créer de l’espace avec sa robustesse et son QI hockey.

Un Québécois, donc… mais un Québécois choisi par Gorton. Pas imposé par les micros du 98.5 ou les manchettes de TVA Sports.

Et voilà maintenant que débarque Samuel Blais. Le bonbon parfait pour calmer les chroniqueurs en manque d’authenticité québécoise.

Samuel Blais, c’est un champion de la Coupe Stanley. C’est vrai.

Mais c’est aussi un joueur qui n’a jamais disputé une saison complète dans la LNH. Un joueur rejeté l’an dernier par les Canucks de Vancouver.

Un sixième choix de ronde en 2014, qui, malgré quelques flashs de brillance, est devenu un plombier. Un joueur d’énergie. Un bagarreur occasionnel. Un gars qui frappe, qui salit ses gants… et parfois même le nom de son équipe.

Ce n’est pas un joueur qui fera 40 points. Ce n’est pas un modèle de constance. Mais c’est un gars qui donne des coups, qui en prend, et qui ne recule devant personne.

Et c’est précisément ce que Gorton voulait envoyer comme message.

Il faut se souvenir que Jeff Gorton a longtemps toléré les critiques sur le manque de joueurs québécois dans l’alignement. Mais cette année, il en avait visiblement assez.

Avec la montée des Demidov, Dobson, Reinbacher, Hutson, Slafkovský, et compagnie, Gorton savait que le noyau de son équipe n’aurait rien de québécois, à part Samuel Montembeault.

Talentueux, mais pas très local.

Alors il a décidé de jouer la carte du cynisme. D’ajouter un peu de sucre à son café noir. D’envoyer un cadeau aux commentateurs fatigués d’écrire les mêmes papiers sur l’absence de Québécois au Centre Bell.

Samuel Blais, c’est ce cadeau-là.

Un gars qui vient d’ici. Un gars qui parle français. Un gars qui joue physique. Un gars qui peut remplacer Joel Armia sur la quatrième ligne, et faire la navette entre Laval et Montréal.

Un gars que les médias québécois vont adorer défendre… mais qui, dans les faits, ne changera rien à la trajectoire de l’équipe.

C’est là tout le génie et la mesquinerie du geste de Gorton.

Rappelons les faits : Samuel Blais n’a jamais marqué plus de 9 buts dans une saison. Il est maintenant âgé de 28 ans, et sa carrière dans la LNH repose sur un mélange de timing, de coups d’épaules, et de réputation forgée dans les séries.

C’est un joueur de profondeur. Un « bon soldat », comme dirait Martin St-Louis. Mais ce n’est ni un game changer, ni un pilier. Et encore moins un joueur sur lequel on peut bâtir à long terme.

Et pourtant, son arrivée sera célébrée comme un triomphe par ceux qui crient depuis des mois que « le Canadien oublie ses racines ».

Ironiquement, ce sont les mêmes qui oublient qu’il avait été suspendu pour coup à la tête. Les mêmes qui ferment les yeux sur ses pénalités coûteuses, ses matchs ratés, ses séjours prolongés à l’infirmerie.

Car Blais, c’est tout ça aussi. Un joueur qui peut électriser un match avec un gros hit… mais qui peut aussi compromettre un match avec un mauvais geste.

Mais Gorton le savait. Et c’est pour ça qu’il l’a signé.

Pour remplacer Armia… et pour déstabiliser

Blais, au moins, ne se traînera pas les patins comme le Finlandais. Il va frapper. Il va déranger. Il va donner une raison aux partisans d’ovationner la quatrième ligne.

Mais ne vous méprenez pas. Il n’est pas là pour être un héros.

Il est là pour faire diversion. Pour permettre à Gorton de dire, en conférence de presse, qu’il écoute. Qu’il comprend. Qu’il agit.

Il est là pour satisfaire les médias québécois, tout en leur rappelant qui est le patron.

Et dans ce jeu d’échecs que Gorton mène depuis deux ans, chaque pion a son utilité. Samuel Blais en est un. Utilisé à la perfection.

La signature de Samuel Blais ne changera rien à la hiérarchie du Canadien. Mais elle changera peut-être le ton dans certains studios de radio et salles de rédaction.

Car avec Blais, le CH donne l’illusion de renouer avec ses racines.

Mais ce n’est qu’une illusion.

Et pendant que les projecteurs seront braqués sur Blais, c’est Zachary Bolduc qui s’imposera comme le véritable visage québécois de la nouvelle ère.

Un joueur talentueux, intense, intelligent, parfait pour évoluer avec Ivan Demidov. Un gars capable de monter dans le top 6 ou d’assurer la profondeur au besoin. Un Québécois choisi pour ses compétences, pas pour son passeport.

Jeff Gorton n’a pas cédé. Il a simplement joué avec les perceptions.

Et à ce petit jeu-là, il vient de remporter une autre manche.

Samuel Blais, bienvenue à Montréal.

Tu n’es pas un sauveur. Tu es un symbole. Et dans ce club, c’est parfois plus important.