Pensées pour José Théodore: il ne mérite pas ce traitement

Pensées pour José Théodore: il ne mérite pas ce traitement

Par David Garel le 2024-12-19

Depuis qu’il a rejoint l’équipe de collaborateurs du 98,5 FM, José Théodore s’impose comme une voix incontournable du hockey.

Pertinent, divertissant, et doté d’une aisance naturelle pour communiquer, l’ancien gardien vedette du Canadien de Montréal ne laisse personne indifférent.

Ça fait du bien de le revoir sur la scène publique. Et cela nous rappelle à quel point on l'a oublié au Québec.

« Même avec les anciens du Canadien, à moins que le Canadien ait perdu mon numéro, je n’ai jamais été invité au tournoi de golf de l’équipe. Est-ce que ça me fatigue ? Oui, ça me fatigue un peu. »

L’histoire de José Théodore avec le Canadien de Montréal est digne d’un roman, avec ses moments de gloire éclatante, ses controverses marquantes, et, malheureusement, une fin remplie de tristesse et d’oubli.

Comment un joueur ayant porté le Tricolore sur ses épaules pendant près d’une décennie, remportant des honneurs rares et gravant son nom parmi les grands de l’organisation, a-t-il pu être aussi effacé de la mémoire collective du club? 

Tout le monde se souvient de la saison 2001-2002.

Théodore connaît une année qui marque l’histoire. Il mène le Canadien à lui seul en séries éliminatoires avec des performances héroïques et remporte deux des plus prestigieux trophées de la LNH : le Hart, remis au joueur le plus utile à son équipe, et le Vézina, décerné au meilleur gardien de but.

Il devient l’un des rares joueurs de l’histoire du Canadien à réaliser cet exploit, rejoignant Jacques Plante dans l'histoire.

Cette saison, Théodore est au sommet du monde. Il est le visage du Canadien et l’idole des jeunes Québécois. Sur la glace, il est spectaculaire, arrêtant des rondelles impossibles, et hors glace, il est une véritable rockstar, avec son style flamboyant, ses cheveux longs et sa personnalité charismatique. Montréal est à ses pieds.

Mais avec la gloire viennent aussi les épreuves. Le statut de Théodore comme superstar de la ville attire une attention médiatique constante, et sa vie personnelle devient une source inépuisable de controverses.

En 2006, un scandale éclate : son père et deux de ses oncles sont accusés de blanchiment d’argent. Bien que Théodore ne soit pas impliqué, cette affaire jette une ombre sur sa réputation.

Ajoutez à cela des rumeurs persistantes sur sa vie dans les bars et des distractions hors glace, et l’image publique de Théodore commence à se détériorer.

Tout le monde se souvient des "trois amigos": Théo, Mike Ribeiro et Pierre Dagenais qui étaient accusés de sortir et faire la fête constamment. 

Mais Théo nie encore aujourd'hui qu'il était un "party animal".

« Les gens parlaient de nous comme des “trois amigos” avec Pierre Dagenais et Mike Ribeiro, mais dès qu’on sortait de l’aréna, on ne se fréquentait pratiquement pas. »

Une photo célèbre le montrant en compagnie d’un groupe de motards liés au crime organisé alimente encore plus les spéculations. Même s’il s’agit d’une rencontre innocente, l’image colle à lui et ternit son héritage.

Théodore pointe lui-même les raisons potentielles de cet oubli : son image, et les distractions hors glace qui ont marqué sa carrière.

Une photo controversée avec un groupe de motards, une affaire judiciaire impliquant des membres de sa famille, et des rumeurs persistantes sur sa vie personnelle ont sans doute joué un rôle dans la perception qu’avait l’organisation de lui.

« L’image est extrêmement importante pour le Canadien », explique Théodore.

« Avec toutes les distractions à l’extérieur de la glace survenues au cours de ma carrière, ces histoires autour de moi, hors de mon contrôle, ça fatigue probablement un peu l’organisation. »

Mais est-ce une raison valable pour effacer l’héritage d’un joueur? D’autant plus que d’autres légendes du club, comme Serge Savard, Guy Lafleur et Patrick Roy, ont également été écartées avant de retrouver leur place au sein de la grande famille du Canadien.

« J’ai été le premier à acheter une loge pour les enfants malades, j’étais impliqué pour le club. Mais on m'a oublié. »

Théodore lui-même souligne cette réalité : pour un joueur québécois, réussir avec le Canadien semble paradoxalement être plus difficile.

« Être francophone avec le Canadien, au lieu de détenir un avantage, il faut se battre deux fois plus fort. La réalité, c’est quand même ça. »

« Quand tu es blessé et que tu as des caméras cachées devant chez toi pour s’assurer que tu es vraiment blessé, c’est intense. »

La pression devient de plus en plus forte. Les médias montréalais, toujours friands de drames, s’en donnent à cœur joie.

Chaque contre-performance est amplifiée, chaque gaffe est scrutée à la loupe.

À Montréal, être le gardien de but numéro un signifie être le bouc émissaire des échecs collectifs. Théodore, malgré son talent, commence à plier sous cette pression.

En mars 2006, à seulement 29 ans, José Théodore est échangé à l’Avalanche du Colorado contre David Aebischer.

Comment l’organisation peut-elle se séparer d’un joueur qui, quelques années auparavant, était considéré comme l’étoile montante de l’équipe?

Pour Théodore, cet échange est un coup dur. Il croyait encore avoir plusieurs bonnes saisons à offrir au Canadien, mais l’organisation semble vouloir tourner la page.

Dans les jours suivant l’échange, Théodore confie son désarroi. Il explique que, malgré une blessure au talon qui a affecté son début de saison, il était prêt à rebondir.

Mais il n’a jamais eu cette chance.

"Je n’ai pas eu l’opportunité de montrer que je pouvais revenir à mon meilleur niveau," dira-t-il plus tard.

Son départ marque la fin d’une ère pour le Canadien. L’organisation semble vouloir effacer son passage. Contrairement à d’autres joueurs ayant marqué l’histoire du club, Théodore n’est jamais célébré, invité à des événements officiels ou mentionné lors des cérémonies au Centre Bell.

Il est comme un fantôme, un souvenir qu’on préfère ignorer.

« Je me console à l’idée que Serge Savard, Guy Lafleur et Patrick Roy ont mis du temps à remettre les pieds au Centre Bell. Mais je ne le comprends pas davantage. »

Malgré ses exploits, José Théodore est aujourd’hui l’un des grands oubliés du Canadien de Montréal. Ses 10 saisons avec l’équipe, ses 141 victoires, son trophée Hart et son Vézina semblent avoir été balayés sous le tapis.

Dans une entrevue poignante, Théodore confie sa tristesse :

« Je vois beaucoup d’anciens coéquipiers qui ont au moins une petite mention quelque part. Même avec les anciens du Canadien, à moins que le Canadien ait perdu mon numéro, je n’ai jamais été invité au tournoi de golf de l’équipe. Est-ce que ça me fatigue? Oui, ça me fatigue un peu. »

« Je n’ai jamais joué pour les honneurs, et je n’en fais pas un drame, mais je me pose la même question."

Il souligne également que l’organisation semble avoir une mémoire sélective, célébrant certains joueurs tout en en ignorant d’autres.

Pour Théodore, cette indifférence est un rappel constant des moments difficiles qui ont marqué sa fin de parcours à Montréal.

L’un des aspects les plus intrigants de l’histoire de Théodore est sa relation avec Carey Price, le gardien qui a pris sa place comme visage de l’équipe. 

Même s'il a publiquement loué les talents de Price, il est clair que Théodore ressentait une certaine jalousie.

Lorsqu’il travaillait comme analyste pour TVA Sports, Théodore a tenté d’interviewer Price, mais ce dernier ne l’a pas reconnu. Pour Théodore, cet incident prouve l’oubli auquel il est confronté.

Il critiquait également subtilement les échecs de Price en séries éliminatoires, insistant sur le fait que, malgré tout son talent, Price n’a jamais réussi à mener l’équipe à une conquête de la Coupe Stanley.

Cette rivalité silencieuse reflète l’amertume d’un homme qui se sent injustement écarté de l’histoire du Canadien.

Aujourd’hui, José Théodore vit en Floride, où il mène une vie tranquille loin des projecteurs. Il est devenu un homme d’affaires prospère, collaborant avec Serge Savard dans l’immobilier.

Mais malgré cette réussite, le manque de reconnaissance de la part du Canadien reste une plaie ouverte. Il se souvient avec fierté de ses années à Montréal, mais il ne peut s’empêcher de se demander ce qui aurait pu être si l’organisation avait fait un effort pour honorer son passage.

Pourtant, son héritage est indéniable. Peu de joueurs ont marqué le Canadien comme il l’a fait. Sa saison 2001-2002 reste l’une des meilleures jamais réalisées par un gardien de but dans l’histoire de la LNH.

Et même s’il a été oublié par l’organisation, les partisans, eux, se souviennent encore de ses exploits.

L’histoire de José Théodore avec le Canadien est celle d’un héros local qui a connu des sommets extraordinaires, mais qui a été brisé par les pressions et les controverses.

Son oubli par l’organisation est une injustice qui mérite d’être corrigée.

Après tout, les grandes histoires de hockey sont faites de moments de triomphe et d’adversité. Et celle de José Théodore, avec ses hauts et ses bas, est un chapitre essentiel de l’histoire du Canadien de Montréal.

Il serai temps de l'honorer comme il se doit. Il mérite que son nom soit gravé sur l'anneau d'honneur à tout le moins.

Shea Weber a déjà eu cet honneur. Théo, qui a gagné le trophée indiviuel le plus prestigieux dans la LNH (Hart) ne mérite pas son nom sur le mur du Centre Bell?

Ridicule. Ses proches doivent tellement être en colère.

Nos pensées sont avec lui. À sa place, on aurait envie de tout casser.