La revanche de Kent Hughes est un plat qui se mange froid.
Alors que plusieurs journalistes ont accusé le directeur général du Canadien de Montréal d'avoir laissé passer l'occasion d'une vie en refusant de sacrifier le jeune espoir Jacob Fowler pour Yaroslav Askarov, Hughes doit aujourd'hui afficher un sourire en coin.
Askarov, considéré par beaucoup comme l'un des meilleurs espoirs à la position de gardien, vient d'être rétrogradé dans la Ligue américaine, malgré le fait qu'il ait été transigé aux Sharks de San Jose, une équipe pourtant en grande difficulté en LNH.
Ce revirement de situation est la preuve de la complexité du parcours des jeunes gardiens dans la grande ligue.
À Nashville, Askarov se sentait coincé derrière Juuse Saros. Frustré de ne pas obtenir sa chance, il avait demandé à être échangé, persuadé qu'il méritait un poste de numéro un.
Son vœu fut exaucé lorsqu’il rejoignait les Sharks, et beaucoup s'attendaient à le voir sauter directement comme numéro un des Sharks.
San Jose a pris la décision de le renvoyer dans Ligue américaine, optant pour la stabilité des vétérans Mackenzie Blackwood et Vitek Vanecek pour débuter la saison.
Cette décision a certainement jeté de l'eau froide sur les espoirs d'Askarov, qui avait fait savoir haut et fort qu'il voulait jouer dans la LNH.
Le jeune Russe, connu pour sa confiance en lui qui frise de l'arrogance, doit maintenant faire face à une réalité dure : ce sont les dirigeants de l’équipe, et non lui, qui décident de son avenir immédiat.
Alors qu’il pensait avoir trouvé sa voie hors de l’ombre de Saros, Askarov se retrouve encore une fois dans une position inconfortable, cette fois dans l’organisation des Sharks.
Mais si l’on regarde du côté de Kent Hughes, ce développement pourrait bien servir de justification à sa décision de garder Jacob Fowler.
Ce dernier est bel et bien l'héritier de Carey Price et occupe visiblement une place centrale dans les plans à long terme de l’équipe.
Pierre LeBrun avait révélé que les Predators de Nashville avaient demandé Fowler en échange d'Askarov lors des négociations entre les deux équipes.
Hughes avait alors refusé cet échange, provoquant la frustration d’une partie des partisans du Canadien, qui auraient voulu voir Askarov prendre la relève dans les filets montréalais, en particulier avec les incertitudes autour de Samuel Montembeault.
Aujourd’hui, alors qu’Askarov voit le ciel de la ligue américaine lui tomber sur la tête, la décision de Hughes prend une nouvelle dimension.
Le DG du Canadien pourrait bien savourer sa revanche en silence. Il a parié sur l’avenir de Jacob Fowler, un prodige en devenir et le futur risque de lui donner raison si Askarov continue de stagner dans les ligues mineures.
Quant à ceux qui l’ont critiqué pour avoir « dormi au gaz » en refusant Askarov, ils devront peut-être réviser leur jugement.
La relation entre Hughes et Pierre LeBrun semble également avoir pris un coup.
Le fait que LeBrun ait révélé ces informations sensibles comme quoi Hughes avait refusé d'envoyer Fowler à Nashville pourrait bien avoir enflammé la colère de Hughes, qui se retrouve sous le feu des critiques avant même que la saison ne commence.
Si Askarov venait à briller dans l'avenir, Hughes serait certainement la cible des mécontents, mais pour l'instant, il peut savourer cette petite victoire en voyant l'un des plus grands espoirs au poste de gardien relégué à la Ligue américaine.
Une chose est sûre : la tension autour de cette décision ne fera que grandir au fur et à mesure que la saison avance, et tous les regards resteront tournés vers la performance de Jacob Fowler avec Boston College.
En attendant, il faudra voir si Yaroslav Askarov va finir par changer son attitude. Car la confiance est une chose. L'arrogance mal placée en est une autre.
Barry Trotz, le directeur général des Predators de Nashville, aurait insisté avec une rare intensité pour inclure Jacob Fowler dans les négociations avec le Canadien de Montréal.
Trotz voit en Fowler bien plus qu'un simple espoir. Il est convaincu que ce jeune gardien possède toutes les qualités pour devenir un prodige dans les années à venir.
Malgré l'insistance de Trotz, Kent Hughes est resté ferme dans sa position, refusant de sacrifier ce que plusieurs voient comme une pièce maîtresse pour l'avenir du CH.
Trotz connaissait les enjeux et savait que l'acquisition de Fowler aurait pu bouleverser le futur des Predators. Hughes, pour sa part, voyait plus loin.
Il était conscient que céder un jeune gardien de cette trempe, encore méconnu mais plein de potentiel, pourrait coûter cher à long terme.
Pour Hughes, il était impensable de se séparer d'un joueur qui pourrait, dans quelques années, s'imposer comme l'un des meilleurs à sa position.
En refusant d'échanger Fowler pour Askarov, Hughes a pris un pari courageux, mais un pari qui pourrait bien se transformer en coup de maître.
Si Askarov continue de stagner, et que Fowler évolue comme prévu, ce sera un autre exemple de la vision à long terme du DG du Canadien, qui préfère bâtir solidement pour l’avenir plutôt que de succomber à la tentation de résultats immédiats.
Ce sont souvent ces choix difficiles, où la patience prime sur l'impatience, qui finissent par distinguer les grands bâtisseurs des simples gestionnaires.
Kent Hughes semble bien décidé à inscrire son nom dans la première catégorie. Dans les dents de Barry Trotz.