Paris sportifs: le cauchemar de Samuel Montembeault

Paris sportifs: le cauchemar de Samuel Montembeault

Par David Garel le 2025-12-02

Il aura fallu deux mois d’enfer, une crise médiatique sans précédent, des insultes à répétition sur ses réseaux sociaux, des nuits où il n’arrivait plus à respirer sous la pression, et surtout une saison statistique qui frôle l’indéfendable… mais voilà : Samuel Montembeault tient enfin quelque chose pour expliquer son pourcentage d’efficacité (864) digne des années 1990.

Et ce quelque chose n’a rien à voir avec sa technique, sa préparation physique ou ses erreurs devant le filet. Non : ce sont les paris sportifs qui sont en train de transformer toute la LNH, et le plus ironique dans tout ça, c’est qu’un gardien étoile de la Ligue, l’excellent Jake Oettinger, vient de lui offrir l’excuse rêvée.

Alors que Montembeault navigue autour d’un épouvantable .864, accompagné d’une moyenne de buts alloués de 3,49, Jake Oettinger montre lui aussi avec des chiffres qui n’ont absolument aucun bon sens : une efficacité sous les .900, ce qui aurait été impensable pour un gardien élite il y a à peine cinq ans.

Et quand on demande au gardien vedette des Stars ce qui se passe, pourquoi les statistiques des gardiens s’effondrent partout dans la LNH, il ne réfléchit même pas une seconde avant de nommer le coupable : les paris sportifs.

Et soudain, tout s’éclaire.

Parce que selon Oettinger, selon Frédéric Chabot (entraîneur des gardiens au Minnesota), selon Frantz Jean à Tampa Bay, et selon plusieurs entraîneurs de gardiens cités dans le reportage, la LNH enlève maintenant 3 à 4 tirs par match, parfois 2 ou 3 par période, dans le simple but d’assurer une précision absolue pour les plateformes de paris.

Avant, quand le système était relié seulement au responsable des statistiques dans chaque amphithéâtre, il pouvait y avoir de la triche.

Imaginez un parieur qui a mis énormément d'argent sur le nombre de tirs d'une équipe ou sur une confrontration entre deux joueurs pour savoir qui va avoir le plus de lancers à la fin du match. 

Imaginez ensuite ce parieur qui perd sa mise à cause d'une erreur humain, ou tout simplement parce que le responsable des stats... a lui aussi mis de l'argent. Bonjour la tricherie!

« Avant, ça dépendait de qui les comptait. Dans certains amphithéâtres, tu savais que tu allais avoir cinq tirs de plus parce que le responsable était plus généreux. » affirme Oettinger à La Presse.

Les rondelles munies de puces, les revues systématiques après chaque période, les tirs jugés « hors cible » à quelques centimètres près : tout est scruté, tout est recalculé, tout est uniformisé.

Résultat ?

Les gardiens font face au même volume réel d’attaque…

Mais leurs statistiques officielles chutent.

Et ce que décrit Oettinger à La Presse est renversant :

« Parfois, la rondelle me frappe en pleine poitrine, un arrêt clair, et ça ne compte même pas parce que les données disent qu’elle aurait raté le filet d’un centimètre. C'est tellement ridicule. »

Un arrêt réel devient un tir « hors cible ».

Un tir « hors cible » devient une statistique qui disparaît.

Et une statistique qui disparaît fait chuter le taux d’efficacité.

Dans une ligue où les carrières et les salaires se jouent maintenant au centième de pourcentage, c’est une catastrophe silencieuse... surtout pour les passoires comme Samuel Montembeault...

Le symbole est cinglant: les paris sportifs ont fait tout perdre au pauvre Sam.

Et pendant que la LNH se félicite de fournir des données « plus exactes » aux maisons de paris, les gardiens — surtout ceux qui jouent derrière des défensives poreuses, payent la note.

Et dans ce contexte, devine qui figure parmi les plus grands perdants ?

Évidemment : Samuel Montembeault.

L'excuse tellement facile: le Québécois n’a pas soudainement perdu son talent. Il n’a pas soudainement oublié comment faire un arrêt. Il n’est pas devenu un gardien incapable du jour au lendemain. Il évolue simplement dans un environnement statistique qui amplifie dramatiquement chaque erreur, chaque tir cadré, chaque séquence mal défendue.

On a passé des semaines à le crucifier, à coups de .839, puis .846, puis .860, sans savoir que, dans les faits, des tirs réels étaient effacés des registres. Et chaque tir effacé devient un pourcentage qui chute, un blâme qui augmente, une pression qui explose.

Ouin. Comme si les paris sportifs pouvaient sauver la réputation de Samuel Montembeault.

La joke de l'année? Ce week-end, Montembeault remportait un match à Vegas, un triomphe personnel après une semaine de chaos où il avait dû se défendre devant les journalistes, devant les fans, devant ses propres démons.

Il a relancé sa saison... dans la ville des vices... et du pari sportif...

Et pourtant, même avec cette victoire, même avec cette prestation solide, il demeure l’un des gardiens les moins bien classés de la ligue. Et pour la première fois, il y a une explication qui dépasse l’individu : la LNH a changé ses méthodes et n’a averti personne.

La tendance est irréfutable (crédit: La Presse):

2021–22 : .907

2022–23 : .904

2023–24 : .903

2024–25 : .900

2025–26 : .897

On n’a pas vu un taux aussi bas depuis 1996.

La Ligue veut protéger les parieurs ; les gardiens, eux, ramassent les pots cassés.

Pour Montembeault, ce reportage tombe comme un cadeau du ciel. Pas parce qu’il chercherait des excuses , même ses plus grands détracteurs reconnaissent qu’il assume ses responsabilités, mais parce que pour une fois, le contexte explique une partie du naufrage.

Pendant des semaines, on l’a traité de grassouillet "out of shape", de lent, de mentalement faible, d’athlète en déclin, d’erreur du Canadien. On l’a humilié publiquement, on l’a insulté, on l’a présenté comme le bouc émissaire idéal d’une équipe en reconstruction.

Mais aujourd’hui, une donnée nouvelle modifie le portrait : les statistiques des gardiens de la LNH ne veulent plus dire la même chose qu’avant.

Oettinger l’a dit crûment :

« Les taux vont descendre et je ne suis pas sûr que ça reviendra au niveau d’avant. »

Les .860 et .870 d’aujourd’hui ne représentent pas la même choses que les .860 d’il y a cinq ans. Les gardiens n’arrêtent pas moins de rondelles. Les statistiques les enregistrent différemment.

C’est tout le système qui a été reprogrammé.

Et les premiers à tomber dans le piège ont été ceux comme Montembeault : les gardiens moins talentueux et une machine statistique qui efface trois ou quatre arrêts « invisibles » par soir.

Et pour Montembeault, que tout Montréal a joyeusement traîné dans la boue depuis un mois, c’est peut-être le premier rayon de lumière depuis longtemps.

L'excuse la plus pauvre de l'année? Absolument,

Reste que les paris sportifs ont changé la LNH. Et Sam peut maintenant expliquer pourquoi il est devenu un fromage suisse rempli de trou... du jour au lendemain...