La pitié autour de Samuel Montembeault est devenu un malaise devenu plus lourd que toutes ses statistiques.
Le gars perd un match, affiche un pourcentage d'efficacité de 833, perd ses repères, et tout le monde autour de lui semble déterminé à lui offrir un coussin émotionnel tellement épais qu’il en devient presque gênant.
Ce qui devait être un simple match de conditionnement s’est transformé en séance collective de compassion forcée, où chaque acteur (médias, coach, organisation) marche sur des œufs comme si un mot trop direct pouvait anéantir ce qui reste de son moral.
Le résultat est devenu presque plus malaisant que sa performance.
Montembeault laisse passer 4 buts sur 24 tirs, un rendement objectivement insuffisant pour un gardien de la LNH, même dans un contexte de club-école en reconstruction.
Et pourtant, dès que la sirène retentit, l’atmosphère change : impossible d’analyser, impossible de critiquer, impossible de dire simplement qu’il n’a pas été bon.
On parle de son attitude.
On parle de son sourire.
On parle de son "bench behavior."
On parle de son leadership invisible.
On parle de tout… sauf de ce qu’il fait devant le filet.
Pascal Vincent, un entraîneur d’habitude direct, a choisi d’envelopper sa conférence de presse dans une couche de ouate tellement épaisse qu’on avait l’impression d’assister à un discours d’encouragement pour un jeune novice en tournoi novice B.
« Son attitude est irréprochable », dit-il.
« On peut bâtir là-dessus. »
« Il a vu beaucoup d’action. »
« Il encourage les gars. »
Le vocabulaire n’a plus rien à voir avec la LNH.
C’est celui qu’on utilise quand on protège quelqu’un qui est déjà au sol.
Et ce glissement de ton créé un malaise réel : Montembeault n’est plus traité comme un athlète professionnel en difficulté; il est traité comme un individu qu’il faut ménager à tout prix, sans jamais l’exposer à la réalité.
La pitié est devenue la stratégie.
Ce n’est pas seulement Vincent. C’est tout le discours autour de lui. Les médias insistent sur les blessures d’absence.
On contextualise chaque but en le dissociant de sa responsabilité.
On souligne que la défensive était fatiguée, poreuse, méconnaissable.
On note qu’il « n’y pouvait rien » même sur des séquences où un gardien en confiance aurait peut-être pu fermer la porte.
On répète qu’il parle à ses défenseurs, qu’il sourit, qu’il encourage, comme si c’était devenu cela, désormais, la nouvelle métrique de performance.
Et pendant ce temps, le malaise enfle.
Parce qu’à trop vouloir protéger Montembeault, on finit par l’infantiliser.
Personne ne souhaite qu’un athlète québécois échoue. Personne ne dérive de plaisir à le voir en difficulté. Mais il existe une différence entre protéger et surprotéger et le CH, depuis deux semaines, s’est engouffré dans une surprotection gênante, presque anxieuse.
Comme si chaque phrase devait être filtrée à travers un comité de bienveillance. Comme si l’organisation marchait sur une plaie ouverte sans jamais oser regarder la blessure.
Martin St-Louis aussi continue de protéger Sam comme s'il était son fils qui échoue à l'école. Excuse après excuse... ça va faire...
La réalité, pourtant, est simple :
Montembeault ne va pas bien. Sa confiance est au fond du gouffre. Son jeu est fracturé.
Et tout ce qui gravite autour de lui, la pitié généralisée, ne fait qu’accentuer le malaise.
On a le droit d’être humain.
On a le droit d’avoir de l’empathie.
Mais à un moment donné, il faut se demander si Montréal aide réellement Samuel Montembeault ou si on est en train de créer un climat tellement chargé d’émotions qu’il n’arrive plus à respirer.
Hier, ce n’était pas simplement un gardien qui encaissait quatre buts. C’était un système qui refusait d’admettre ce qu’il voit.
C’était un environnement qui transforme un athlète professionnel en cause humanitaire. C’était un malaise si évident que même les compliments sonnaient faux.
Montembeault n’a pas besoin de pitié.
Il a besoin de vérité, d’espace, de silence, de temps... et surtout qu’on arrête de le traiter comme un boulet fragile.
Le protéger, oui.
L’enfermer dans un cocon d’excuses, non.
Et tant que Montréal ne fera pas cette distinction,
Montembeault continuera d’avancer dans un brouillard où chaque tentative pour l’aider ne fait que l’enfoncer un peu plus.
