Il y a des moments dans une carrière où tout peut basculer. Samuel Montembeault est précisément à l’aube de ce moment.
Après avoir tout donné cette saison, en jouant blessé, en gardant les buts comme un guerrier, en encaissant un salaire ridiculement bas pour un gardien numéro un, voilà qu’un cauchemar aussi cruel que plausible s’installe doucement dans l’imaginaire collectif : et si son histoire d’amour avec Montréal s’achevait plus vite que prévu?
Pendant que Montembeault soigne ses déchirures à l'aine, loin de la fièvre des séries, un autre Québécois a volé la vedette au Championnat mondial de hockey en Suède : Marc-André Fleury.
Le vétéran de 39 ans, déjà adulé par tout un peuple, a rappelé au monde entier qu’il avait encore de la magie dans les jambières.
Ses acrobaties, ses "poke checks", sa classe… tout y était. Et sur les réseaux sociaux, une idée folle a commencé à circuler : et si Fleury reportait sa retraite d’un an pour venir jouer le mentor de Jakub Dobes et/ou Jacob Fowler à Montréal? Un rôle parfait. Une dernière saison, à la maison, derrière un jeune prodige comme Jacob Fowler.
L’écho de cette hypothèse s’est amplifié.
La Poche Bleue l’a évoqué avec un clin d’œil. Des fans ont lancé des montages photos. Et le nom de Fleury a été rattaché à Montréal dans des discussions sérieuses sur les duos idéaux pour encadrer Jacob Fowler.
Et c’est là que l’histoire devient encore plus explosive : parce que Marc-André Fleury à Montréal, même pour un dernier tour de piste, pourrait servir d’aimant émotionnel pour convaincre Sidney Crosby de le rejoindre.
Les deux sont inséparables depuis leurs années à Pittsburgh. Meilleurs amis, frères de cœur, Fleury et Crosby ont traversé les sommets et les tempêtes ensemble.
Si "Flower" décidait de finir son aventure dans le bleu-blanc-rouge, on peut imaginer Crosby y voir une occasion en or de vivre une dernière danse dans un marché mythique avec son complice de toujours. Ce n’est peut-être qu’un rêve… mais c’est un rêve qui commence à faire de plus en plus de bruit.
Et Montembeault dans tout ça? Il ne fait même pas partie du tableau.
Impossible d’ignorer la montée en puissance du jeune Jacob Fowler. Le Rocket de Laval vient de balayer Cleveland et Fowler a remporté trois victoires en quatre matchs, avec une moyenne de 1,00 et un taux d’efficacité de .953. Il est infranchissable. Et surtout, il a l’air déjà prêt pour la LNH.
Match 1 : 23 arrêts sur 25 tirs, .920
Match 2 : blanchissage de 20 arrêts, 1.000
Match 4 : performance déterminante pour sceller la série.
Inutile de vous rappeler que Cayden Primeau a perdu le match 3.
À 20 ans, avec à peine une poignée de matchs professionnels dans le corps, il impose le respect comme s’il avait 200 matchs d’expérience.
Même Pascal Vincent, son coach à Laval, n’en revient pas. Son calme. Sa lecture du jeu. Son autorité silencieuse. On croirait revoir les débuts de Carey Price en 2007.
Si Fowler surclasse Dobes au camp d’entraînement… tout change.
Car même si Dobes est le gardien d’office en séries pour le Canadien en l’absence de Montembeault, son irrégularité inquiète. Si Fowler fait mieux au camp, c’est Dobes qui retournera à Laval… et Fowler qui devra être épaulé d’un vétéran.
Si le CH préfère envoyer Fowler comme partant à Laval, Dobes restera à Montréal.
Mais peu importe quel jeune demeure à Montréal, le cauchemar de Samuel Montembeault est commencé.
Imaginez la scène : Samuel Montembeault arrive au camp, remis de sa blessure, après une saison complète à s’arracher pour cette équipe. Et il se fait doubler par le petit prodige. Il accepte son sort. Il accepte même un rôle de mentor temporaire.
Mais voilà qu’on lui annonce que le club préfère Marc-André Fleury pour encadrer Fowler. L’homme qui inspire toute une génération. L’icône. Le retour du fils prodigue.
Impossible de rivaliser avec ça. C’est la fin.
Montembeault devient échangeable. Sa valeur est énorme. Il ne gagne que 3,15 millions par saison pour deux autres années. Pour un club en quête de solution rapide devant le filet, c’est une aubaine.
Tout le monde le sait : les Oilers sont à la recherche d’un vrai gardien. Stuart Skinner est sur le respirateur artificiel. Calvin Pickard est un back-up correct. Mais ils ne gagneront jamais la Coupe avec ça.
Un gardien fiable, abordable, québécois… Montembeault coche toutes les cases.
Mais ce ne sont pas les seuls.
Les Penguins, eux, pourraient être tentés de l’ajouter dans un "package deal" plus large si Crosby venait à forcer un départ.
Kent Hughes est rusé. Un bon retour pour un joueur iconique comme Sidney ne passe que par plusieurs morceaux alléchants. Montembeault pourrait être l’un d’eux.
À Philadelphie, tout indique que Montembeault pourrait remplacer Samuel Ersson dans un avenir proche. Les Flyers sont aussi intéressés à Cayden Primeau.
Le CH ne veut pas perdre Primeau pour rien? Il lui fera une offre qualificative… pour ensuite le transiger à Philly.
Et voilà que les Red Wings s'intéressent aussi à Montembeault.
Peu importe ce qui arrive, il y a une place de trop chez les gardiens.
Fowler sera à Montréal ou à Laval, mais il jouera. Dobes est NHL material. Et Montembeault, même s’il a tenu l’équipe à bout de bras cette année, commence à devenir un luxe de trop dans l’organigramme.
Il est encore jeune. Il est bon. Mais il est vulnérable.
Et surtout, il est devenu… remplaçable.
Ce serait d’une tristesse indescriptible pour celui qui a représenté le CH avec tant de classe. Qui a joué blessé. Qui a encaissé les critiques. Qui a gardé le silence même quand son agent Paul Corbeil lui a obtenu le pire contrat de sa vie.
Il ne méritait pas ça. Mais le hockey ne récompense pas les bons gars.
Il récompense les résultats. Il récompense les contrats d’entrée à 775 000 $ comme celui de Fowler. Il récompense les jeunes. Et les légendes comme Fleury.
Le camp d’entraînement décidera de tout. Si Fowler continue sur sa lancée, l’effet domino sera inévitable. Le CH choisira entre Fleury, Montembeault… ou un vétéran plus discret, pour faire place nette.
Marc-André Fleury a pourtant été clair : il prendra sa retraite après le Championnat mondial de hockey. Il l’a dit, il l’a répété, et à 40 ans, il veut passer à autre chose.
Montréal ne fait donc pas partie de ses plans. Mais le simple fait que cette rumeur ait circulé à si grande échelle, avec autant d’intensité, reste un coup dur pour Samuel Montembeault.
Quand les fans rêvent tout haut de voir une légende québécoise venir prendre ta place, alors que tu es encore sous contrat, encore productif, encore debout malgré tout… ça frappe.
Ce n’est pas une histoire de faits, c’est une histoire de perception. Et à Montréal, la perception est souvent plus forte que la réalité.
Mais une chose est certaine : la place de Samuel Montembeault à Montréal n’est plus garantie.
Et tout ça, après l’année la plus héroïque de sa carrière.