À Long Island, on respire l’instabilité comme ailleurs on respire l’air du matin.
Et au cœur de ce climat lourd, deux noms reviennent en boucle : Patrick Roy et Anthony Duclair.
Deux caractères, deux destins liés, deux volcans qui explosent dès qu’on les rapproche trop.
Et depuis avril dernier, ce feuilleton n’a jamais cessé d’alimenter la chronique.
On croyait que la tempête s’était calmée.
Que le temps avait fait son œuvre.
Mais la réalité est tout autre.
Le fameux soir du 1er avril 2025, Roy avait frappé un grand coup en conférence de presse, détruisant littéralement son joueur devant tout le monde.
« Il était vraiment mauvais, vraiment mauvais. Il était chanceux d’être dans la formation », avait lancé l’entraîneur, incapable de contenir sa rage après une défaite humiliante contre le Lightning.
Des propos durs, crus, qui avaient transformé une simple contre-performance en drame public.
Pour Duclair, ce n’était pas seulement une critique. C’était une gifle, un rejet, une remise en question de sa place même dans la ligue.
Le Québécois avait encaissé le coup, mais en coulisses, les fissures étaient béantes.
Officiellement, il avait quitté l’équipe pour des « raisons personnelles ».
Officieusement, tout le monde savait que le lien de confiance était brisé.
Patrick Roy a beau avoir reconnu, quelques semaines plus tard, qu’il avait dépassé les bornes, le mal était fait. « Je vais le rencontrer en personne, pas au téléphone.
Je vais m’excuser », avait-il dit, la voix tremblante, comme un homme conscient d’avoir brûlé un pont essentiel. Et pourtant, même dans ses excuses, Roy restait Roy.
Le grand comédien tragique du hockey moderne.
Car la question qui tue demeure : pourquoi Duclair et pas les autres?
Pourquoi l’entraîneur des Islanders n’a-t-il pas eu une seule pensée pour Noah Dobson, lui aussi victime de ses colères, exilé à Montréal dans une transaction forcée?
Pourquoi Duclair méritait des excuses alors que Dobson, pourtant pilier de l’équipe, n’a jamais eu droit à la moindre reconnaissance?
Cette différence de traitement fait jaser, et elle alimente l’idée que Roy ne gère pas un vestiaire, il gère des humeurs.
Et c’est là que réside toute la tragédie.
Duclair est un joueur fragile émotionnellement, on le sait depuis longtemps.
Brillant quand il se sent aimé, effacé quand il sent qu’on le rejette.
Avec Roy, il n’a jamais eu de zone grise.
Tantôt cajolé, tantôt humilié.
Une relation bipolaire où chaque match devient un test, chaque erreur une condamnation.
Ce qui choque encore plus, c’est que Duclair n’a jamais été ce franc-tireur paresseux que Roy a décrit.
Oui, il traverse des passages à vide.
Oui, son implication défensive n’est pas toujours exemplaire.
Mais est-ce suffisant pour l’exposer ainsi publiquement, comme un mouton qu’on mène à l’abattoir?
Non. Et surtout pas d’un coach qui prétend prêcher la culture, la responsabilité, l’unité. Parce qu’au lieu de l’unité, Roy a semé la division.
Le drame s’est prolongé durant l’été.
Alors que les Canadiens de Montréal voyaient leurs jeunes vedettes s’entraîner ensemble à Brossard, construire une chimie, forger une fraternité, les Islanders affichaient le néant.
Où est Anthony Duclair? Nulle part.
Invisible. Aucune apparition publique marquante, aucun signe d’un retour au calme.
Les blogs de Long Island s’interrogent : le Québécois a-t-il encore la tête à New York? Ou est-il déjà ailleurs, mentalement?
Le hic, c’est que Duclair n’a pas d’échappatoire immédiat.
Il reste sous contrat, il doit revenir.
Mais quel sera son état d’esprit?
Comment un joueur peut-il patiner librement quand la voix qui dicte ses minutes est aussi celle qui l’a crucifié en direct à la télé?
Pendant ce temps, Roy lui-même ne sort pas grandi de l’affaire.
Lui qui, autrefois, incarnait l’autorité, la passion, l’intimidation, se retrouve à présenter des excuses, à rétro-pédaler, à tempérer ses propos.
Et dans la LNH, rien n’est plus dangereux pour un entraîneur que de perdre sa propre aura.
Quand un coach n’impressionne plus, il n’inspire plus. Quand il s’excuse trop souvent, il ne dirige plus, il justifie.
Et Roy, à Long Island, donne l’image d’un homme qui doute, qui vacille, qui se débat dans ses propres contradictions.
Anthony Duclair est donc devenu bien plus qu’un joueur de troisième ligne en quête de relance.
Il est devenu le symbole d’un malaise. Le miroir des limites de Patrick Roy. Le rappel constant qu’un vestiaire ne se gère pas comme une cour de récréation où l’on punit et l’on pardonne selon l’humeur du moment.
Et ce qui rend tout ça encore plus pathétique, c’est que Roy et Duclair se connaissent depuis longtemps.
Ils ont partagé l’expérience du junior. Roy l’a dirigé dans ses jeunes années, il l’a vu éclore.
C’était censé être une relation privilégiée.
Un coach qui comprend son joueur, un joueur qui fait confiance à son coach.
Au lieu de ça, c’est devenu un duel d’orgueil, une lutte de regards où l’amour d’hier s’est transformé en rancune d’aujourd’hui.
Les chiffres n’aident pas Duclair non plus. Onze points en quarante-quatre matchs.
Pour un gars payé 3,5 millions par année, c’est mince, très mince.
Mais est-ce vraiment surprenant dans un contexte aussi toxique?
Comment livrer sa meilleure version quand ton entraîneur passe son temps à t’enfoncer?
La confiance, dans le sport professionnel, est la clé.
Et Duclair en a été privé.
Aujourd’hui, la question est simple : peut-il rebondir? Peut-il encore trouver sa place à Long Island, sous Roy, dans un vestiaire fracturé?
Ou faut-il accepter que le mariage est déjà brisé, et que la suite ne sera qu’un interminable divorce?
Une chose est sûre : l’histoire n’est pas terminée. Le camp approche, les médias vont s’entasser, et la moindre interaction entre Roy et Duclair sera scrutée comme une scène de télé-réalité.
Chaque sourire, chaque poignée de main, chaque soupir deviendra un indice.
Parce qu’à New York, et surtout avec Patrick Roy, rien n’est jamais banal.
Tout est drame. Tout est spectacle. Tout est fracture.
Et au milieu de tout ça, Anthony Duclair se retrouve pris en otage.
Entre ses propres doutes, les attentes du public, et la colère d’un entraîneur qu’il connaît trop bien.
Une situation intenable. Mais peut-être aussi une chance de rédemption.
Parce que dans ce chaos, Duclair a encore le pouvoir d’imposer sa vérité. En marquant, en travaillant, en se relevant.
Mais pour que ça marche, il faudra que Roy fasse enfin ce qu’il n’a jamais su faire : laisser aller.
Arrêter de détruire pour reconstruire.
Et donner à son joueur le respect dont il a besoin pour performer. Sinon, Long Island restera fidèle à sa réputation : le théâtre d’un éternel drame humain.
Et quand on y pense, ce n’est pas Duclair le problème.
Ce n’est même pas Roy. C’est leur relation. Une fracture qui refuse de guérir.
Misère...