Tristesse à Montréal: Valérie Plante annonce sa chute

Tristesse à Montréal: Valérie Plante annonce sa chute

Par David Garel le 2025-08-11

Il y a des images qui collent à la peau, des scènes publiques qui, en une fraction de seconde, confirment tout ce que leurs détracteurs reprochent à une personnalité politique.

Pour Valérie Plante, la vidéo la montrant en train de danser, de rire et de se donner en spectacle lors du défilé de la Fierté gaie est en train de devenir l’un de ces symboles.

Un symbole que ses adversaires, et même de simples citoyens exaspérés, utilisent aujourd’hui pour dépeindre une mairesse déconnectée, narcissique, et insensible aux réalités de sa ville.

Ce n’est pas la première fois que la cheffe de Projet Montréal se met en avant dans des événements festifs. Elle cultive, depuis le début de son mandat, une image de politicienne « proche des gens », souriante, « fun » et toujours partante pour une photo ou un moment d’humour.

Mais dans le Montréal de 2025, où le quotidien de milliers de citoyens est fait de poubelles qui débordent, de nids-de-poule béants, de chantiers à perte de vue et d’un sentiment croissant d’insécurité, cette légèreté passe de plus en plus mal.

Ce week-end, la mairesse a donc paradé, dansé et ri devant les caméras, entourée de partisans et de curieux. Sur les réseaux sociaux, la réaction a été immédiate et d’une violence rarement vue. Les réseaux sociaux sont en feu.

« La gauche est réellement dangereuse. La ville est une dump pis elle fait son show. » 

« Pendant ce temps, des radicaux islamistes ont prié près de la Basilique Notre-Dame à Montréal… » 

« Dans l’art d’avoir l’air folle, elle gagne le 1er prix  » 

« Elle, elle est sur les pilules fortes pas à peu près. » 

Et ce ne sont là que quelques exemples parmi des dizaines d’autres, où se mêlent sarcasme, colère brute et attaques personnelles.

Si la majorité des élus savent qu’Internet grossit tout et qu’il ne faut pas se laisser frapper par les extrêmes, il faut reconnaître que le contexte rend ces critiques particulièrement cinglantes.

Le problème n’est pas tant qu’une mairesse participe à un événement public festif. C’est le contraste violent entre ces images et la réalité vécue par les Montréalais qui fait mal.

Pendant que Valérie Plante esquissait ses pas de danse, une plainte officielle circulait sur les réseaux : une poubelle déborde depuis des semaines au coin de Christophe-Colomb et Villeray, sans qu’aucune intervention municipale ne vienne régler la situation.

Pendant que la musique battait son plein, sur la rue Boyer, dans le Plateau-Mont-Royal, un nid-de-poule assez profond pour qu’un petit chien puisse s’y loger venait d’endommager la voiture de Christine Poulin, pour 500 $ de réparations.

Une ex-conseillère municipale qui, excédée, dénonçait une ville incapable de refaire ses rues « de fond en comble » et de superviser correctement ses travaux.

Pendant que la foule applaudissait les chars allégoriques, Olivier Primeau, l’homme d’affaires derrière l’un des empires de divertissement les plus prospères du Québec, publiait un texte assassin sur l’état lamentable de Montréal :

« Le mot “catastrophe” ne suffit même plus. Le trafic est infernal, les chantiers sont partout, et il y a tellement de trous qu’on se croirait dans un champ de mines. »

Dans ce contexte, l’image d’une mairesse hilare et dansante devient un coup de poignard pour tous ceux qui peinent à avaler leurs hausses de taxes (+2,2 % cette année, soit 135 $ de plus pour une maison moyenne) tout en se demandant où passent les 7,2 milliards de dollars de budget municipal.

Si cette séquence provoque autant de fureur, c’est aussi parce qu’elle réactive tout le passif de Valérie Plante. Ses opposants ressortent, pêle-mêle :

Le retrait du crucifix à l’Hôtel de Ville après les rénovations, malgré un amendement de la loi 21 qui permettait de les conserver.

Les dépenses infinies pour des pistes cyclables contestées, imposées à coups de millions malgré la grogne de commerçants.

Les ratés à répétition sur le déneigement, avec des rues impraticables chaque hiver.

Les controverses autour de son salaire, désormais à plus de 211 000 $ par an, ce qui la place dans le haut du panier des élus municipaux canadiens, alors même qu’elle justifie chaque budget comme si la Ville manquait de moyens.

Les hausses de taxes cumulées depuis l’arrivée de Projet Montréal : +38 % en moyenne.

Chaque nouvelle polémique agit comme un amplificateur, rappelant ces « blessures » aux électeurs.

Pour beaucoup, la question n’est pas de savoir si la mairesse a le droit de danser ou de profiter d’un événement public.

C’est le moment choisi et l’absence de sensibilité politique qui choquent. Alors que la Ville traverse une crise de confiance majeure, chaque geste public devrait être mesuré, réfléchi, calibré pour inspirer confiance et leadership.

Or, ici, tout donnait l’impression d’une bulle coupée de la réalité. Une bulle où les priorités sont les apparitions médiatiques, les sourires et les accolades, pendant que le bitume craque, les poubelles débordent et les citoyens, eux, attendent des réponses concrètes.

Les critiques d’Olivier Primeau rejoignent celles, de plus en plus nombreuses, de citoyens ordinaires : Montréal se dégrade.

Les chantiers permanents créent un labyrinthe infernal pour les automobilistes, les cyclistes et même les piétons.

Les trous dans la chaussée sont devenus la norme, au point où certains quartiers ressemblent davantage à des terrains de guerre qu’à une métropole nord-américaine.

Dans certains secteurs, comme Saint-Henri ou le Plateau, la combinaison de travaux éternels et de manque de coordination entre arrondissements rend la circulation quasi impossible.

Pendant ce temps, les projets « vitrine », comme les corridors verts ou certaines réfections d’espaces publics, avancent à grands frais, laissant aux citoyens l’impression que l’argent public est investi dans le cosmétique plutôt que dans le vital.

Ce qui ressort de cette tempête médiatique, c’est ce décalage malaisant entre l’image que Valérie Plante veut projeter, celle d’une mairesse moderne, inclusive, proche des communautés, et la perception de plus en plus ancrée qu’ont ses détracteurs : celle d’une élue déconnectée, préoccupée par sa marque personnelle plus que par la gestion concrète de sa ville.

Ce décalage est aggravé par l’omniprésence des réseaux sociaux. Chaque vidéo, chaque photo est instantanément décortiquée, partagée, détournée.

Dans ce cas précis, les extraits de danse ont été isolés, repostés avec des commentaires assassins, et transformés en mèmes qui circulent à la vitesse grand V.

Face à ce genre de controverse, un réflexe de base en communication politique voudrait que l’on réponde vite, que l’on explique le contexte, que l’on rappelle les actions concrètes en cours pour répondre aux problèmes prioritaires. Or, Valérie Plante a choisi, pour l’instant, le silence.

Ce silence est interprété comme un signe d’arrogance ou de mépris par certains :

« Bon débarras… » 

« Maudite niaiseuse » 

« Vivement novembre prochain. » 

En ne prenant pas la parole pour recentrer le débat, elle laisse ses adversaires occuper tout l’espace narratif.

La question qui se pose désormais est simple : combien de polémiques de ce genre peut-elle encaisser avant que l’usure ne devienne irréversible?

La politique municipale est impitoyable : on ne peut pas se réfugier éternellement derrière des événements communautaires pour faire oublier les problèmes du quotidien.

Cette danse à la Fierté pourrait rester dans les annales comme l’un de ces moments où l’opinion publique bascule définitivement.

Pas parce qu’elle est choquante en soi, mais parce qu’elle illustre, en une image, le sentiment diffus mais tenace que la mairesse ne partage plus les priorités de ses concitoyens.

En politique, la légèreté est un luxe qui ne se paie qu’en période de succès et de stabilité. Montréal n’est ni stable ni prospère sur le plan de ses infrastructures, et ses citoyens ne se sentent pas entendus.

Tant que les nids-de-poule avaleront les pneus, que les poubelles déborderont et que les chantiers bloqueront la ville, chaque pas de danse de Valérie Plante sera vu comme une provocation.

Jusqu'à ce qu'elle quitte la vie politique à l'automne prochain. Mais les gens n'oublieront jamais tout le mal qu'elle a fait à Montréal...