Geoff Molson l’a confirmé : le Canadien de Montréal sera actif cet été sur le marché des joueurs autonomes sans compensation. Et pour la première fois depuis longtemps, il a un plan. Un vrai. Un plan qui contourne les impôts.
Ça peut sembler banal pour un partisan. Mais dans le monde de la LNH, c’est capital. Montréal est un cimetière fiscal.
Le pire endroit en Amérique du Nord pour un athlète professionnel. Les impôts peuvent amputer jusqu’à 54 % d’un salaire au Québec.
C’est simple : pour offrir 6 millions nets à un joueur, il faut lui en proposer presque 13. Un cauchemar pour les directeurs généraux… sauf si on connaît les bonnes ficelles.
Le vénérable Réjean Tremblay a soulevé un point crucial sur Punching Grace.
" Quatre équipes sont dans le carré d’as. Le Texas, la Floride et l’Alberta n’ont pas d’impôts d’état ou de province. La Caroline du Sud aura un taux maximal de 3,9%."
Et c’est là que le discours de Geoff Molson devient intéressant. Très intéressant.
Lors d’un événement caritatif au Centre Bell, le proprio du CH a lancé une bombe déguisée dans un costume cravate :
« Il y a des moyens d’éviter que les joueurs soient trop pénalisés fiscalement au Québec. » Boum.
Il n’en fallait pas plus pour que les rumeurs d’une offensive estivale s’emballent. Sam Bennett. Matt Duchene. Peut-être même un nom encore plus gros.
Ce que Molson n’a pas dit — mais qu’on devine —, c’est que le Canadien s’apprête à utiliser l’arme des Ducks d’Anaheim : les salaires différés.
Une détournement parfaitement légale, qui permet de repousser une partie du paiement d’un joueur à après sa carrière… lorsqu’il ne vivra plus au Québec.
Frank Vatrano, par exemple, a signé pour 3 millions par an pendant trois ans à Anaheim. Mais il touchera 9 millions supplémentaires… entre 2035 et 2045. Pas un sou de ce montant n’est imposable en Californie.
Il sera probablement versé quand Vatrano habitera la Floride ou l’Arizona. Résultat : une économie d’impôt colossale pour le joueur.
Et ça, c’est la clé. Pour convaincre un gars comme Sam Bennett de s’exiler au Québec, il faut lui proposer une compensation. Pas seulement un bon contrat. Un contrat structuré de façon à réduire son fardeau fiscal.
Il sera facile de lui offrir 8 millions et plus avec du salaire différé.
Pourquoi Bennett? Parce qu’il est exactement ce qu’il manque au CH. Un deuxième centre, robuste, expérimenté, capable de performer en séries. Un gars capable de jouer du hockey de printemps, pas juste de remplir les filets en février.
Avec Suzuki et Bennett, Montréal aura un quatuor de centres capable de rivaliser avec n’importe quelle équipe de la LNH. Et surtout, capable de protéger Lane Hutson, de compléter Demidov, et d’offrir à Slafkovsky le partenaire dont il a besoin.
Bennett est né en Ontario. Il connaît le marché canadien. Il n’a pas peur de la pression. Il est en pleine force de l’âge. Et s’il quitte la Floride, ce sera pour du sérieux.
Matt Duchene pourrait aussi être une option. À 34 ans, il est dans une autre phase de sa carrière. Il cherche un dernier gros contrat, mais veut surtout jouer pour gagner. Et l’idée d’un retour au Canada — après avoir snobé Montréal en 2019 — pourrait le séduire si l’équipe montre une vraie ambition.
Duchene pourrait signer un contrat court terme, à 7 ou 8 millions $ avec du salaire différé. Un pont parfait entre le présent et l’avenir.
Ce que Duchene veut, c’est une chaise dans un projet crédible. Il l’a dit : à ce stade-ci de sa carrière, ce n’est pas l’argent qui parle. C’est la vision. Duchene, c’est une version mature de ce que le CH a toujours cherché sans jamais trouver : un centre vétéran, rapide, pas cassé, pas diva. Et cette fois, l’occasion est trop belle pour la laisser filer.
Si Sam Bennett et Matt Duchene représentent des cibles médiatiquement séduisantes, Brock Nelson, lui, est peut-être la perle rare que personne ne voit venir.
Moins coûteux, moins bruyant, mais diablement plus constant. À 6’4, gaucher, deux sens de la patinoire irréprochables, trois saisons de 30 buts ou plus… Nelson est un centre pur, un vrai, qui rend chaque trio meilleur sans demander l’attention.
Et contrairement à Bennett, il ne fera pas sauter la banque. Déjà, son entourage a laissé entendre qu’il ne restera pas au Colorado, où l’offre contractuelle ne serait pas à la hauteur.
C’est maintenant que Kent Hughes doit frapper. Nelson coche toutes les cases. Il n’est pas une star instable, ni un mirage de potentiel : c’est un pilier, un joueur mature, intelligent, sobre, mais indispensable. Si Montréal veut devenir un club sérieux, c’est ce genre de signature qui change tout.
Le CH pourra donc régler son problème de centre... mais aussi de défenseur droitier. Aaron Ekblad est sur toutes les lèvres.
Ignorez les blessures passées, regardez plutôt ce qu’il représente encore aujourd’hui : un défenseur droitier top-4, champion, capable de jouer 24 minutes par soir sans flancher.
À 29 ans, Ekblad n’est plus le jeune prodige de 18 ans qui faisait trembler les vitres en Floride. Il est devenu un vétéran solide, intelligent, et parfaitement positionné pour offrir de la stabilité au côté de Lane Hutson ou Kaiden Guhle.
Oui, il coûtera cher. Mais le Canadien peut jouer la carte du salaire différé pour compenser l’impôt québécois. Et dans une ligue où les défenseurs fiables se font rares, Ekblad devient une cible logique. Surtout si le CH veut redevenir une vraie équipe de séries dès maintenant.
Depuis des décennies, les Canadiens se faisaient snober sur le marché des joueurs autonomes. Trop d’impôts. Trop de pression. Trop de neige. Pas de langue. Pas de femmes.
Mais pour une fois, le club semble prêt à jouer avec les vraies règles de la game.
Pas celles du hockey. Celles de la fiscalité. Celles du long jeu. Celles du business.
Geoff Molson a beau dire que la meilleure arme, c’est d’avoir une bonne équipe, il sait aussi que les vedettes regardent le chèque net avant le classement.
Et si Kent Hughes réussit son coup cet été, ce sera peut-être grâce à cette petite phrase lâchée par Molson dans un lunch d’apparence banale : « Il y a des moyens de contourner les impôts. »
Oui. Montréal est enfin dans la partie.
Dans un rare moment de transparence calculée, Geoff Molson a sorti la machinerie lourde et s’est permis de rêver publiquement.
Oui, le propriétaire du Canadien de Montréal croit que son équipe peut maintenant attirer des joueurs autonomes. Et il ne parle pas de seconds couteaux ou de vieux guerriers à la retraite déclarée. Il parle de VRAIS joueurs. De ceux qui changent le cours d’une saison.
« Montréal est une destination attrayante », a lancé Molson, tout sourire, en marge d’un lunch de la Fondation des Canadiens.
Et quand un propriétaire sort une déclaration aussi directe, c’est qu’il sait que son directeur général a des munitions. Beaucoup de munitions.
Il a enchaîné :
« Les joueurs veulent gagner. Et quand ils voient autant de jeunesse et de talent, ils savent que le futur est ici. »
Molson a dit la phrase que tout le monde attendait.
Et ce n’est pas une coïncidence si David Savard, fraîchement retraité, était présent pour en rajouter :
« Le Canadien est une des meilleures organisations de la ligue. C’est familial, respectueux. J’en parle à tous les gars que je croise. »
Le message est clair : le CH veut redevenir une destination. Et il est prêt à se battre avec les mêmes armes que la Floride, le Texas, le Nevada.
Les autres noms à surveiller :
Nikolaj Ehlers, si Winnipeg ne parvient pas à le retenir. Vitesse, talent, polyvalence. Et le meilleur ami de Patrik Laine. Un ailier gauche parfait pour le 2e trio.
Brock Boeser, séduisant mais plus difficile à insérer dans l’alignement montréalais.
Tous ces joueurs ont une chose en commun : ils sont accessibles, mais pas sans plan. Et enfin, Montréal semble en avoir un.
Geoff Molson le sait : l’impôt, la neige, les médias, tout ça, c’est surmontable. Ce qui est irréversible, en revanche, c’est une réputation de perdant. Et cette réputation est en train de changer. Lentement. Mais sûrement.
Cet été, le CH pourrait écrire un nouveau chapitre. Pas avec un feu d’artifice. Mais avec une signature intelligente. Une première pièce dans le puzzle.
Et si cette pièce s’appelle Sam Bennett, Brock Nelson ou Matt Duchene, ce n’est peut-être que le début.