Tremblement à TVA Sports: le déménagement du CF Montréal s'annonce

Tremblement à TVA Sports: le déménagement du CF Montréal s'annonce

Par David Garel le 2025-03-24

Jean-Charles Lajoie est de retour là où il se sent le plus à l’aise : au centre d’une controverse enflammée. Quelques mois après avoir provoqué un tollé en évoquant un possible déménagement du CF Montréal à Détroit — une rumeur rapidement démentie par la direction du club — voilà qu’il relance le débat ans aucune pitié.

Et cette fois, le timing n’aurait pu être plus explosif : le congédiement de l’entraîneur-chef Laurent Courtois, à peine un an après son arrivée, vient jeter de l’essence sur le feu d’incertitudes qui entoure l’avenir de la franchise.

C’est désormais officiel : le CF Montréal en est à son 11e entraîneur-chef en 13 saisons en MLS. Une instabilité chronique qui mine les fondations du club et sème le doute jusque dans les gradins du Stade Saputo.

Pour Lajoie, cette instabilité n’est pas une anomalie. Elle est un signal d’alarme.

« Les résultats n’y étaient pas, c’est vrai, mais en même temps, on a dépecé encore plus cette équipe au cours de la saison morte », a-t-il clamé lundi sur les ondes de JiC à TVA Sports, en réaction à la nomination de Marco Donadel, ancien joueur du club, au poste d’entraîneur-chef.

Et dans le même souffle, Lajoie a remis au goût du jour la thèse d’une possible vente… ou d’un déménagement.

Détroit. Ce mot résonne dans la tête des partisans comme une menace sourde, un cauchemar réveillé par les propos du chroniqueur.

Au début de la saison, Lajoie avait affirmé que le CF Montréal était voué à être vendu à des intérêts américains, plus précisément à un consortium lié à la ville de Détroit — une ville qui, rappelons-le, tente depuis des années de s’approprier une franchise de la MLS.

À l’époque, ces propos avaient été balayés du revers de la main par les frères Saputo et leur entourage. Mais aujourd’hui, avec un nouvel entraîneur parachuté, une équipe sans âme sur le terrain, et une base partisane désabusée, la théorie semble regagner du terrain.

« J’ai vu de proche les Expos être dépecés avant d’être transférés. J’ai vu d’encore plus proche les Nordiques être dépecés avant d’être vendus, puis déménagés. Je n’aime pas pantoute ce que je constate d’une équipe que pourtant j’aime, et qui ne reviendra jamais à Montréal si elle devait quitter », a prévenu Lajoie dans une déclaration alarmante.

Sportivement, le CF Montréal est en crise. L’équipe enchaîne les défaites, le style de jeu est désordonné, et les gradins se vident peu à peu.

Plusieurs observateurs dénoncent le manque d’investissement dans l’effectif, la plus faible masse salariale de la ligue, et un projet sportif flou, voire inexistant.

À cela s’ajoutent les défis liés au climat : le nouveau calendrier de la MLS, aligné sur celui des ligues européennes, forcerait le club à disputer plusieurs matchs en hiver.

Or, le Stade Saputo ne possède pas de terrain chauffé, un choix économique datant de la construction, qui pourrait maintenant coûter très cher. Entre 10 et 15 millions pour le mettre aux normes.

Et ce n’est pas tout : le club n’est même pas propriétaire du terrain sur lequel il joue, ce qui limite considérablement sa capacité d’investissement à long terme. Une situation intenable pour certains, et surtout peu attrayante pour la ligue.

Lajoie joue avec le feu… mais reflète une inquiétude réelle...

On peut critiquer la méthode et le ton de Jean-Charles Lajoie — souvent accusé de jouer les prophètes de l’apocalypse pour faire grimper ses cotes d’écoute — mais son discours trouve un écho chez plusieurs partisans désillusionnés.

La disparition des Expos et des Nordiques a laissé des cicatrices profondes dans la mémoire collective québécoise. Et Lajoie le sait. Il appuie là où ça fait mal.

Sa déclaration selon laquelle « le CF Montréal ne reviendra jamais s’il quitte » sonne comme un avertissement glaçant.

Et ce n’est pas une exagération. Dans un marché MLS où l’expansion est pratiquement terminée, toute ville qui perd sa franchise ne pourra jamais espérer un retour.

Et Montréal, avec ses difficultés structurelles, son manque d’infrastructure et son désintérêt médiatique, devient un marché vulnérable.

Ironiquement, pendant que Lajoie sème le doute, les jeunes Saputo — Luca et Simone — prennent de plus en plus de place dans l’organigramme du club, multipliant les projets, les restructurations, et les collaborations avec Bologne FC.

Lors d’une entrevue avec La Presse, ils ont répété que leur avenir, leur passion et leur projet, c’est ici, à Montréal.

Mais cela suffira-t-il à rassurer les partisans, alors que l’instabilité sur le terrain s’accentue, que les résultats stagnent, et que le produit ne convainc plus?

Jean-Charles Lajoie a peut-être voulu jouer au lanceur d’alerte, mais à force de répéter que le CF Montréal est condamné à quitter, il finit par nourrir lui-même le monstre qu’il prétend combattre. Si les rumeurs persistent, si les fans décrochent, si les gradins se vident encore plus… qui pourra empêcher la prophétie de s’accomplir?

Le CF Montréal mérite mieux. Les partisans, les joueurs, les jeunes de l’académie… tous méritent un club enraciné, ambitieux, cohérent.

Mais si les dirigeants ne prennent pas les bonnes décisions rapidement — et si les figures publiques continuent de jouer avec la peur — le scénario Détroit pourrait cesser d’être une rumeur pour devenir une réalité.

Les signaux d’alarme se multiplient. Pendant que les partisans tentent de rester fidèles, les indices d’un désengagement progressif s’accumulent comme des nuages noirs au-dessus du Stade Saputo.

Depuis plusieurs mois, les activités du CF Montréal se diluent dans une communication censurée, où les questions difficiles sont esquivées.

À l’interne, plusieurs employés quittent, remplacés par des figures issues du réseau Bologne. En coulisses, certains agents et recruteurs évoquent un « club satellite », où les décisions sportives ne sont plus dictées par les réalités du marché montréalais, mais bien par la priorité européenne de Saputo.

Le malaise est évident  jusque dans le vestiaire. Des sources proches du groupe confirment que certains joueurs commencent à douter de la vision à long terme. Un joueur d’expérience aurait récemment confié à un collègue :

« On ne sait pas vraiment où on s’en va. »

Une phrase anodine en apparence, mais qui en dit long sur l’atmosphère générale.

Et comme si ce climat d’incertitude ne suffisait pas, les échos provenant de la MLS ne sont guère rassurants. La ligue, qui continue de miser sur des marchés en croissance comme San Diego alors que Las Vegas et Phoenix sont dans son viseur, voit en Détroit un potentiel commercial immense.

Un bassin de population passionné de sport, un centre-ville en plein renouveau, et surtout, deux groupes milliardaires prêts à investir sans compter.

À choix égal, Montréal n’a plus l’avantage.

Même le commissaire Don Garber, lorsqu’interrogé récemment sur l’avenir des marchés existants, a préféré éluder les cas spécifiques, rappelant que « la stabilité structurelle et l’investissement des propriétaires seront toujours les priorités de la MLS ».

Pas un mot sur Montréal. Rien. Le silence est assourdissant.

Et ce n’est pas tout.

Selon plusieurs observateurs, les discussions avec les diffuseurs américains se multiplient pour repositionner le calendrier en fonction de la NFL et de la NBA.

Dans cette logique, le marché canadien devient secondaire, voire négligeable. Un autre clou dans le cercueil d’un club qui peine déjà à capter l’attention des grands médias d’ici, toujours obsédés par le hockey.

Alors, que reste-t-il?

Un public passionné, oui, mais fatigué. Une académie pleine de promesses, mais sous-exploitée. Un stade au charme indéniable, mais technologiquement dépassé. Et une direction divisée entre l’héritage de Joey Saputo et les ambitions encore floues de ses fils.

Le CF Montréal marche sur un fil. Il lui faudrait une secousse, un geste fort, une réinvention radicale pour rallumer l’étincelle. Mais jusqu’ici, rien n’indique que ce virage soit amorcé.

Jean-Charles Lajoie, dans son style brut et polarisant, a peut-être mis le doigt sur une vérité que personne ne veut voir :

Le CF Montréal est en train de perdre sa pertinence.

Pas seulement sur le terrain. Dans le cœur du public. Dans la stratégie de la ligue. Dans le paysage sportif québécois.

Et si le club devient invisible… il deviendra dispensable.

Le pire scénario ne serait pas de déménager. Le pire scénario serait que plus personne ne s’en rende compte.

C’est maintenant ou jamais.

Montréal doit décider si elle veut encore faire partie de l’élite du soccer nord-américain — ou si elle accepte de regarder, une fois de plus, un autre pan de son identité sportive s’effondrer.