On dit souvent qu’un match d’ouverture donne le ton à une saison.
Pour Patrik Laine, la soirée d’hier à Toronto a été tout sauf un nouveau départ. Ce fut une véritable humiliation. Une soirée qui résume cruellement où en est sa carrière : sur le quatrième trio, utilisé au compte-gouttes, relégué dans les moments clés… avant d’être envoyé en « extra attacker » dans une fin de match perdue d’avance.
Ce n’était pas une mauvaise soirée. C’était une commotion publique.
Muté sur le quatrième trio avec Jake Evans et Josh Anderson, Laine a amorcé la rencontre comme un joueur dont l’entraîneur ne sait plus quoi faire.
D’entrée de jeu, il a pris une pénalité inutile en zone offensive pour accrochage. Un geste qui résume à lui seul ses errances sans la rondelle et son incapacité à s’impliquer à 5 contre 5.
On l’a très peu revu ensuite en territoire adverse. Martin St-Louis l’a utilisé avec une manière qui frise le mépris : 12 minutes 51 secondes de temps de jeu, aucune présence sur l’avantage numérique, et un rôle quasi invisible dans la structure offensive du Canadien.
Pendant que le premier trio Suzuki-Caufield-Slafkovsky dominait les Leafs 21-8 au chapitre des tirs tentés à égalité numérique, affichant une énergie et une cohésion inspirantes, Laine disparaissait dans la masse, spectateur passif d’un match où Montréal a pourtant contrôlé 28 chances de marquer contre 25 à forces égales.
Le Canadien a joué un vrai match de gros club. Laine, lui, a joué un match de figurant.
Mais c’est en fin de troisième période que la situation a viré au malaise total. Alors que le Canadien tirait de l’arrière 3-2, Martin St-Louis a décidé d’envoyer Laine comme sixième attaquant. Les Maple Leafs marquent...(-1 pour Laine).
Mais au lieu de protéger son vétéran, il l'a réenvoyer sur la glace... encore avec un filet désert...
À 4-2, il restait moins d’une minute à faire. Le banc savait que c’était fini. Le public le savait. Et pourtant, St-Louis a choisi ce moment pour envoyer Laine dans le vide, littéralement, comme sixième patineur.
Son différentiel a chuté à -2 en une minute, sans qu’il ait vraiment été impliqué dans la construction du jeu offensif. Une présence de trop. Un affront public. Comme si Martin St-Louis voulait déjà lui montrer la porte de sortie.
Quand la sirène a retenti après le cinquième but de Toronto, Laine a fracassé son bâton sur la bande en quittant la patinoire. Un geste de frustration pure. Pas seulement contre le déroulement du match, mais contre son rôle humiliant.
Imaginez la scène : un ancien deuxième choix au total, payé 8,7 M$ par saison, autrefois considéré comme l’un des tireurs d’élite de la LNH, réduit à un pion envoyé sur la glace pour « combler un trou » dans une fin de match perdue. Ce n’est pas un détail. C’est une déclaration silencieuse sans aucune pitié.
Ce qui rend cette situation encore plus explosive, c’est que Martin St-Louis tente désespérément de ménager Laine depuis des semaines.
Il inverse l’ordre des répétitions à l’entraînement pour cacher sa rétrogradation. Il choisit ses mots avec une diplomatie forcée en point de presse. Il évite les confrontations frontales avec son joueur, alors que les deux hommes ne s'adressent pratiquement plus la parole.
Mais hier, en le lançant comme sixième attaquant dans un moment inutile, il a franchi une ligne invisible. Ce n’était plus de la protection. C’était une mise en scène humiliante.
Il faut se souvenir : Laine n’a pas joué sur le power play. Il n’a pas été utilisé dans les moments critiques. Il a été sorti du banc quand la partie était perdue. Et ça, dans le monde du hockey professionnel, c’est souvent la dernière étape avant l’exil.
La hiérarchie est claire. Le message aussi. Il n’est plus dans les plans.
Et pourtant, St-Louis refuse de le nommer. Il refuse de dire à haute voix ce que tout le monde comprend. Parce que le DG Kent Hughes a choisi de miser une dernière fois sur Laine cet été, allant même jusqu’à s’asseoir personnellement avec lui pour tenter un « reset » :
« Des fois, ça prend une communication, un reset. Je lui ai parlé de son jeu à 5 contre 5. Je lui ai dit que les attentes n’étaient pas qu’il score 40 buts, mais qu’il montre des améliorations à 5 contre 5. »
Quand un DG doit intervenir personnellement comme ça, c’est que le cas dépasse le cadre sportif. C’est une gestion de crise.
Ce n’est pas un hasard si TVA Sports, Tony Marinaro et Jean-Charles Lajoie ont multiplié les critiques au cours des derniers jours. Lajoie l’a dit crûment : Laine « ne correspond plus du tout à ce qu’on recherche comme identité ».
Marinaro a décortiqué les réponses diplomatiques de St-Louis et en est venu à la même conclusion : le coach n’a pas confiance en lui.
Et dans le vestiaire, ça se sait. Les minutes parlent. Les trios parlent. Les regards parlent.
Laine n’est plus un joueur de premier plan. Il est toléré. Mais jusqu'à quand?
À ce stade, il y a une question que personne n’ose poser publiquement, mais que tout le monde murmure : est-ce que le Canadien aura le courage de soumettre Patrik Laine au ballottage pour l'envoyer à Laval ?
C’est exactement ce qu’ont fait les Penguins de Pittsburgh avec Ryan Graves, un défenseur payé 4,5 M$ pour encore quatre ans.
Quand un contrat devient un poids et que le joueur ne peut plus suivre, certaines organisations tranchent net. Montréal osera-t-elle faire la même chose ?
Parce que laisser Laine végéter sur le quatrième trio, l’envoyer en fin de match pour combler une ligne vide, et le regarder accumuler les frustrations… c’est pire que de le renvoyer à Laval. C’est le condamner à une lente agonie sportive sous les projecteurs montréalais.
Et dans une saison olympique, imaginez l’impact sur sa motivation si on le place dans les gradins ou sur une voie de garage…
Le dossier Laine est devenu une bombe à retardement pour Martin St-Louis et Kent Hughes. L’entraîneur ne veut pas l’humilier… mais finit par le faire malgré lui. Le DG veut le sauver… mais chaque match le condamne un peu plus. Les partisans ont déjà tourné la page.
Hier, à Toronto, cette bombe a fait un premier « boum » public. Pas par une déclaration, mais par une décision : celle de l’envoyer au front dans une fin de match perdue, comme un pion sacrifiable... comme pour gâcher son différentiel et donner une raison au public de l'enfoncer un peu plus.
Laine a cassé son bâton. Et avec lui, peut-être le dernier fil de confiance qui le reliait encore à Montréal.