Tension dans le vestiaire: Martin St-Louis marche sur des oeufs

Tension dans le vestiaire: Martin St-Louis marche sur des oeufs

Par Marc-André Dubois le 2025-08-03

Le ton est donné. Le message est clair. Le vestiaire du Canadien de Montréal, jadis bercé par la patience et les promesses d’avenir, est désormais un champ de bataille.

Exit les passe-droits et les places garanties : la compétition est partout, intense, tranchante. Et le premier champ de ruine de cette guerre interne, c’est l’avantage numérique.

Depuis que la saison morte a donné lieu à un vent de renouveau, l’ajout de Noah Dobson, de Zachary Bolduc, l’émergence attendue d’un Lane Hutson encore plus dominant, et surtout l’explosion annoncée d’Ivan Demidov, l’organigramme du CH croule sous le talent.

Trop de joueurs pour trop peu de postes de prestige. Résultat? Des confrontations directes, des tensions sportives, et un Martin St-Louis qui devra trancher dans le vif.

Le cas Demidov : l’enfant prodige… sur la deuxième unité?

C’est peut-être la décision la plus controversée de l’été : Ivan Demidov, le joyau de la reconstruction, ne commencerait pas la saison sur la première unité d’avantage numérique.

Du moins, c’est ce que laisse entendre l’un des observateurs les plus écoutés du marché montréalais. À en croire ses projections, ce n’est pas le jeune Russe qui accompagnera Nick Suzuki, Cole Caufield, Juraj Slafkovský et Lane Hutson, mais bien Patrik Laine.

Un coup de tonnerre. Un affront pour certains. Une leçon de méritocratie pour d’autres.

Car si la logique sportive militait pour la continuité, le jeune Demidov avait brillé en fin de saison passée, intégrant la première vague en séries et affichant un instinct de marqueur élite, Martin St-Louis semble vouloir tester sa recrue. La ralentir volontairement. Comme il l’avait fait avec Lane Hutson, forcé de « gagner sa place » malgré l’évidence de son talent supérieur.

Aujourd’hui, c’est Demidov qui subit le même sort. Lui qui rêvait de commencer la saison au sommet du jeu de puissance se retrouverait, selon les alignements projetés de DailyFaceoff et The Athletic, sur la deuxième unité. Pas une punition, certes… mais une mise au défi.

Et pendant ce temps, celui que tout le monde croyait sur le départ, celui qu’on disait rejeté du vestiaire, dont le mariage avait été boudé par les vétérans du CH, est non seulement toujours là… mais il est désormais au cœur du groupe.

Patrik Laine a renversé la vapeur comme rarement un joueur n’a su le faire à Montréal. On le disait absent. Il est le premier à Brossard chaque matin.

On le disait marginalisé. Il est sur toutes les photos de groupe, à Osheaga, au mariage de Nick Suzuki, dans les bars avec les gars. On le disait fini. Il est sur la première unité d’avantage numérique, avec les Suzuki, Caufield, Slafkovský et Hutson.

Ce que peu avaient vu venir, c’est que Laine ne se contente pas d’être présent. Il envoie un message. Il veut gagner. Il veut rester. Et il veut reprendre son trône comme tireur d’élite.

L’an dernier, il a marqué 15 de ses 20 buts en avantage numérique. Ce n’est pas un hasard s’il est en train de damer le pion à Demidov pour la fameuse chaise de sniper du cercle gauche.

C’est un retour spectaculaire. Un pied de nez à Mathias Brunet, qui affirmait que Kent Hughes le « refilait contre n’importe quoi ».

Un désaveu implicite de Martin St-Louis, qui n’a jamais caché son inconfort avec le profil de Laine. Mais surtout, c’est une gifle symbolique à tous ceux qui avaient enterré le Finlandais.

Dans cette dynamique explosive, Juraj Slafkovský se retrouve dans une position délicate. À 20 ans, il s’apprête à débuter la première année d’un contrat de 60,8 M$ sur huit saisons.

Les attentes sont immenses. Et malgré deux saisons respectables de 18 et 20 buts, il reste un projet. Un Éric Lindros en devenir. Mais plus en apprentissage.

Et lui aussi sent la pression de la concurrence sur ses épaules.

Il a passé l’été à travailler son tir, selon le journaliste Marco D’Amico. Il a transformé sa mécanique de lancer, perfectionné sa puissance, aiguisé sa rapidité d’exécution.

Il veut franchir un cap. Il doit franchir un cap. Parce que si Laine marque. Si Demidov s’impose. Si Bolduc surprend. Et si Slaf patine dans le vide pendant les 15 premiers matchs… le message sera brutal. Tu es bien payé, Juraj. Maintenant, performe.

Mais s’il y en a un pour qui la sonnette d’alarme commence à sonner, c’est bien Zachary Bolduc.

Depuis son acquisition des Blues de St. Louis, on s’attendait à ce qu’il se joigne rapidement à la clique montréalaise. Qu’il s’affiche avec ses nouveaux coéquipiers. Qu’il participe aux entraînements informels. Qu’il partage la glace avec Demidov, Dobson et compagnie.

Mais rien. Silence radio.

Pas de Bolduc à Brossard. Pas de Bolduc à Osheaga. Pas de Bolduc au mariage de Suzuki. Aucune photo, aucune interaction publique. Et ça fait jaser.

Car pendant que Laine s’assure de cimenter son lien avec l’équipe, Bolduc semble déjà en décalage. Et dans un vestiaire aussi compétitif, aussi jeune, aussi soudé que celui du CH en 2025, l’absence de lien humain peut coûter cher. Très cher.

Sur la glace, Bolduc a pourtant tout pour réussir. Il est projeté sur la deuxième unité de jeu de puissance, aux côtés de Demidov, Dobson, Gallagher et Suzuki qui s'est déjà arrangé avec Martin St-Louis pour jouer les deux minutes au complet.

Une deuxième unité de feu?

Si la première unité du CH fait rêver (Suzuki, Caufield, Slafkovský, Laine et Hutson), la deuxième unité pourrait être l’arme fatale inattendue.

Demidov peut porter la rondelle avec une aisance quasi poétique. Dobson est un quarterback moderne, capable de créer des jeux dangereux à répétition. Bolduc a un flair offensif à ne pas sous-estimer, Gallagher ne fait pas mal en "bumper". Et le tout donnerait une vague presque aussi dangereuse que la première.

C’est dire à quel point la profondeur du CH commence à ressembler à celle d’un véritable prétendant.

Martin St-Louis aura des décisions déchirantes à prendre. Le luxe, c’est qu’il peut se permettre de choisir parmi des joueurs de calibre élite. Le problème, c’est que chaque décision aura des conséquences.

Laisser Demidov sur la deuxième unité, c’est risquer de freiner son ascension. Mettre Laine sur la troisième ligne, c’est risquer de rallumer le feu. Accorder une place à Bolduc sans qu’il se soit imposé dans le groupe, c’est trahir les principes de la culture instaurée.

Mais c’est aussi ça, une équipe compétitive.

Et dans le cas du Canadien, c’est la première fois depuis une décennie que la compétition est aussi saine… et aussi féroce.

Excitant... et tendu comme jamais...