Chute d'Alexandre Carrier: Martin St-Louis sort de son silence

Chute d'Alexandre Carrier: Martin St-Louis sort de son silence

Par David Garel le 2025-12-01

Alexandre Carrier n’a pas fui. Il n’a pas fait semblant. Il n’a pas joué à l’aveugle devant l’évidence qui saute aux yeux de tout le monde depuis un mois : il traverse la période la plus difficile de son aventure montréalaise.

Et lundi, à Brossard, il a fait ce que bien des joueurs n’osent jamais faire dans un marché aussi exigeant : il s’est ouvert. Il a pris le blâme. Il a admis qu’il doit être meilleur, point final.

« Un peu d’exécution, de confiance dans le jeu défensif, sur la relance. Des choses comme ça », a-t-il simplement lancé. Pas d’excuses, pas de justification comme quoi il joue toujours avec les "moins bons" (Xhekaj, Engström, Struble), pas de détour. Juste un joueur qui regarde la vérité en face et accepte de dire qu’il en a « plus dans la tank » que ce qu’il montre présentement. Et il n’a pas tort.

Depuis le début de la saison, Carrier accumule les séquences qui font froncer les sourcils : des lectures hésitantes, des relances qui manquent de conviction, un instinct défensif moins tranchant, et surtout un différentiel de moins-10 après seulement 24 matchs, dont moins-7 à lui seul lors des 12 dernières rencontres.

Le genre de statistiques qui, à Montréal, font exploser les lignes de discussion et alimentent les appels à « l’envoyer dans les estrades » pour se replacer la tête.

Sauf que cette fois-ci, ce n’est pas les partisans qui ont parlé les premiers. C’est Martin St-Louis.

L’entraîneur du Canadien, qui pèse toujours ses mots, qui protège ses joueurs comme s'ils étaient ses propres fils, , n’a pas cherché à cacher la réalité.

« Alexandre n’a pas oublié comment jouer au hockey », a d’abord affirmé St-Louis, un vote de confiance clair. Mais il a aussi ajouté, pour la première fois depuis que la situation dérape :

« Oui, sa confiance a baissé un peu et il n’est pas aussi efficace dans ses lectures. »

Dans le langage St-Louis, c’est presque un avertissement. Mais ce qui a surpris tout le monde, c’est la suite.

Car alors que plusieurs s’attendaient à l’entendre ouvrir la porte à un « reset dans les gradins », Martin a refermé cette hypothèse avec une force tranquille. Carrier n’ira pas dans les estrades. Pas demain. Pas la semaine prochaine. Pas tant qu’il aura, selon lui, de quoi rebondir.

« Il faut juste prendre une grande respiration et aller jouer. J’adore le joueur », a insisté St-Louis.

Et c’est probablement là que se trouve le vrai message du coach : il croit encore en lui. Il croit encore que le défenseur québécois peut retrouver ce qu’il a offert l’an dernier, lorsqu’il est devenu l’une des révélations du système de St-Louis, un stabilisateur défensif qui bloquait des tirs, qui simplifiait les sorties de zone, qui calmait le jeu dans un effectif encore trop jeune.

Ce n’est pas un hasard non plus si St-Louis a rappelé à quel point la statistique du différentiel peut être trompeuse, surtout pour un défenseur qui passe la majeure partie de son temps à éteindre des feux :

« Parfois, vous allez recevoir un “moins” même si vous n’avez pas commis d’erreur. Et parfois, ce n’est pas parce que vous avez fait un bon jeu que vous allez recevoir un “plus”. »

C’est dans ces moments-là que l’on voit l’autre facette du travail d’un entraîneur : l’expertise tactique, oui, mais aussi la psychologie, la capacité de prendre un joueur qui chancelle et de lui redonner la force de continuer. Surtout quand la ville entière de traite de "pourri".

« Nous sommes là pour aider les joueurs à respirer », a dit St-Louis, comme pour rappeler que derrière chaque erreur, chaque mauvais match, il y a un humain qui tente de ne pas se perdre.

Carrier, lui, n’a pas essayé de fuir non plus. Il n’a pas blâmé un système, un partenaire, un manque de stabilité.

« C’est vrai que c’est plus facile quand vous avez une cohésion avec votre partenaire et que vous savez exactement où il ira sur la glace », a-t-il expliqué, en rappelant qu'il changeait toujours de partenaire (Xhekaj, Struble, Engström).

Mais il a aussi ajouté : «Il faut juste communiquer. Souvent, nous allons jouer avec différents partenaires durant un match. Nous avons beaucoup de profondeur. Il faut juste communiquer. »

Pendant ce temps, le coach lui lance un sérieux avertissement.

Engström est « capable de défendre grâce à ses pieds », a dit St-Louis. Il « aide au niveau de la relance ». Une description qu’on utilisait autrefois pour Carrier.

Mais voilà : malgré les critiques, malgré les appels à la punition, malgré les lectures ratées, Martin St-Louis refuse de le punir, parce qu’il ne croit pas qu’un passage dans les estrades réglerait quoi que ce soit.

Si Carrier doit se relever, ce sera sur la glace, pas en haut, une bière imaginaire à la main, à regarder d’autres faire ce qu’il doit apprendre à refaire.

Et quelque part, c’est le moment vérité.

Parce que pour la première fois, St-Louis a reconnu publiquement que son défenseur patine en terrain trouble. Et pour la première fois, Carrier a répondu sans se cacher.

Le Canadien aura besoin de lui. Mais si on était lui, on couperait nos réseaux sociaux...

À Montréal, surtout.