Sueurs froides pour Martin St-Louis: son  plan sème le doute

Sueurs froides pour Martin St-Louis: son plan sème le doute

Par Nicolas Pérusse le 2025-09-22

Le plan de Martin St-Louis était limpide : que le Canadien attaque le calendrier préparatoire le couteau entre les dents.

Pas question d’attendre le 8 octobre pour commencer à jouer. Mais après vingt minutes à Montréal, les partisans du CH restent sur leur appétit.

Face à une équipe des Penguins amputée de ses vedettes, presque digne d’un alignement de Ligue américaine, Montréal a peiné à suivre le rythme. Jeu décousu. Revirements coûteux. Zéro cohésion. Et un premier but accordé qui fait grincer des dents.

Oui, on peut parler d’un ajustement nécessaire au rythme. Mais c’est la même chose pour Pittsburgh. Et eux, malgré un effectif B ou même C, dictent l’allure.

Pour un Canadien qui arrive du camp le plus brutal des dernières années, la surprise est de taille.

Car depuis une semaine à Brossard, le ton est clair : Martin St-Louis n’a pas ménagé ses troupes. Patin intensif. Enchaînements sans pause. Consignes criées avec une urgence nouvelle.

Le coach, autrefois philosophe, a tourné la page. Fini les « ça prend du temps ». Cette saison, il ne veut pas attendre. Et il l’a prouvé en transformant son camp en véritable champ de bataille.

Les images ont frappé l’imaginaire. Des joueurs à bout de souffle après dix minutes. Des vétérans incapables de répondre verbalement aux consignes.

Kirby Dach, colosse du top 6, assis sur la glace, plié en deux comme s’il allait vomir, simplement incapable de reprendre son souffle.

Même les jeunes aux poumons frais, même les vétérans réputés pour leur condition physique : tous rincés.

Ce n’était pas un accident. C’était voulu. St-Louis veut tester la limite de ses joueurs. Il veut des soldats prêts à souffrir dès septembre. Parce qu’il le sait : cette saison, plus question de parler de reconstruction.

Kent Hughes et Jeff Gorton ont bâti un noyau compétitif. Geoff Molson a mis la pression publiquement : il faut faire mieux que l’an dernier. Et l’entraîneur se retrouve sans excuses.

Mais à Pittsburgh, contre une équipe de seconde zone, la réalité a frappé. Montréal a semblé fatigué. Comme si l’énergie avait déjà été laissée sur la patinoire d’entraînement à Brossard.

Le trio Kapanen-Demidov-Laine, aligné pour donner le ton, n’a jamais trouvé son rythme. Le quatrième trio Evans-Anderson-Gallagher, conçu comme une carte d’identité de robustesse, n’a pas cassé la baraque.

Et derrière, les erreurs défensives se sont accumulées.

C’est là que la question se pose : est-ce que le Canadien est en train de répéter l’erreur du passé?

Les dernières saisons ont laissé des cicatrices. On se souvient des infirmeries pleines dès octobre. Des séquences interminables où Suzuki et Caufield devaient porter l’équipe avec des alignements amputés.

On se souvient de Dach perdu pour l’année après trois matchs. On se souvient des saisons coulées par des blessures en cascade.

Cette année, tout le monde reconnaît la profondeur du Canadien. Enfin, un alignement où les jeunes étoiles comme Demidov, Hutson, Beck et Bolduc peuvent s’ajouter à un noyau solide. Enfin, un top 9 offensif qui peut rivaliser.

Mais cette profondeur n’est pas infinie. On ne bâtit pas une saison sur des rappels de Laval. On ne gagne pas une course de huit mois si on épuise ses chevaux dès le départ.

Le cas Dach devrait être un signal d’alarme. On le ménage. On le protège. Parce qu’on sait qu’il est fragile, qu’il est précieux, qu’il doit être frais quand la vraie saison commence.

Mais pourquoi ce principe ne s’appliquerait-il pas à d’autres? Pourquoi forcer des joueurs à patiner comme s’ils jouaient une septième match de série au premier camp d’entraînement?

La saison de 82 matchs est un marathon. Pas un sprint. Et c’est ce que Martin St-Louis semble oublier dans sa guerre contre la mollesse.

Oui, il a raison de vouloir secouer son vestiaire. Oui, il faut exiger plus. Mais entre inspirer et épuiser, la ligne est mince.

Les partisans ne sont pas naïfs. Ils ont déjà vu cette équipe commencer trop fort, trop tôt, pour finir par s’écrouler en novembre. Ils savent qu’un vestiaire peut se fracturer quand les corps tombent les uns après les autres.

À Pittsburgh, le CH avait une occasion en or de montrer que cette intensité portait ses fruits. Au lieu de ça, il offre un début de match brouillon, où l’effort ne suffi pas à masquer le manque de rythme.

Et quand tu ne domines pas une équipe qui n’aligne même pas ses vedettes, ça fait mal à l’orgueil.

Peut-être que dans une semaine, l’histoire sera différente. Peut-être que le Canadien trouvera ses jambes, que l’intensité imposée à Brossard finira par payer. Mais pour l’instant, le doute s’installe.

Parce que la vérité, c’est qu’une saison peut basculer en octobre si l’infirmerie se remplit trop vite. Peu importe la profondeur, peu importe le talent, tu ne peux pas survivre à une hécatombe.

Et avec la cadence imposée depuis deux semaines, c’est exactement le risque que le CH court.

Martin St-Louis est en guerre contre la complaisance. Il refuse de revenir au rôle du coach gentil. Mais dans ce combat, il pourrait bien briser ses propres troupes avant qu’elles aient eu le temps de livrer bataille.

Ce soir, contre Pittsburgh, ce n’est qu’un match préparatoire. Mais c’est aussi un avertissement.

Si la rage de Martin St-Louis épuise ses joueurs plus vite que ses adversaires, alors le plus grand danger pour le Canadien ne viendra pas de la LNH. Il viendra de l’intérieur.

Et cette fois, aucune intensité ne suffira à réparer les corps brisés.