Négociations Montréal-Boston: Martin St-Louis perd patience

Négociations Montréal-Boston: Martin St-Louis perd patience

Par David Garel le 2025-09-12

Martin St-Louis n'a jamais aimé les rumeurs de transactions. Mais la dernière lui lève le coeur.

Celle qui relie Jayden Struble aux Bruins de Boston rend le coach inconfortable. Elle l'énerve, elle le crispe, elle le dérange au plus haut point.

Parce qu’au-delà du manège habituel des appels exploratoires, des « on écoute » et des « rien d’imminent », cette rumeur-là vient percuter un point névralgique de la vision de l’entraîneur-chef : Struble est l’un de ses favoris. Et plus l’écho « Bruins » enfle, plus on devine l’agacement derrière les portes closes du Centre Bell.

Pourquoi cette rumeur n’est pas comme les autres

D’abord parce qu’elle touche un joueur que St-Louis préfère, sportivement et culturellement, à Arber Xhekaj. Pour Marty, entre deux profils robustes, fiables, « bon soldat », le no 6 passe devant le « Shérif**». Et ce n’est pas nouveau.

Ensuite parce qu’elle renvoie Struble à Boston, là où toute son histoire semblait naturellement converger. Né à Cumberland, dans le Rhode Island, Jayden Struble a grandi à une heure et demie de Boston et a ensuite joué tout près du cœur des Bruins : d’abord à St. Sebastian’s (Needham, Massachusetts) au prep school, puis à Northeastern University à Boston.

Autrement dit, il a été dans la vitrine bostonienne toute sa jeunesse; les dépisteurs des Bruins l’ont vu souvent, ils connaissent son profil par cœur.

C’est précisément ce passé collé à l’écosystème Bruins qui explique pourquoi Boston le suit depuis longtemps et pourquoi son nom revient naturellement dans les rumeurs. Au terme de son parcours universitaire, tout le monde pensait qu’il signerait chez les Bruins, alors qu'il avait le luxe de choisir l'équipe de son choix même si c'est le CH qui l'avait sélectionné.

Le fait qu’il ait choisi de rester fidèle à Montréal malgré la congestion à gauche avait été salué comme un acte de foi (et de courage). Il a fait sa place contre toute logique d’effectif. Ça, Marty ne l’oublie pas.

Enfin parce que la rumeur Struble-Bruins ne flotte pas seule. Elle s’inscrit dans un paquet de scénarios brassés cet été : Zacha à Boston, listes de noms où circulent Joshua Roy, Oliver Kapanen, Owen Beck évoqué à certains moments, et même Kirby Dach sondé par les Bruins (avec toute la prudence d’un CH qui veut d’abord voir comment il réagit au camp et au début de saison).

Mais à travers tout cette tempête, le nom qui a claqué le plus fort dans le vestiaire, c’est Struble. Parce que ce n’était pas censé être lui.

On voit tout de suite un désaccord entre Martin St-Louis et le tandem Kent Hughes / Jeff Gorton.

Marty veut garder Struble. Il aime son sérieux, son hockey sobre, son utilité immédiate. Dans sa matrice d’entraîneur, c’est le profil « plug-and-play » qui te sécurise une troisième paire et que tu peux monter d’un cran quand ça brasse.

Hughes/Gorton, eux, gèrent une carte des actifs. Et dans cette carte, l’effet de marché est sans pitié : si tu as deux profils voisins, tu gardes celui qui vend et qui met le building debout… ou celui qui a une valeur d’échange plafond.

C’est là que Xhekaj, que Martin "truste" moins sur la glace, pèse lourd autrement : marketing, popularité, “box-office”.

Le résultat crée des flammèches : Struble devient l’option sacrifiable, parce qu’il a un contrat parfait à bouger (2 ans, 1,41 M$ AAV), parce qu’il est respecté, parce qu’il rentre dans le Top 6 d’un aspirant sans friction… et parce qu'un nouveau défenseur de premier plan pousse à gauche.

Un nom qui change tout : Adam Engström.

Engström est NHL-ready. Coup de patin, relance, lecture, sang-froid, tout est là. Dans le couloir gauche du CH, on compte :

Lane Hutson

Kaiden Guhle

Mike Matheson

Jayden Struble

Adam Engström

Arber Xhekaj

Trop de monde, pas assez de chaises. Et si Engström cogne vraiment fort à la porte, ce que tout le monde en interne anticipe, la pression n’écrase pas Xhekaj (qui a sa niche populaire) ni Hutson/Guhle (noyau). Elle écrase Struble. C’est froid, mais logique.

Pas pour Martin St-Louis qui s'inquiète de plus en plus de ces rumeurs Montréal-Boston.

Car ces rumeurs paraissent « plus vraies » : sur papier, Boston a un appétit historique pour Struble. Si Don Sweeney veut solidifier son troisième duo et « grossir » la défense, Struble "fitte" tout de suite.

Le plus grand problème de St-Louis est que le CH ne veut pas échanger Arber Xhekaj. Surtout que son frère Florian est aux portes de la LNH. 

Ce n’est pas qu’on le préfère sur la glace au quotidien. Marty l’a souvent tenu en laisse. On connaît les tensions entre les deux hommes,

La gestion du surnom « Shérif », l’épisode des pubs pour ses burgers et la ligne dure demandant de rester « une vedette sur la glace, pas hors-glace ».

Mais la réalité d’affaires a son mot à dire : Xhekaj est une marque. Il remplit le building, il déclenche des réactions, il fait vendre. Et ça, dans un casse-tête d’actifs, ça vaut presque autant qu’un +/-.

Ajoute à cela l’ombre d’Owen Protz qui monte dans la hiérarchie des espoirs, un profil "shutdown" physique, discipliné, « monopole de la violence » selon un portrait que tu as cité et tu comprends la séquence qui trotte dans la tête de la direction :

Engström prend la chaise "hockey utile"… Protz prépare à moyen terme la chaise physique… et Xhekaj garde, à défaut d’un temps de glace garanti, une valeur stratégique (marché/identité) plus forte que Struble.

Dans cet échiquier, s’il faut sacrifier un gaucher, la terminaison de contrat, la valeur immédiate, la tolérance du coach et la liquidité d’échange... tout pointe vers Struble.

Pourquoi ça met St-Louis dans une colère noire?

Parce que pour un coach, il n’y a rien de pire que d’entendre :

« On a deux gars que tu utilises, qui te donnent un plancher de qualité… et on va enlever celui que tu préfères. »

St-Louis aime Struble pour trois raisons :

Le “do-or-die mindset”. Struble l’a dit lui-même (TSN 690) : quand t’es le premier à sortir de l’alignement, chaque présence est « do-or-die ». C’est exactement le profil mental que Marty valorise.

La gestion de risque. Struble ne te coûte pas un match par indiscipline réflexe. Il est robuste sans mettre ses coéquipiers dans le trouble.

La compatibilité système. Il joue dans la structure, il n’improvise pas son identité à chaque présence. Pour un staff qui martèle « processus », c’est de l’or.

À l’inverse, Xhekaj est un déclencheur émotionnel, parfois lumineux, parfois coûteux, et Marty déteste gérer des incendies qu’il n’a pas allumés.

D’où son agacement lorsque le débat public renverse l’ordre : garder Xhekaj pour l’image, tasser Struble pour le cap space manœuvrable et la monnaie d’échange. Sur le plan terrain, ça le heurte.

Là où la rumeur prend sa charge émotionnelle maximale, c’est quand Pavel Zacha devient l’aimant qui attire le nom Struble dans les conversations.

Tu as posé le cadre : Montréal a appelé pour Zacha. Les Flames et d’autres équipes sont aussi là. Un deal Habs-Bruins impliquerait d’autres pièces (choix, espoirs).

Et, point crucial dans la dynamique interne, Struble n’est pas intouchable si Engström ou Reinbacher gagnent un poste au camp.

Struble entend son nom sortir avant que la hiérarchie n’ait publiquement tranché au camp. Et ça, pour un joueur qui a choisi le CH contre la voie facile Bruins à la sortie de la NCAA, c’est un uppercut. Tu l’as écrit : sonné. Touché en plein cœur.

Pour Marty, son coeur est déchiré : Zacha répond au besoin du deuxième centre tout de suite; Struble te donne un plancher sûr en bas de l’échelle défensive tout de suite. Le coach voudrait ajouter le centre sans enlever le soldat. Ou en donnant Xhekaj.

La direction raisonne plutpit avec le coût d’opportunité : « il faut bien payer quelque part ». Et comme Xhekaj te fait vendre des chandails... le coeur de St-Louis sera brisé...

Quand tout le monde pensait que Struble signerait à Boston et qu’il a choisi Montréal malgré la congestion, il a investi une part de lui-même dans cette salle. Il a prouvé qu’il voulait gagner sa place ici.

Se voir repoussé vers les Bruins par la rumeur, c’est comme si on lui disait : « Tu as eu raison de croire en toi… mais pas assez pour que ça nous retienne au moment de payer un centre. »

Ça cogne l’ego. Ça refroidit les liens. Et c’est exactement le genre de choses que Marty veut éviter quand il parle de culture.

Reste que si la rumeur s’éternise, Marty va finir par monter le ton en interne.Il sait qu’il ne commande pas la salle des transactions, mais il déteste l’idée que sa chambre soit dérangée.

S'il entend une autre fois « Struble dans un package pour Zacha, on réévalue à l’Action de grâce », ce n’est pas un hasard. Et si on voit Marty serrer la mâchoire en conférence de presse, ce n’est pas un hasard non plus.

Struble est son homme... Xhekaj est celui qu'il veut voir partir...