Au lendemain d’un match pré-saison contre les Leafs, où Noah Dobson semblait "mou", pour ensuite quitter le match de manière préventive pour préserver son aine, les critiques pleuvaient. Trop "soft". Trop smooth. Trop de glamour, pas assez de "grind".
Les partisans, les analystes, et surtout les anciens partisans des Islanders jubilaient sur les réseaux sociaux, validant en chœur les jugements tranchants de Patrick Roy.
Mais ce que personne n’avait prévu, c’est la contre-offensive soudaine, et massive, du Canadien de Montréal. Une réplique stratégique, émotionnelle, calculée.
Comme si Martin St-Louis et ses leaders avaient décidé qu’il était hors de question de laisser l’ancien protégé de Roy s’effondrer sans réagir.
Un réflexe protecteur, mais aussi politique. Car chaque mot prononcé cette semaine en faveur de Dobson était un uppercut lancé à distance… en direction de Long Island.
Un joueur critiqué… mais pas abandonné...
Martin St-Louis a pris la parole aujourd'hui pour rappeler que Dobson s’intégrait bien, qu’il apprenait vite, qu’il avait déjà démontré de la résilience et du courage.
Il n’a pas esquivé les critiques, mais il a rapidement détourné le narratif : ce n’est pas un problème Dobson, c’est un ajustement collectif. Un duo Matheson-Dobson en rodage. Une équipe encore en construction. Et surtout, un joueur qui n’a pas à porter tout le fardeau du haut de ses 25 ans.
Mais ce sont les propos du vestiaire qui ont frappé le plus fort.
Kaiden Guhle, d’ordinaire mesuré, n'a pas hésité à lui lancer des fleurs:
« Il a un bon instinct offensif. Il est solide et il n’a même pas l’air de forcer lorsqu’il patine. Et je suis en train de réaliser à quel point il a un bon positionnement en défense. Il est toujours bien placé et il bouge toujours son bâton. Il est déjà un membre important de notre équipe. »
Il n’a pas mentionné un mot sur l’intensité physique, comme pour effacer la critique centrale de Patrick Roy envers son ancien défenseur.
St-Louis et Guhle visent directement l’ancien coach des Islanders : Dobson est un All-Star. Pas un goon. Et c’est pour ça qu’on l’a voulu ici.
Lane Hutson, lui, n’a pas hésité à se montrer admiratif. Il a décrit Dobson comme une inspiration, une figure de stabilité, un défenseur qu’on veut imiter.
Une déclaration forte, venant du joyau le plus fragile et le plus prometteur de l’organisation. Quand Hutson dit qu’il veut apprendre de Dobson, c’est tout un message à la direction. Une façon claire de dire : je ne vois pas un problème devant moi, je vois un modèle.
Même Mike Matheson, qu’on sentait un peu déstabilisé par l’absence de chimie défensive avec Dobson, a tenu à calmer le jeu.
Il a répété que ce genre de soirée arrive à tous les défenseurs, qu’il fallait construire une connexion, pas s’attendre à une fusion instantanée.
Entre les lignes, il dit une chose : ce gars-là mérite le temps et la confiance. Ce qui est, à nouveau, un contre-discours direct au verdict brutal de Patrick Roy.
St-Louis n’est pas naïf. Il a vu les réseaux sociaux exploser. Il sait que la moindre erreur de Dobson va relancer le débat sur le jugement de Roy. Mais il a décidé de ne pas se laisser aspirer par ce cycle. En érigeant un mur protecteur autour de Dobson, il dit deux choses en même temps.
Premièrement, il protège son vestiaire. Il envoie le signal que personne, pas même un joueur critiqué de toutes parts, ne sera laissé à lui-même. Ce n’est pas un pays d’exil ici. C’est une équipe. Et si tu entres dans le cercle, on t’y garde.
Deuxièmement, et surtout, il envoie une flèche à Roy.
Le roi Patrick, qui a publiquement dénigré le jeu de Dobson. Roy, qui a demandé à Darche de l’échanger. Roy, qui a affirmé qu’il ne voulait pas bâtir avec un défenseur aussi soft.
En réponse, St-Louis bâtit autour de lui. Il lui donne Matheson comme partenaire. Il lui donne la deuxième vague en avantage numérique. Il lui donne du crédit, du temps de glace, et surtout, une voix.
Et le vestiaire suit. Parce qu’ici, au CH, on a décidé que ce n’était pas Roy qui allait dicter qui a une place ou non. C’est une forme de reprise de pouvoir. Et dans cette guerre froide entre St-Louis et Roy, Dobson est devenu malgré lui l’étendard de deux visions du hockey.
Roy, on le sait, veut des soldats. Des Romanov. Des gars qui bloquent des tirs avec la gorge et ne prennent pas de selfies après le match.
Sa critique de Dobson allait bien au-delà du jeu. Elle portait sur le style de vie. Sur la présence médiatique de sa conjointe Alexa Serowik.
Ce que Roy n’a jamais compris, ou n’a jamais voulu accepter, c’est que cette nouvelle génération "Tik-Tok/Instragram" existe. Et qu’elle peut performer. Dobson, dans sa carrière, a des saisons de 49 et 70 points. Il a déjà mangé des minutes de premier duo pendant des saisons entières. Il n’a pas été parfait, mais il a livré.
Ce que St-Louis tente de faire, c’est d’implanter une culture différente. Une culture où l’on peut être à la fois élite et peu physique. Où un défenseur peut être sur des stories Instagram et quand même performant.
Mais pour que ce modèle tienne, Dobson doit réussir. Il ne peut pas se permettre de ressembler à Jeff Petry post-2020. (version "lâche".
Sinon, le spectre de Roy va revenir hanter chaque défaite. Et chaque décision de St-Louis sera remise en question.
Mais si le vestiaire est uni, le monde médiatique, lui, est en train de se diviser.
Il y a ceux qui croient que Roy a raison. Que Dobson est trop soft. Qu’il ne tiendra jamais à Montréal. Qu’il est un défenseur offensif qui va s'écrouler à Montréal.
Et il y a ceux qui voient en Dobson une opportunité rare : celle d’avoir un défenseur de 25 ans, en pleine ascension et un profil unique au sein de la LNH.
Cette fracture reflète deux visions opposées. L’ancienne garde et la nouvelle. L’époque des gros défenseurs physiques contre celle des défenseurs-artistes.
Martin St-Louis a choisi son camp. Il l’a fait en prenant la défense de Dobson. En l’installant dès le jour 1 dans un rôle-clé. Et surtout, en orchestrant une mobilisation du vestiaire pour éviter que ce match contre Toronto ne devienne un procès.
Mais le combat ne fait que commencer.
Si Dobson veut éviter que sa saison devienne un règlement de comptes à distance entre Roy et St-Louis, il devra vite rebondir. Son prochain match vaudra plus que mille commentaires. Il devra montrer qu’il peut être ce quart-arrière tant attendu. Qu’il peut se relever, absorber les critiques, et imposer sa marque.
Le vestiaire du CH s’est mis en bouclier pour le protéger. Mais à Montréal, l’amour est conditionnel. Le public t’adopte… ou te rejette. Dobson a encore le luxe de l’anonymat partiel. Mais ça ne durera pas.
Roy a lancé la première flèche. Le Canadien a répondu par une muraille de soutien. Il ne reste plus qu’à Dobson de justifier ce mur.
Parce que la prochaine fois qu’il lèvera le pied sur un repli, ce ne sera plus Roy qu’on blâmera.
Ce sera Kent Hughes qui a sacrifié deux choix de 1ère ronde et Emil Heineman....