Propos horrifiants sur Samuel Montembeault: sa famille ne mérite pas ça

Propos horrifiants sur Samuel Montembeault: sa famille ne mérite pas ça

Par Marc-André Dubois le 2025-11-13

Samuel Montembeault ne mérite pas le cauchemar qu'il vit sur les réseaux sociaux.

Hier, devant les journalistes, il aurait pu parler de technique, de fatigue, d’erreurs collectives. Il aurait pu se réfugier derrière l’analyse classique d’un mauvais match, trouver les mots pour calmer la tempête.

Mais Samuel Montembeault a choisi de parler d’autre chose. Il a choisi de parler de l’autre tempête. Celle qu’il vit en silence, dans l’ombre, depuis des semaines.

Celle qu’aucune statistique ne mesure, mais qui laisse des cicatrices bien plus profondes qu’un but accordé à l’adversaire : la haine déversée sur ses réseaux sociaux. L’insulte permanente. La cruauté sans filtre. Le mépris anonyme. L’humiliation publique.

Lors de sa conférence de presse la plus inconfortable de la saison, le gardien québécois du Canadien de Montréal a confirmé ce que plusieurs soupçonnaient : il a supprimé ses comptes Instagram et autres plateformes parce que les messages étaient devenus « trop méchants ».

Il n’a pas dit ça avec colère. Il n’a pas dit ça avec pitié. Il l’a dit avec le ton de quelqu’un qui a atteint le point de rupture.

Ce moment où les mots des autres deviennent trop lourds à porter, même pour un athlète professionnel. Ce moment où la vie publique se transforme en cauchemar privé.

Montembeault n’est pas le premier joueur du Canadien à vivre ce genre de dérapage humain. Mais il est l’un des rares à le reconnaître aussi honnêtement.

« J’ai fermé mes réseaux sociaux parce que c’était trop méchant », a-t-il confié d’un ton triste. Ce que le gardien n’a pas précisé, mais que plusieurs captures d’écran disponibles sur X révèlent, c’est la nature des messages qu’il recevait. Et c’est là que le malaise devient insoutenable.

Certains le traitent de « grassouillet », de « double menton », d’« obèse ». D’autres s’en prennent à sa blonde, affirmant qu’elle « mériterait mieux », qu’elle « devrait sortir avec un vrai joueur de la LNH ».

Plusieurs commentaires insinuent qu’il ne mérite pas de porter le chandail du Canadien. On se moque son accent, on tourne en ridicule sa diction.

« On comprend rien quand il parle », écrit un internaute. D’autres vont plus loin encore : ils critiquent son visage, son poids, son allure. On ne parle même plus de hockey. On parle d’un être humain qu’on insulte comme s’il n’était qu’une cible.

Dans une société québécoise qui se vante de lutter contre l’intimidation, ce que vit Montembeault est un miroir horrible et dégoûtant.

Les mots qu’il reçoit quotidiennement sont ceux qu’on dénoncerait s’ils étaient lancés dans une cour d’école. Mais parce qu’il est athlète, certains se croient tout permis.

Parce qu’il joue à Montréal, d’autres pensent que la pression vient avec l’inhumanité. Parce qu’il a eu un mauvais match, plusieurs se donnent le droit de l’écraser.

Montembeault avait souligné la veille que la performance contre les Kings n’était pas seulement sa responsabilité. « Il y a eu un relâchement collectif », a-t-il dit.

Une manière élégante de partager le fardeau avec ses coéquipiers pour se protéger. Mais ceux qui l'enfoncent ne veulent pas entendre ça. Ils veulent un coupable. Un visage à détruire. Et c’est tombé sur lui. Encore.

Il y a eu cette scène au Centre Bell, le symbole ultime de la fracture entre le joueur et une partie du public : les murmures dans les gradins à chacun de ses mouvements.

La nervosité évidente dès qu’il posait la mitaine sur la rondelle. Et cette caméra qui, dès une erreur, ne montrait pas Martin St-Louis ou la défensive désorganisée, mais allait chercher le gros plan sur Montembeault. Comme s’il était seul responsable. Comme s’il n’était qu’une cible.

Ce qui rend ce drame encore plus cruel, c’est qu’il ne se joue pas qu’entre les murs du vestiaire ou sur la toile. Il touche une famille entière.

Les Montembeault, des gens simples de Bécancour, n’avaient jamais rêvé de célébrité. Ils ont toujours été discrets, loyaux et tissés serrés.

Ils ont suivi le parcours de Samuel avec fierté, sans jamais faire de bruit. Aujourd’hui, ils voient leur fils se faire traîner dans la boue, non pas pour ses performances, mais pour son apparence et sa voix.

Une déshumanisation qui ne ressemble en rien aux valeurs qu’ils ont portées.

Quand Montembeault ferme ses réseaux sociaux, ce n’est pas juste pour ne pas lire les commentaires. C’est pour protéger sa dignité. C’est pour éviter que sa conjointe lise qu’elle devrait être avec un autre homme.

C’est pour que sa mère n’ait pas à pleurer en lisant qu’il est « gros » ou « attardé ». C’est pour que son père ne se sente pas impuissant face à une violence devenue incontrôlable. Ce n’est pas un geste de faiblesse. C’est un geste de survie.

Le journaliste Martin McGuire, qui a osé comparer Montembeault à Carey Price, n'a pas aidé le Québécois. 

Tu commences à vivre ce que Carey Price et d'autres ont vécu? », lui a-t-il demandé. Une question qui se voulait compatissante, mais qui a enflammée encore plus les réseaux sociaux.

Car Montembeault n’est pas Price. Il n’a pas le contrat de Price. Il n’a pas les statistiques de Price. Il n’a même pas le statut de gardien numéro un établi.

Il est un joueur qui s’accroche, qui lutte, qui donne ce qu’il peut. Le comparer à une légende revient à lui imposer des standards inatteignables. Et le blâmer ensuite pour ne pas les atteindre.

Et maintenant, quoi?

Le silence de Martin St-Louis dans toute cette affaire est aussi révélateur. Le coach n’a pas encore publiquement dénoncé la violence des commentaires. Il n’a pas encadré Montembeault autrement que par des phrases préparées d'avance comme quoi il avait encore confiance en son gardien.

La direction du CH, de son côté, n’a pas abordé cette dimension sociale. Comme si ce n’était pas important. Comme si les insultes sur la famille, le poids, la blonde, le visage… faisaient partie du jeu.

Mais elles ne font pas partie du jeu. Elles en sont la défiguration.

Samuel Montembeault traverse un moment tellement cruel. Pas seulement comme joueur, mais comme homme. Il doit faire face à des critiques légitimes sur son jeu, mais aussi à une meute qui ne fait pas la différence entre la performance et la personne.

Il le fait avec dignité. Il le fait avec pudeur. Il le fait, surtout, en se coupant du monde. Et c’est peut-être ce qu’il y avait de plus triste à entendre cette semaine.

Il ne voulait plus rien lire. Parce qu’il n’y avait plus rien à sauver.