Phillip Danault savait exactement dans quoi il s’embarquait. Il le savait avant même de remettre le chandail du Canadien, et il l’a ressenti dès la première mise en jeu à Boston.
Le retour était chargé, lourd, émotionnel. Trop. Il l’a admis lui-même : rouille, stress, tension. Une semaine et demie sans jouer, un changement d’environnement brutal, un nouveau rôle à absorber en accéléré. Résultat : 27 % d’efficacité au cercle. Dans un marché normal, on parle d’un ajustement. À Montréal, c’est un verdict instantané.
Et pendant que certains partisans du CH analysaient froidement la situation, les fans des Kings de Los Angeles, eux, n’attendaient que ça.
Les messages ont recommencé à circuler :
« Préparez-vous. Vous allez comprendre. »
« Il est fini. »
« Il a perdu une demi-seconde. »
« Même aux mises en jeu, il n’est plus là. »
Ce n’était pas de l’analyse, c’était un avertissement. Une manière de dire : on vous l’avait dit. Danault est devenu, malgré lui, l’argument vivant d’un divorce mal digéré.
Ce qui rend la situation cruelle, c’est le contexte. Danault ne revient pas pour être une vedette. Il revient pour stabiliser, absorber les minutes en désavantages numérique et "encaisser défensivement".
Sauf qu’avec la blessure de Jake Evans, avec l’intensité immédiate du match à Boston, avec la comparaison constante entre ce qu’il était et ce qu’il doit redevenir, la marge d’erreur est inexistante.
Il n’a même pas eu droit à un match neutre. Dès la première soirée, tout a été scruté : ses mises en jeu, ses déplacements, son timing, son souffle.
Lui, au moins, n’a pas fui. Il a avoué qu'il était stressé comme jamais. Il a parlé de soulagement. Il a parlé d’un match de séries. Il a répété qu'il était rouillé comme jamais. Les excuses... déjà les excuses...
Les fans des Kings se trompent-ils? Danault n’est pas revenu pour prouver qu’ils avaient tort dès le premier soir. Il est revenu pour se reconstruire dans un environnement où il se sent désiré, utilisé, compris.
Mais une chose est certaine : le message venu de Los Angeles est passé.
Montréal est maintenant prévenu.
Avec Phillip Danault, il n’y aura ni lune de miel… ni patience. Les fans du CH sont "gentils gentils" au début, mais sans pitié très rapidement.
Pendant ce temps, les journalistes québécois "lui lichent les bottes" si vous nous permettez l'expression.
Il y a quelque chose d’artificiel dans la façon dont Phillip Danault est traité médiatiquement depuis son retour, comme si le simple fait qu’il soit québécois commandait automatiquement la bienveillance.
Les questions sont molles:
« Content d’être de retour? » « Ça fait du bien, Montréal? »
Et Danault répond avec le ton attendu, celui qui apaise :
« Je voulais disputer un gros match… j’ai ressenti beaucoup de tension avant le match, beaucoup de stress, mais c’était un bon stress ».
« Je suis soulagé et je suis content d’être ici, avec les gars». Il parle d’entonnoir mental à Los Angeles, d’un rôle qui l’a rendu « impuissant et inutile », il dit croire que « quand tu te sens bien mentalement, la rondelle te suit », il insiste sur le système plus offensif de Martin St-Louis, promet d’aller au filet, de garder ça simple.
Tout est bien dit, tout est humain, tout est logique. Mais cette zone de confort médiatique ne durera pas. Parce que très vite, les citations devront être appuyées par autre chose que des intentions.
« Il faut toujours que tu te regardes dans le miroir », a-t-il lui-même admis et ce miroir-là, à Montréal, finit toujours par se fissurer.
Le capital de sympathie est réel, mais il est temporaire. Quand les matchs s’accumuleront sans but, quand le stress ne sera plus bon mais simplement lourd, les questions ne seront plus douces.
Et ce jour-là, ce ne sont plus les mots de Danault qui compteront, mais ce qu’il sera réellement capable de livrer sur la glace.
