Buffalo rêvait d’un automne tranquille pour enfin mettre fin à la plus longue disette de séries de la LNH.
Au lieu de ça, la malchance a remis le couvercle: Ukko-Pekka Luukkonen est évalué sur une base hebdomadaire après s’être blessé contre Pittsburgh en pré-saison, et Michael Kesselring (défenseur de 2e paire), pièce centrale payée au prix fort après le départ de J.J. Peterka, est lui aussi à l’arrêt semaine par semaine.
Deux coups durs, d’un seul trait, qui réactivent une question que la ville refuse d’affronter depuis trop longtemps: où s’en va ce projet?
Pendant que Lindy Ruff tente de colmater les brèches, une autre onde de choc circule dans les coulisses: Tage Thompson.
Le géant de 6’7’’ n’aime pas être baladé à l’aile; dans sa tête et dans son ADN, c’est un centre, point. Et quand les défaites s’empilent, que les blessures se multiplient et que les décisions de personnel sont contestées (on parle encore du coût “lunaire” pour Kesselring), les rumeurs autour de Thompson repartent de plus belle.
Oui, Montréal a déjà "kické" les pneus sur ce dossier. Oui, Buffalo a déjà fait comprendre que le prix commencerait par Juraj Slafkovský. Et oui, si les Sabres replongent au classement, ce baril de poudre peut s’enflammer.
Le plan était simple: verrouiller le filet avec Luukkonen, solidifier la deuxième paire avec Kesselring, puis laisser l’attaque, menée par Thompson, Norris, Tuch et compagnie dicter le tempo.
Le plan a duré… une poignée de matchs préparatoires. Sans son gardien partant au quotidien et sans le défenseur destiné au top-4, Buffalo revient au même dilemme cyclique: sur-utiliser ses piliers, bricoler des duos, espérer que les jeunes comblent tout de suite des trous de vétérans.
Dans ce décor, Tage Thompson devient plus que jamais l’axe stratégique. Quand il est au centre, Buffalo a une colonne vertébrale imposante; quand on le glisse à l’aile pour marquer plus de buts, tout l’équilibre se dérègle.
Et c’est précisément ce qui nourrit l’irritation du camp du joueur et le bruit ambiant sur un éventuel changement d’air si l’organisation ne se stabilise pas.
Pourquoi Thompson, c’est le profil parfait pour Montréal
Côté Canadien, le dossier saute aux yeux: Thompson coche toutes les cases du 2C “franchise” que le CH cherche depuis des mois pour respirer derrière Nick Suzuki.
Taille/portée: à 6’7’’, il gagne des pucks 50/50 à tous les coups.
Menace bi-directionnelle: assez mobile et long de bâton pour survivre aux missions défensives, assez d’instinct pour finir les séquences.
Fenêtre contractuelle: un deal long, prévisible, qui s’aligne avec la fenêtre 2026 du CH et le développement de Demidov, Hutson et Guhle.
Le hic? C’est un joueur “noyau”. Buffalo ne bougera pas Thompson à rabais. L’an dernier déjà, le bruit courait que les Sabres exigeaient Slafkovský comme base de transaction, un “non catégorique” côté Montréal.
Mais si les Sabres s’enfoncent, si la pression locale grimpe, si Gavin McKenna devient la carotte ultime de la prochaine loterie, le front office pourrait être tenté de réallouer des actifs et de réécrire sa hiérarchie rapidement.
Pourquoi l’ambiance peut tourner au vinaigre à Buffalo?
Car les Sabres ont déjà avalé plusieurs pilules amères: une éternité sans séries, des cycles de “retool” mal ficelés, des paris qui vieillissent mal.
L’échange lourd pour Kesselring, immédiatement suivi d’une blessure, devient symbole (injuste ou pas) d’une gouvernance qui manque de timing. Ajoute le pépin de Luukkonen, et tu obtiens un marché nerveux, susceptible, où chaque contre-performance amplifie les rumeurs.
Et dans cette atmosphère, Thompson cristallise le débat identitaire: si tu peux obtenir une rançon d’État pour un joueur élite maintenant, est-ce que tu sacrifies le court terme pour une relance plus profonde?
Ou tu doubles la mise, tu tiens ton monde, et tu pries pour que la santé te redonne ce que le hasard t’a enlevé?
Tout le monde dans la LNH a lu la même chose entre les lignes: la cuvée McKenna met des DG nerveux. Si les Sabres dérapent et glissent dans la zone où la loterie devient mathématiquement intéressante, la tentation de monétiser des pièces premium va grimper.
C’est là que des clubs comme Montréal (qui empilent des actifs mais veulent cibler un 2C) deviennent dangereux.
Le CH a déjà regardé ailleurs: Pavel Zacha (Boston), Ryan O’Reilly (Nashville) selon les scénarios discutés tout l’été. Mais Thompson, c’est un cran au-dessus en terme d’âge/prime/impact.
Montréal sait aussi que son bassin d'espoirs est congestionné: à un moment, il faut transformer des espoirs “B+” en pièce A immédiate. Et c’est précisément pour ça que les noms de Beck, Kapanen, Roy, Struble reviennent en boucle parce qu’ils représentent des valeurs d’échange sans toucher au cœur de la future vitrine.
Mais ces jeunes espoirs B valent des peanuts... par rapport à Thompson...
Et Kent Hughes ne donnera jamais Michael Hage ou David Reinbacher... à moins qu'il change d'idée tellement il est en amour avec le géant des Sabres.
C'est là où les choix de 1ère ronde 2026 et 2027 deviennent des actifs pour une transaction... surtout si Buffalo vise McKenna.
Émotionnellement, pour Buffalo, c’est une déchirure. On ne se lève pas un matin en décidant d’échanger son geant stud. Mais si les blessures durent, si les défaites se succèdent, si le vestiaire sent l’orage, tenir peut devenir plus destructeur que rebâtir intelligemment.
Ce qui fera la différence
La santé (UPL/Kesselring): si ça revient vite, la pression redescend.
L’axe de Thompson: centre stable ou nouveau yo-yo à l’aile? Sa patience a des limites.
Le marché: si un club rival pousse une offre “all-in”, Buffalo devra trancher.
La loterie: à mesure que McKenna hante les têtes, l’appétit pour des picks grimpe.
Les Sabres sont à la croisée des chemins dès octobre. Si la spirale se confirme, Tage Thompson deviendra l’énorme dossier ligue-wide, et Montréal sera là, dossier prêt, à l’affût du moment où Buffalo décidera enfin ce qu’il veut être.
À suivre...