Transaction Montréal-Anaheim: des recruteurs parlent sous le couvert de l'anonymat

Transaction Montréal-Anaheim: des recruteurs parlent sous le couvert de l'anonymat

Par Marc-André Dubois le 2025-06-20

C’est un désastre. Un vrai. Et cette fois, même les plus fervents défenseurs de Kent Hughes commencent à perdre patience.

Le ciel est en train de tomber sur la tête du Canadien de Montréal. Et tout ça à cause d’un terrible malentendu sur la valeur de ses choix de première ronde, ces fameux 16e et 17e choix que la direction brandit comme des joyaux. Or, dans les bureaux des autres clubs, ces choix sont perçus comme… du "stock" de bas-étage.

Et c’est là que le cauchemar prend forme : les Ducks d’Anaheim, qui semblaient ouverts à une transaction pour Trevor Zegras, viennent de claquer la porte. Fini. Terminé. Logan Mailloux et un des deux choix de milieu de première ronde? Insuffisant. Ridicule, même.

Le CH s’est peut-être vu trop beau.

Depuis des semaines, Kent Hughes tente de bâtir une transaction autour de ses deux choix de première ronde, croyant dur comme fer qu’ils ont une valeur marchande suffisante pour obtenir un joueur établi comme Trevor Zegras. Mais dans les coulisses de la LNH, le discours est tout autre.

Un recruteur de l’Est est cinglant :

« Les joueurs classés entre 11 et 20 cette année seraient entre 20 et 30 dans une bonne cuvée. Tu veux un "impact player" ? Bonne chance. Tu vas sélectionner un gars qui a 10 % de chances de faire sa marque. »

« Honnêtement, après le 12e rang, c’est un marécage. Si le CH pense qu’il va impressionner les Ducks avec le 16e choix, il rêve en couleur. »

Voilà pourquoi les Ducks reculent.

Le DG Pat Verbeek se rappelle très bien avoir vu Kent Hughes annuler une transaction à la dernière minute, lui qui offrait aux Ducks le 21e choix, plus Mailloux.

À l’époque, ils y avaient sérieusement réfléchi. Parce que la cuvée 2024 était plus solide. Mais aujourd’hui, avec une cuvée 2025 jugée par plusieurs comme « l’une des plus faibles en 10 ans », ils ne veulent rien savoir. Et ils n’ont pas tort.

Ce qui choque le plus à Anaheim, c’est la gestion hasardeuse du dossier par le Canadien. Le camp de Zegras avait envoyé des signaux clairs : il était ouvert à une nouvelle aventure.

Il voulait jouer dans un grand marché. Montréal l’intéressait. Mais au lieu de frapper pendant que le fer était chaud, Kent Hughes a hésité car il ne voulait pas perdre Michael Hage. Il a voulu marchander à nouveau cette année.

Mais pendant ce temps, Pat Verbeek s’est refroidi. Les offres se sont asséchées. Et lorsque le CH est revenu à la charge avec une proposition réchauffée, Mailloux et le choix 16 ou 17, c’était déjà trop tard.

Un haut placé dans le département de recrutement des des Ducks a été cinglant envers Kent Hughes et Jeff Gorton :

« Ça fait amateur. C’est comme s’ils pensaient qu’on allait accepter n’importe quoi sous prétexte qu’ils ont deux choix collés. On cherche du top talent, pas deux billets de loterie. »

Ce qui rend la situation encore plus désespérante, c’est qu’à l’interne, certains membres du personnel hockey du CH avaient milité pour inclure un autre actif dans le deal.

Il avait été question, un moment, de glisser Owen Beck dans la balance. Mais Kent Hughes a refusé.

Les Ducks veulent maintenant autre chose. Quelque chose de plus. 

Mais il y a plus grave : le fait que le repêchage 2025 soit très faible expose le CH à une perte de crédibilité. Plusieurs directeurs généraux commencent à voir Montréal comme une équipe qui surévalue systématiquement ses actifs. Un DG de l’Ouest :

« Ils vendent du rêve. Mais en réalité, ils n’ont pas grand-chose à offrir. »

Surtout que Hughes et Gorton ne veulent rien savori de sacrifier leurs intouchables. Cole Caufield, par exemple, pourrait permettre d'aller chercher Caleb Desnoyers, mais encore là, les dirigeants du CH ne veulent rien savoir.

Tout cela survient dans un contexte où la cuvée 2025 est de plus en plus ridiculisée.

Un recruteur vétéran a été sans pitié :

« D’habitude, on a 5-6 gars par ronde qu’on est excités de repêcher. Cette année, rendu en troisième ronde, on pige à l’aveuglette. C’est la pire liste que j’ai vue en 15 ans. »

Et le pire? Même la profondeur physique manque dans cette cuvée. Le CH, qui veut se grossir à l’avant, réalise maintenant qu’il n’y a presque pas de « géants » disponibles après le top-10.

Jack Nesbitt, Mason West, Lynden Lakovic… Ce sont les seuls vrais gros bonshommes qui pourraient être disponibles.

« C’est une année où on a beaucoup d’attaquants de taille moyenne », résume un dépisteur.

Lakovic sera sûrement choisi avant le 16e rang (autour du 13e rang) alors que West et Nesbitt seraient des "long shot" au 16e ou 17e rang. 

Même les plus optimistes... semblent refroidis.

« Jusqu’au 12e rang, il y a des valeurs quand même assez sûres. Par la suite… c'est laid. » confirme un autre recruteur.

« La chute se fait à partir de 14 ou 15 ». 

Et c’est exactement pourquoi tant d’équipes veulent se débarrasser de leurs choix de milieu de ronde cette année. Elles veulent monter, ou échanger pour de l’aide immédiate.

À l’opposé, Montréal accumule ces choix comme s’ils étaient en or massif. Mais personne ne veut les racheter. Voilà la vérité brutale. Et c’est cette vérité que les Ducks viennent de renvoyer en pleine figure au CH.

Ce qui était censé être l’été de la consolidation devient un cauchemar logistique. Le plan Hughes-Gorton était clair : échanger un des choix du milieu de première ronde (ou les deux), ajouter Mailloux ou un autre prospect, et aller chercher un deuxième centre ou un ailier costaud. Zegras était au sommet de la liste réaliste.

Mais voilà que les Ducks font leurs capricieux. Est-ce que cela est du bluff? Est-ce qu'Anaheim joue une partie de poker pour que le CH améliore son offre et sacrifie Beck avec Mailloux?

Une chose est claire. Zegras, les Ducks n’en veulent plus aux conditions offertes... pour l'instant...

Pendant ce temps, le marché se referme. 

Et le plus humiliant dans tout ça? C’est que ces choix que le CH chérit tant sont considérés comme du remplissage.

« Les gars qu’ils vont pogner là ne sont pas NHL ready. Ce sont des projets de 3-4 ans minimum. Et ils n’ont même pas de garanties », résume un dépisteur.

Pire encore : à l’interne, certains commencent à remettre en doute la pertinence de garder les choix 16 et 17. Il y aurait de plus en plus de voix en faveur d’un échange, n’importe lequel, pour ne pas gaspiller deux premières rondes dans un repêchage considéré comme un cimetière.

Mais pour ça, encore faut-il trouver un acheteur.

Ce revirement a un effet immédiat : Kent Hughes perd du pouvoir sur le marché des transaction. S’il veut maintenant obtenir un centre top-6 comme Zegras, il devra sacrifier plus que Logan Mailloux. 

Owen Beck est alors sur toutes les lèvres.