Silence à Bratislava : Juraj Slafkovsky n’est plus le bienvenu

Silence à Bratislava : Juraj Slafkovsky n’est plus le bienvenu

Par André Soueidan le 2025-05-09

C’est un silence qui hurle. Un silence qui, dans un pays aussi passionné que la Slovaquie, en dit long. 

Juraj Slafkovsky n’a pas été invité publiquement. Il n’a pas été réclamé. Il n’a pas été défendu. Et ce qui aurait dû être un grand retour au pays pour l'enfant prodige, le héros de 2022, s'est transformé en une absence feutrée, gênante, mais volontaire.

Juraj Slafkovsky ne représente pas la Slovaquie au Championnat du monde de hockey.

Officiellement, tout va bien. Il dit avoir eu une bonne discussion avec Miroslav Šatan.

Il dit que la fédération a accepté sa décision. Il dit qu'il veut reposer son corps. Mais personne n’y croit vraiment. Pas dans un pays où l'on ne rate jamais une occasion de briller sur la scène internationale.

Ce qui se passe ici, c’est une cassure. Une vraie. Une douloureuse.

Parce que Slafkovsky a parlé trop fort, trop tôt, trop honnêtement.

En octobre 2024, il a qualifié les médias de son pays de "toxiques". Il en avait assez qu'on lui colle l'étiquette de bust.

Il en avait assez d'être jugé sans filtre, décortiqué comme s’il était une déception nationale. Et il l’a dit. Devant caméras. En entrevue. Sans demi-mesure.

Résultat? Il a été crucifié dans les journaux. 

Même ses anciennes gloires, des analystes retirés, l'ont traité d'ingrat. Il a été dépeint comme un enfant-roi de la LNH, trop précieux pour sa patrie. Le backlash a été foudroyant.

Et aujourd’hui, c’est comme si personne ne voulait se mouiller.

Aucune déclaration officielle du vestiaire slovaque. Aucun mot du coach. Rien. Juste ce silence. Ce genre de vide gênant qui dit tout sans qu’on ait besoin de le répéter. Slaf n’est pas là. Et personne ne le demande.

Pendant ce temps, la Slovaquie se fait démolir 5-0 par la Suède, pendant que Slafkovsky fait du cardio discret au Complexe Bell, entre deux apparitions commanditées pour le Canadien de Montréal.

Et dans les chaumières de Bratislava, on préfère blâmer son absence que dénoncer le naufrage.

Il faut dire que le joueur de 6 pieds 4 a tout fait pour sortir de la spirale. Cette année, malgré un début de saison encore flou, Slafkovsky a répondu. 

Il a marqué. Il a établi une chimie réelle avec Nick Suzuki et Cole Caufield. Il a été là quand le CH en avait besoin. Il a été constant, impliqué, énergique. Mais pas assez pour guérir une relation politique avec son pays.

Parce que ce n'est plus une simple histoire de hockey. C’est une guerre de narratif.

Slafkovsky a pris position contre les médias slovaques. Et les médias slovaques ne pardonnent pas. C’est personnel. C’est culturel. C’est viscéral. Et même si la fédération tente de calmer le jeu, le mal est fait.

Il faudra du temps. Il faudra peut-être des excuses. Peut-être une médaille olympique. Peut-être un changement de direction à la fédération. Peut-être rien de tout ça.

Mais pour l’instant, Juraj Slafkovsky est seul. Seul avec son talent. Seul avec sa franchise. Seul avec son chandail du Canadien, pendant que son pays fait comme s’il n’avait jamais existé.

Silence à Bratislava. Et ce silence-là, c'est assourdissant.