Les démons de Samuel Montembeault: son agent l'abandonne

Les démons de Samuel Montembeault: son agent l'abandonne

Par David Garel le 2025-12-24

On aurait pu croire que la chute de Samuel Montembeault, ce n’était qu’une histoire de technique déficiente, d’un camp mal géré, d’une saison trop chargée ou d’un mental dtruit par la pression montréalaise.

Mais, dans l’esprit des partisans, le véritable tournant ne vient ni d’un rebond mal contrôlé ni d’un mauvais positionnement.

Il vient d’une poutine.

Plus précisément : d’une publicité McDonald’s.

Depuis que la campagne tourne en boucle, dans les arénas, sur YouTube, à la télé, dans les bars sportifs, Montembeault est devenu, malgré lui, l’incarnation d’une malédiction moderne : le gardien qui signe un contrat avec McDo… et qui, aussitôt, voit sa saison s’effondrer comme un emballage vide.

À Montréal, les coïncidences n’existent jamais.

Et dans ce climat électrique, le public n’a pas seulement tiré une conclusion : il en a fait une règle.

« Jacob Fowler, pour l’amour du ciel, ne fais JAMAIS une pub McDo. »

C’est devenu un avertissement. Chaque fois que le sujet revient, les messages affluent, la mise en garde se répète, comme si on tentait de protéger le prodige d’un sort horrible déjà infligé à son prédécesseur.

Parce qu’on connaît l’histoire par cœur.

Un gardien qui arrive au camp lourd, gras, en méforme physique complète après un été de mariage, bonne bouffe, lune de miel et fêtes arrosées.

Un gardien qui gagne un surnom dans le vestiaire, « Snacks », parce qu’il a une relation irrégulière avec la nutrition.

Un gardien s'effondre, qui perd ses repères, qui se retrouve à Laval pour « fins de conditionnement », alors que tout le monde sait que ce n’est plus seulement du hockey, mais un sauvetage psychologique et physique.

Et pendant qu’il lutte pour respirer, la publicité tourne.

Encore et encore.

Un rappel permanent, cruel, involontaire, d’un été où il aurait dû se reposer… mais aussi se préparer.

Pascal Leclaire est cinglant sur les ondes de la Poche Bleuei : il aurait dû faire une pub de salade:

@lapochebleue La pub de McDo de Samuel Montembeault, ça n'a rien à voir avec ses performances! 🍟 #montembeault #gardien #mcdonalds #habs #nhl ♬ original sound - lapochebleue

Ça lui aurait évité bien des moqueries. Son agent, Paul Corbeil, l'a tout simplement abandonné dans cette histoire. C'était son travailler de protéger Sam et de lui dire que c'était une idée catastrophique que de représenter une poutine au poulet et au bacon... quand le Québécois a la réputation de ne pas être "en shape".

C'était le travail de Paul Corbeil de superviser son été, alors qu'il se mariait et que les démons du plaisir tournaient autour.

Maxime Lapierre, qui connaît mieux que personne la violence du marché montréalais, a tenté de remettre les pendules à l’heure.

Il a supplié les fans de relâcher la pression.

« Laissez-le tranquille. C’était un tournage d’été, quelques heures dans une journée. Ce n’est pas une pub qui cause une saison difficile. »

Son plaidoyer est sensé, humain, noble même. Mais Montréal ne fonctionne pas avec la logique. Montréal fonctionne avec le symbole.

Et le symbole, cette année, c’est Montembeault en pleine dérive, regard perdu, gestes lents, déplacements lourds, et cette publicité qui surgit dans chaque pause télé comme un rappel inconfortable de tout ce qu’il n’a pas su contrôler.

Il a beau répéter qu’il va mieux.

Il a beau dire qu’il travaille.

Il a beau affirmer qu’il veut revenir plus fort. Son taux de gras semble toujours aussi élevé.

Le public n’entend qu’une chose : la malédiction du McDo.

À peine arrivé, Fowler a déjà reçu une alarme que les autres générations n’ont jamais reçu :

à Montréal, l’image n’est pas un détail, elle fait partie de ta performance.

Tu veux rester carré devant ton filet?

Tu veux imposer ton style calme et clinique?

Tu veux devenir l’héritier psychologique de Carey Price?

Alors ne touche jamais à quelque chose qui pourrait devenir une arme contre toi. Ne joue pas avec le feu des commanditaires alimentaires. Ne permets pas au public de trouver une ouverture pour te ridiculiser.

Ne laisse pas la publicité... et la malbouffe t’engloutir.

Les conseils affluent de partout : anciens journalistes, analystes, ex-joueurs, blogueurs, fans. Tout le monde, littéralement tout le monde, dit la même chose :

« Jacob, si un jour tu fais une publicité, fais-la avec une compagnie d’eau, ou de yoga, ou de jus verts, ou de nutrition sportive. Mais surtout, surtout, pas McDo. »

Parce qu’à Montréal, la ligne entre l’héros et le bouc émissaire est mince.

Et Montembeault l’a franchie malgré lui.

Ce qui rend la situation encore plus lourde, c’est que Montembeault n’est pas un mauvais gardien.

Il n’est pas un lâche.

Il n’est pas un gars qui ne veut pas travailler. Mais il aime trop manger... et il déteste s'entraîner en gym..

Et le malheur, c’est que tout s’est cristallisé au moment où la pub McDo a commencé à tourner.

Le public a fait deux plus deux. Il a trouvé une cause et une explication à ses déboires.

Poutine, gras, restauration rapide, malbouffe, mariage, été un peu trop "chill"... effondrement sportif...

Montréal est un marché qui fabrique des héros en 48 heures et qui les détruit en 24, avec une obsession pour l’image et la narration autour du joueur.

Fowler sera ce que Montembeault n’a pas réussi à devenir : intouchable. Mais seulement s’il évite les pièges qui ont englouti son prédécesseur.