Réveil brutal pour Simon

Réveil brutal pour Simon "Snake" Boisvert: Kaiden Guhle est crampé

Par Nicolas Pérusse le 2025-10-12

Deux jours avant le match de vendredi, alors que le Canadien n’avait pas encore allumé la flamme de sa saison, Simon “Snake” Boisvert avait déjà frappé.

Sur le balado Mathias et le Serpent, celui qu’on surnomme le plus provocateur des ex-recruteurs a lancé une phrase qui a immédiatement traversé les réseaux. Selon lui, Kaiden Guhle ne serait “personne” s’il jouait ailleurs qu’à Montréal.

« Si ce gars-là jouait à Buffalo ou à Utah, a-t-il affirmé, personne ne parlerait de lui. C’est juste à Montréal qu’on se raconte qu’il est un défenseur de premier plan. »

@mathiasetleserpent Kaiden Guhle devrait-il servir de monnaie d'échange? Snake en a sa petite idée... Merci à notre partenaire @Miseojeu #mathiasetleserpent #snake #simonboisvert #habs #gohabsgo #ch @kosports_tv @mathias.brunet6 ♬ original sound - Mathias et le Serpent

À peine ces mots sortis, on savait que le feu prendrait.

Parce qu’il faut oser, encore une fois, réduire un joueur comme Guhle à une création du marché montréalais. Il faut oser dire que le seul défenseur du Canadien capable de faire peur dans sa zone n’aurait aucune valeur dans une autre ville.

Et surtout, il faut être complètement déconnecté de ce qui se passe sur la glace pour avancer une telle théorie. Deux jours avant que Guhle livre le match de sa carrière.

Vendredi soir, au Centre Bell, la réponse est venue.Pas dans une conférence de presse, pas sur X, pas dans une citation coup-de-poing.

Sur la glace.

Guhle a d’abord frappé Frank Nazar d’une mise en échec chirurgicale, un geste à l’ancienne, propre, précis, mais assez solide pour éteindre le jeune attaquant de Chicago sur le coup.

Quelques minutes plus tard, il s’est retrouvé nez à nez avec Louis Crevier, un géant de six pieds huit, et sans la moindre hésitation, il a jeté les gants.

Un combat bref, brutal, honnête.

Le genre de geste qui te rappelle qu’il existe encore, dans cette ligue aseptisée, des gars qui défendent leurs couleurs avec le cœur.

Et comme si ça ne suffisait pas, Guhle a clos la soirée en marquant le but gagnant. Un tir de la ligne bleue, dévié à peine.

Puis, debout devant la caméra, les joues rouges, le souffle court, il a lâché cette phrase qui a traversé tout le Québec : « Nous sommes une meute. »

Cette phrase-là, c’est plus qu’un slogan. C’est une déclaration d’identité.

Et elle venait de l’homme que Boisvert présentait, deux jours plus tôt, comme un joueur “surévalué par le marché”.

Il faut croire que le marché a de meilleures antennes que le Serpent. Parce que ce soir-là, personne n’a vu un mirage médiatique. On a vu un général.

Un défenseur de 23 ans qui joue avec la rage tranquille des grands. Un gars qui se sacrifie sans bruit, qui inspire sans chercher la gloire, qui incarne cette ligne invisible entre le talent et la loyauté.

Ce que Boisvert semble incapable de comprendre, c’est que Guhle n’a jamais eu besoin de Montréal pour être bon. Montréal, en revanche, avait besoin de lui pour retrouver son âme.

Ce joueur n’est pas un produit du marché.

C’est le produit du hockey le plus pur : le patin solide, la première passe propre, la relance simple, la tête toujours haute. Un défenseur qu’on ne remarque pas sur la feuille de pointage, mais qu’on remarque chaque fois qu’il n’est pas là. Parce que soudain, tout vacille.

Guhle, c’est ce qu’on appelle un pilier.

Et dans une Ligue Nationale obsédée par les statistiques et les flashs offensifs, c’est presque une espèce en voie de disparition.

Il faut avoir assisté à son match de samedi pour comprendre. À chaque présence, il imposait un tempo.

Quand Chicago commençait à prendre confiance, il étouffait le rythme d’un corps-à-corps le long de la bande. Quand un jeune attaquant s’aventurait dans sa zone, il sortait le bâton, la hanche, ou la mise en échec parfaite.

Et quand le CH a commencé à flancher en troisième période, il a calmé le jeu comme un vétéran.

Ce soir-là, Guhle n’était pas un joueur local surestimé. Il était le modèle exact de ce que Martin St-Louis veut bâtir : un groupe qui se bat, qui bloque, qui défend ensemble.

Une meute.

Mais il faut croire que dans le microcosme analytique, la nuance fait peur. Simon “Snake” Boisvert aime provoquer. C’est sa marque.

Il a déjà dit que Suzuki était trop passif pour être capitaine, que Slafkovsky plafonnerait comme ailier de troisième trio, et que la LNH surestimait systématiquement les jeunes défenseurs canadiens.

Il ne cherche pas à avoir raison, il cherche à déranger. Et cette fois, il a visé le mauvais joueur.

Parce que Guhle, ce n’est pas un “buzz médiatique”. C’est le gars qui, depuis deux ans, se relève après chaque blessure, sans jamais se plaindre.

C’est celui qui saute devant les tirs, qui prend les coups, qui serre les dents et qui repart. Celui qui joue comme s’il portait encore le chandail du Canada junior, avec la même intensité, la même fierté.

Le plus ironique, c’est que si Guhle jouait ailleurs, justement, il serait probablement encore plus respecté.

À Boston, on le comparerait à Brandon Carlo. À Vegas, on le verrait comme un futur Pietrangelo. À Nashville, on en ferait un nouveau Shea Weber.

Mais à Montréal, on préfère remettre en question ce qu’on a sous les yeux.

C’est une habitude presque culturelle : quand un joueur montre de la constance, de la maturité et du leadership, on cherche le défaut caché.

Et quand on ne le trouve pas, on l’invente.

Le problème, c’est que Guhle n’entre pas dans les catégories habituelles. Il n’a pas le talent spectaculaire de Lane Hutson, ni les chevauchées offensives de Matheson.

Mais c’est lui qui tient la forteresse.

C’est lui qui met de l’ordre dans le chaos, qui fait respirer ses coéquipiers, qui joue les minutes difficiles sans broncher.

Et ça, ça ne se mesure pas. Ça se ressent.

Alors oui, Simon, tu as raison sur une chose : Montréal a un don pour s’emballer.

Mais cette fois, ce n’est pas une illusion. C’est une reconnaissance tardive pour un gars qui mérite chaque seconde d’attention qu’il reçoit.

Parce que dans une équipe jeune, encore en construction, c’est souvent un joueur comme Guhle qui fait la différence entre une reconstruction qui tourne en rond et une organisation qui avance.

Deux jours avant le match, Simon “Snake” Boisvert l’avait ramené au rang de “joueur normal”.

Deux jours plus tard, Kaiden Guhle lui a répondu sans dire un mot, dans le langage que Boisvert semble avoir oublié : celui du hockey pur.

Une mise en échec. Un combat. Un but. Une phrase devenue symbole.

Et soudain, la théorie du Serpent s’est effondrée d’elle-même.

Ce n’était pas un hasard. C’était une leçon.

Parce qu’il y a des joueurs que tu analyses, et d’autres que tu ressens. Et quand Guhle parle de meute, ce n’est pas une métaphore.

C’est un mode de vie.

Le Serpent a voulu mesurer sa valeur.

Guhle a préféré la prouver.

Et à Montréal, on sait désormais laquelle des deux approches gagne les matchs.