Transaction d'Adam Engstrom: Pascal Vincent sort de son silence

Transaction d'Adam Engstrom: Pascal Vincent sort de son silence

Par David Garel le 2025-09-10

Ça chauffe à Montréal.

Il y a des marchés où les rumeurs se consument vite. Et il y a Montréal, où elles deviennent des incendies de forêt.

Depuis deux semaines, le téléphone de la LNH n’arrête pas de crépiter autour d’Adam Engström. Le défenseur fait exploser le marché des transactions.

Dans ce vacarme, une voix s’est distinguée par son calme chirurgical: Pascal Vincent. Et ses phrases, choisies, valent plus qu’un démenti officiel.

Car oui, toute la ligue pose la question qui fâche: le Canadien bougera-t-il Engström pour fluidifier sa congestion à gauche?

Ici, on réagit souvent à l’émotion. Vincent, lui, répond par méthode. Et c’est précisément cette méthode qui devrait guider Montréal.

Commençons par le cœur du dossier: Engström n’est pas un « flash » d’été. Il est le produit d’un processus. C’est là que Vincent enfonce le clou. D’abord sur la pertinence d’exposer un jeune très avancé, même au camp des recrues:

« Même s’il a fini l’année avec le Canadien, je pense que de participer à un camp des recrues, c’est toujours bénéfique… Pratiquer, c’est une chose, mais d’être dans des situations de match, c’est différent. Donc, je pense qu’il peut bénéficier de cet environnement-là.»

On ne protège pas Engström de la compétition; on le nourrit avec. À l’inverse des organisations qui surprotègent leurs espoirs, Montréal pousse l’apprentissage dans le bruit, là où les décisions se prennent dans un demi-pas et une demi-seconde.

Et pour ceux qui exigent qu’un jeune « domine » absolument son camp pour mériter une promotion, Vincent corrige l’angle:

« On veut qu’il domine éventuellement dans la Ligue nationale… Ce que j’aimerais voir, c’est qu’à partir de la première journée, les concepts qu’on va enseigner… des bons bâtons, des bons positionnements sans la rondelle… Pour développer un joueur, il faut qu’il soit capable de jouer dans les deux sens. »

Ça paraît anodin. C’est capital. Montréal ne cherche pas un champion de highlights de septembre. Montréal cherche un défenseur NHL dans tous les domaines: lecture, écarts, premières passes, gestion du risque. Or c’est précisément ce qu’Engström a montré au printemps: le flamboyant qui apprend à choisir quand il flambe.

Vient ensuite la question que tout le monde pose en chuchotant: Est-il prêt?

Vincent ne tourne pas autour du pot:

« Je pense que oui. Il est prêt à cogner à la porte de la Ligue nationale. »

Et puis, la ligne qui devrait être placardée dans chaque bureau où l’on bricole des offres:

« Un joueur peut graduer trop rapidement, mais il ne peut jamais graduer trop tard. »

C’est la doctrine anti-panique. Elle protège contre deux pièges simultanés: précipiter un jeune par marketing… ou l’enterrer par logistique.

Engström n’a pas besoin d’être catapulté sur une première paire en octobre; il a besoin d’une porte ouverte à laquelle frapper tous les soirs. Et si la poignée tourne, c’est parce qu’il l’aura gagnée, pas parce qu’un vétéran s’est blessé.

Les rumeurs disent tout et leur contraire. Les salles vidéo, elles, ne mentent pas. Là encore, Vincent tranche:

« Si on n’entend pas parler d’Engström] à l’extérieur, à l’intérieur, on en parle beaucoup. C’est un joueur qui a été dominant pour nous en séries… contre une équipe plus vieille, plus physique, rapide… il est ressorti dans ces moments-là de façon spectaculaire. »

« Dominant », « ressorti », « spectaculaire ». Trois mots qui, mis bout à bout, expliquent pourquoi Kent Hughes s’obstine, avec raison, à ne pas sacrifier Engström en monnaie d’échange.

Ce n’est pas un pari lointain. C’est une pièce active d’un puzzle moderne: sortie de zone propre, transition qui raccourcit le match, calme sous pression.

La devise actuelle de la LNH est simple: si tes ailiers touchent la rondelle en accélération, ta défensive travaille bien. Engström, c’est de la valeur au-delà de ses points.

Bien sûr, la congestion à gauche est réelle: Matheson, Guhle, Hutson, Struble, Xhekaj… et Engström qui cogne.

La tentation est grande de « monétiser » l’un de ces noms pour combler un besoin au centre. Mais c’est justement là que la phrase-boussole de Vincent doit guider l’état-major:

« La prochaine étape, c’est de solidifier ce qu’on a fait jusqu’à présent. »

Solidifier, pas diluer. La reconstruction du CH a franchi un cap: on ne vend plus cher l’avenir pour acheter une illusion de présent.

Engstrom est intouchable.

Ça peut vouloir dire bouger Matheson, Struble ou Xhekaj dans un "package deal" seulement si le retour ramène un 2e centre.

Montréal est un marché où un bon match de recrues devient un coup de circuit émotionnel. Vincent, encore, ramène tout à l’exécution:

« À partir de la première journée, je veux voir comment il peut exécuter… Ce n’est pas nécessairement offensif et flashy, mais des bons positionnements sans la rondelle. »

Engström, de ce point de vue, coche toutes les cases: défendre plus haut à la ligne bleu, fermer la ligne de passe avant de fermer l’angle de tir, sortir en contrôle plutôt qu’en dégagement aveugle. C’est ça qu’achètent les équipes qui appellent. C’est ça que Montréal doit refuser de vendre à rabais.

Même si les Penguins l'exigent pour Sidney Crosby.

On pourrait balayer d’un revers de main: « c’est Laval, c’est la AHL, calmons-nous ». Ce serait rater le sens des propos de Vincent.

Il rappelle qu’Engström a explosé dans la partie la plus difficile du calendrier: les séries. Quand les lignes se resserrent, que les arbitres avalent le sifflet, que ça joue sale dans les coins, il a ressorti. Ça, dans un bureau de DG, pèse plus lourd que trois feintes YouTube en novembre.

Et il ajoute l’élément intangible dont on parle trop peu: l’intelligence.

« C’est allé très rapidement parce que c’est un jeune homme très brillant. »

Brillant comment? Brillant dans l’adaptation: nouveau continent, nouvelle largeur de glace, nouvelles habitudes d’ailiers, nouvelles sorties MSL-style.

Ceux qui réussissent, ce sont les joueurs qui apprennent vite. Engström vient de démontrer qu’il appartient à cette catégorie.

Contrairement... à Arber Xhekaj... qui apprend à vendre des burgers qui portent son nom , mais qui s'effondre quand Martin St-Louis lui dit d'appliquer ses concepts.

Alors, que faire de la rumeur? L’utiliser. Laisser les appels venir, écouter, évaluer… et tenir la ligne. Le CH n’est plus dans la posture défensive d’une équipe qui « doit » échanger un bon jeune en panqiue.

Montréal est dans la posture d’une équipe qui choisit quel type de défenseur incarne son identité: mobile, tête froide, sortie propre. Engström est un défenseur complet... pour la prochaine décennie minimum.

Vincent nous a donné la phrase qui veut tout dire: « Trop vite » est un risque; « trop tard » ne l’est pas.

Garder Engström, c’est accepter que la décision la plus difficile est aussi la plus payante: bouger un autre nom populaire, si le retour est bon… et installer Engström parce que le jeu, pas la rumeur, le commande.

Même si Struble est apprécié de St-Louis. Même si Xhekaj fait vendre des chandails. Même si Matheson est le Montréalais chouchou.

La ligue s’excite: un défenseur de 21 ans qui transforme la sortie de zone en une show, c'est rare.

Montréal résiste de le sacrifier via transaction. Peu importe la rumeur l'envoyant à Pittsburgh...

La voix de Pascal Vincent a stoppé le brouhaha pour rappeler les principes simples qui empêchent les reconstructions de dérailler.

Il veut l'exposer dans le chaos des matchs, pas seulement dans le confort des pratiques.

Évaluer les concepts défensifs avant les feux d’artifice.

Assumer qu’à l’intérieur, le verdict sur Engström est connu: il est intouchable.

La rumeur fait vendre des clics. La méthode fait gagner des matchs.

Dans ce dossier, Montréal doit être sourd à la première et fidèle à la seconde.

Engström n’a pas besoin d’un communiqué pour mériter sa place; il a besoin d’une glace et d’une mission. Donnez-lui les deux. Et si le prix d’entrée est de déplacer un autre défenseur pour que la chaise existe, alors ayez le courage de le faire.

Matehson Struble ou Xhekaj finira par partir. C'est écrit dans le ciel.