Perte de millions de dollars: Laval attend son prodige russe

Perte de millions de dollars: Laval attend son prodige russe

Par Marc-André Dubois le 2025-07-20

Quand le Canadien de Montréal a sélectionné Alexander Zharovsky au 34e rang du repêchage 2025, plusieurs observateurs ont immédiatement crié au vol.

Et pour cause : dans les bureaux du CH, Zharovsky figurait tout près du 16e rang sur la liste interne, un rang que l’organisation détenait avant de le céder, avec le 17e, aux Islanders dans l’échange pour Noah Dobson.

C’est donc dire que Kent Hughes croyait devoir faire une croix sur ce joyau russe… jusqu’à ce que, miraculeusement, il glisse jusqu’à la deuxième ronde.

Mais ce qui s’annonçait comme un pari à long terme pourrait se transformer, à la surprise générale, en un coup de circuit à court terme.

Selon plusieurs informations venues de Russie, le Salavat Yulaev Ufa, le club de Zharovsky dans la KHL, est en train de s’effondrer financièrement.

Et cela ouvre la porte toute grande à une arrivée accélérée de l’attaquant russe sur le continent nord-américain. Oui, aussi tôt que l’an prochain, à Laval.

Un scénario inimaginable il y a quelques semaines… qui devient maintenant très, très, très plausible.

Pour comprendre comment Zharovsky pourrait atterrir à Laval dès la saison 2025-26, il faut plonger dans les coulisses du chaos qui secoue son équipe russe.

Le média Business Online a récemment publié une enquête-choc : le Salavat Yulaev est accablé de dettes, au point de réduire son budget à 475-500 millions de roubles (7,3 M$ à 7,5 M$ canadiens), le strict minimum pour respecter le plancher salarial de la KHL.

À titre comparatif, l’an dernier, l’équipe fonctionnait avec une masse salariale de plus de 720 millions de roubles.

La chute est brutale. Les départs s’enchaînent : Mikhail Naumenkov, Nathan Todd, Scott Wilson et même Joshua Leivo, meilleur buteur de la KHL, sont tous poussés vers la sortie. Non pas pour des raisons sportives… mais faute de moyens.

Et Zharovsky dans tout ça? Même s’il coûte beaucoup moins cher que ces vétérans, il devient une monnaie d’échange potentielle.

Pourquoi? Parce que libérer un jeune prometteur, sans le payer, peut soulager les finances à court terme tout en évitant de devoir honorer les primes de développement futures.

D’autant plus que le modèle de financement du club est sur respirateur artificiel. L’argent ne vient plus directement de l’État ou des grandes entreprises d’État comme Bashneft ou Rosneft, mais sous forme de prêts, que le club peine à rembourser.

Résultat : en 2024, les joueurs ont menacé de boycotter un match à cause de salaires impayés. En janvier 2025, la FNS (la Federalnaya Nalogovaya Sluzhba, soit le Service fédéral des impôts) a gelé les comptes bancaires du club.

Et aujourd’hui, Salavat est poursuivi pour plus de 300 millions de roubles par divers créanciers, dont des transporteurs aériens, des fournisseurs d’équipement, et même des hommes d’affaires locaux.

Un message subtil… mais clair : « Laissez le CH venir nous voir »

Dans ce contexte explosif, une déclaration de Viktor Kozlov, entraîneur-chef de Zharovsky, est passée inaperçue… mais mérite d’être examinée à la loupe.

Dans une entrevue accordée à Marco D’Amico de RG Média, Kozlov a affirmé :

« Laissons le Canadien nous visiter, voir comment il voit le développement de Zharovsky, et quand le temps viendra, on pensera à la possibilité de le laisser aller. »

Prononcée avec un sourire en coin, cette phrase a tout d’une invitation voilée à négocier. Un message codé? Bien sûr.

Mais un message tout de même. Kozlov sait pertinemment que les clubs de la LNH n’ont pas le droit de verser de l’argent directement à une équipe KHL.

Mais les rumeurs de « bonbons » existent depuis toujours dans ce genre de situation : libération de contrat contre de l’équipement, échange de connaissances, assistance technique ou, parfois, initiatives communautaires croisées…

Zharovsky pourrait-il « racheter » lui-même son contrat? Oui. Une libération mutuelle peut aussi être convenue. Rien n’est impossible quand un club est à ce point désespéré.

Zharovsky est conscient que la meilleure façon d’atteindre son rêve dans la LNH, c’est d’apprendre à jouer sur les petites glaces dès que possible. Laval, sous l’œil de Pascal Vincent et avec les ressources du Canadien, représente un tremplin inégalé.

Sur la glace, Zharovsky a surpris tout le monde lors des dernières séries de la KHL. Appelé à la dernière minute en raison d’une blessure chez un joueur U21, il n’a pas simplement « survécu ». Il a brillé.

« Il n’était pas dépassé. Il jouait avec confiance. Il avait toujours un plan avec la rondelle. Il n’envoyait pas ça n’importe où. Il créait de l’attaque », a dit Kozlov à RG.

Dans un match contre le Spartak de Moscou, il a joué tout le premier vingt. Puis il a graduellement gagné du temps de jeu au fil de la série. Selon l’entraîneur, il a tout mérité. Aucun passe-droit. Aucun traitement de faveur.

« Il a gagné chaque minute de jeu. Aucune faveur de ma part. »

Voilà ce qui a fait fondre les recruteurs du CH. Et voilà pourquoi Kent Hughes a donné ses deux choix (41e et 48e) pour remonter au 34e rang et le sélectionner. Dans les faits, Zharovsky a été le premier choix du Canadien au repêchage 2025… et il risque d’être le premier à faire le saut aussi.

Le CH reste prudent… mais attentif..

Officiellement, le Canadien n’a pas encore pris contact avec le Salavat Yulaev. C’est ce qu’a affirmé Kozlov. Mais il ne faut pas être naïfs. Dans les coulisses, les discussions existent.

Martin St-Louis est même invité, à la blague, à venir observer le camp d’entraînement à Ufa en août. Une façon diplomatique de dire : « Vous êtes les bienvenus… si vous venez avec des idées. »

Kent Hughes et Jeff Gorton n’ont pas encore mis les bouchées doubles pour forcer l’arrivée anticipée de Zharovsky. Mais si le Salavat continue de saigner financièrement, la fenêtre pourrait s’ouvrir toute grande après la saison 2025-26.

Et si le CH est rapide, le Rocket de Laval pourrait recevoir un cadeau inespéré dès l’automne 2026. Ou même avant…

Zharovsky était déjà considéré comme un vol au repêchage. Mais si le Canadien parvient à le rapatrier avant l’échéance de son contrat, ce serait un véritable miracle administratif et sportif.

Il n’a que 18 ans. Il a déjà goûté aux séries dans la KHL. Il a brillé. Il est mature. Il est humble. Et il veut progresser.

L’organisation montréalaise n’a qu’à tendre la main. Le reste… dépendra des jeux politiques en Russie, des dettes du Salavat, et d’un brin d’audace du tandem Hughes-Gorton.

Mais une chose est certaine : l’histoire est loin d’être terminée.