Tension au Mont-Tremblant: Martin St-Louis voit rouge

Tension au Mont-Tremblant: Martin St-Louis voit rouge

Par David Garel le 2025-09-03

Depuis deux ans, le Canadien de Montréal avait pris l’habitude d’amener ses joueurs au Mont-Tremblant avant le début de la saison régulière.

Une retraite fermée dans les Laurentides, destinée à bâtir la chimie, renforcer les liens dans le vestiaire et donner au groupe un moment à l’écart de la pression montréalaise.

Mais cette année, changement de plan : le CH ne retournera pas à Tremblant. Et peu importe les explications officielles évoquées, le calendrier, les matchs à Québec, les contraintes logistiques, la réalité est toute autre. C’est Martin St-Louis qui a tranché. C’est lui qui a fermé la porte.

Pourquoi? Parce que St-Louis n’a jamais aimé Tremblant.

Il faut revenir en arrière pour comprendre. À l’automne 2011, le Lightning de Tampa Bay, alors dirigé par Guy Boucher, avait tenu une retraite fermée… à Tremblant.

L’objectif, sur papier, était noble : souder le groupe, préparer mentalement l’équipe avant le coup d’envoi de la saison. Mais l’expérience s’est transformée en cauchemar pour plusieurs joueurs.

Boucher avait imposé un régime quasi militaire. Des push-ups après chaque exercice. Des entraînements interminables. Une discipline rigide qui frôlait l’humiliation.

Pour Martin St-Louis, capitaine respecté et légende du Lightning, c’était inacceptable. Il voyait dans ces méthodes une façon de briser ses coéquipiers, pas de les renforcer. La tension a monté au point où St-Louis s’est directement adressé à Steve Yzerman, le directeur général, pour dénoncer les méthodes de Boucher.

Ce moment a été un tournant. Le lien entre St-Louis et Boucher s’est fracturé définitivement. Deux ans plus tard, Boucher était congédié.

Les résultats sur la glace expliquaient une partie de la décision, mais dans les coulisses, le bras de fer avec St-Louis avait aussi pesé lourd. Tremblant est resté dans sa mémoire comme le décor d’un abus, d’un conflit, d’un affrontement.

Quand St-Louis est revenu à Tremblant en tant qu’entraîneur-chef du Canadien, il n’a pas pu cacher ses souvenirs. Interrogé par un journaliste sur l’épisode Boucher, il s’était contenté d’un « Ouin » néprisant, comme pour dire : oui, je m’en souviens, mais je préfère ne pas en parler. Tout le monde avait compris.

Lors du boot camp de Tremblant en 2011, Guy Boucher avait imposé à ses joueurs du Lightning une série d’activités dignes d’un entraînement militaire :

Des push-ups obligatoires après chaque exercice, qu’il s’agisse d’un simple drill de passes ou d’un retour défensif,

Des séances de patinage épuisantes pour tester l’endurance,

Un régime d’entraînement sans répit, avec peu de pauses et une intensité maximale,

Des exercices de discipline collective, où la moindre erreur d’un joueur entraînait une punition pour tout le groupe.

Le tout avait été perçu par Martin St-Louis et plusieurs vétérans non pas comme un moment de cohésion, mais comme une humiliation inutile et contre-productive, transformant Tremblant en un souvenir cauchemardesque.

Pourtant, l’ambiance n’avait rien à voir. Le CH avait vécu des moments conviviaux : un bon souper d’équipe, des entraînements intenses mais ciblés, un camp qui avait plu aux joueurs. «

Hier, on a passé une belle journée, on a eu un bon souper. Aujourd’hui, on est au travail », avait déclaré St-Louis l’an dernier. Plus encore, il avait même confié :

Cette année, le Canadien change de plan. Officiellement, c’est une question de calendrier : le CH affrontera les Sénateurs le 30 septembre à Québec, puis les recevra le 4 octobre à Montréal pour clore son calendrier préparatoire.

Comme l’équipe sera déjà dans la région de Québec, l’idée d’une retraite à proximité (Lac-Beauport, Lac-Saint-Charles, Stoneham) circule. Renaud Lavoie en a même parlé sur BPM Sports.

Mais la vérité est plus simple. Tremblant est rayé de la carte. St-Louis n’a aucune envie d’y retourner. Il a pris sa revanche sur ces lieux en y retournant deux ans de suite.

Tremblant restera pour lui un souvenir empoisonné : le décor du « boot camp » humiliant de Boucher, la cassure entre un capitaine et son coach, le moment où il a dû trahir l’autorité de l’entraîneur pour protéger ses coéquipiers.

St-Louis peut invoquer les contraintes logistiques, le calendrier surchargé, ou même le désir de varier les destinations. Mais personne n’est dupe. Tremblant était devenu un symbole, et il refuse de s’y associer plus longtemps.

Ce choix envoie un double message :

À son vestiaire : il n’imposera jamais à ses joueurs ce qu’il a lui-même vécu. Pas de méthodes punitives, pas de boot camp humiliant. Sa philosophie repose sur la confiance, la responsabilisation et la communication.

À Guy Boucher : il reste aux commandes, et il n’oublie rien. Le temps a passé, les rôles se sont inversés, mais la cicatrice demeure.

Paradoxalement. ce rejet profite aux amateurs de hockey de Québec. Comme l’équipe devrait rester dans la région après son match contre les Sénateurs, le public pourrait voir davantage de réguliers sur la glace, plutôt que des alignements allégés. 

Dans les dernières années, les vétérans étaient parfois protégés lors des derniers matchs préparatoires. Mais cette saison, il est probable que plusieurs gros noms participent aux rencontres, ce qui offrira un meilleur spectacle à la foule du Centre Vidéotron.

Au bout du compte, ce dossier est révélateur du caractère de Martin St-Louis. Il avance, mais il n’oublie pas. Tremblant, pour lui, ce n’est pas un site touristiqueoù l’on construit l’esprit d’équipe.

C’est le souvenir amer d’un conflit avec Guy Boucher, le lieu où il a vu ses valeurs piétinées. Aujourd’hui, en tant qu’entraîneur, il a le pouvoir de choisir. Et il choisit de dire non.

Tremblant restera à jamais associé à Boucher. Et tant que St-Louis sera derrière le banc du Canadien, il n’y retournera plus.

Parce que dans le hockey comme dans la vie, certains lieux sont marqués au fer rouge. Et Tremblant, pour Martin St-Louis, est le symbole de ce qu’il rejette.