Bagarre de l’année: la chute d’Arber Xhekaj annoncée

Bagarre de l’année: la chute d’Arber Xhekaj annoncée

Par David Garel le 2025-11-30

Il y a des moments, dans la carrière d’un joueur, où tout bascule, où la réalité cesse d’être une ligne droite pour devenir une chute libre.

Pour Arber Xhekaj, ce moment s’étire désormais sur des semaines entières. Ce n’est plus un mauvais match. Ce n’est plus une mauvaise séquence. C’est un effondrement public que la planète hockey entière observe sans détourner le regard.

Et au cœur de cette tempête, les voix les plus respectées du Québec, celles qui, autrefois, l’encensaient, sont maintenant en train de refermer le couvercle du cercueil.

Dany Dubé, jamais un gars à exagérer, jamais un gars à tirer sur une ambulance, a tiré la ligne rouge :

« Le troisième duo, je sais pas de quoi ça va avoir l’air, mais je sais une chose : un troisième duo, ça tue des punitions. Ça fait que si Arber Xhekaj n'est pas capable de jouer en désavantage numérique, ils vont avoir un problème avec lui.  Mais lui, il faut qu'il prenne les minutes de désavantage. »

C’est probablement la critique la plus dévastatrice que Dubé pouvait faire. Parce qu’elle touche la racine même du problème : Xhekaj ne progresse pas. Pis s’il ne progresse pas, il devient inutile.

Un défenseur de troisième paire incapable de jouer en désavantage numérique, c’est une anomalie dans la LNH. Un luxe que personne ne peut se permettre. Et Montréal encore moins.

Et ensuite, il y a eu Simon-Olivier Lorange de La Presse qui lance la serviette à propos du défenseur.

« Je suis sceptique sur Arber Xhekaj.  Je trouve que c'est long et je sais qu'il a 24 ans et que les défenseurs c’est long, un gros bonhomme comme lui peut se développer plus tard. Mais c’est justement du fait que c’est un défenseur que je trouve qu’il est tellement loin de l'identité qu'il devrait avoir. »

C’est rare qu’un journaliste de La Presse parle comme ça.

C’est rare qu’il prenne un joueur individuellement.

C’est rare qu’il annonce que sa progression est une mirage.

Et ça, c’est encore pire : Lorange parle de son identité, pas de stats, pas de chiffres, pas d’erreurs techniques. Il dit que Xhekaj n’est même plus ce qu’il prétend être. Qu’il n’est ni un policier, ni un stabilisateur, ni un défenseur fiable. Qu’il flotte entre deux rôles, et qu’il excelle dans aucun.

Ce n’est plus de la critique. C’est l'annonce que c'est bientôt terminé.

Parce que pendant que Montréal débat de savoir s’il a un avenir, la LNH, elle, n’attend pas. Et la Ligue américaine, elle, ne pardonne rien.

Après que Xhekaj s’effondrait contre le Colorado, après qu’il reculait éternellement, pendant qu’il se faisait contourner comme un pylône, après que les réseaux sociaux le crucifiaient en direct, la bagarre de l’année éclatait dans la Ligue américaine aujourd'hui.

Un combat de cinglés, de marteaux, de gars qui vivent à un millimètre de la catastrophe permanente : Tyrell Bauer contre Yannick Turcotte.

Un combat d’hommes qui choisissent consciemment de risquer leur cerveau pour survivre dans la business.

Un combat où il se frappait comme s’il n’y avait pas de lendemain.

Un combat où chaque coup était une commotion cérébrale.

C’était violent.

C’était laid.

C’était dangereux.

Mais c’était surtout un rappel de ce que Xhekaj évite. Parce que lui aussi, c’était ça, avant. Avant les corrections.

Avant Nicolas Deslauriers qui lui a appris ce qu’un vrai poids lourd peut faire, ou que Tanner Jeannot l'ait mis sur le derrière d'une froite percutante ou Mathieu Olivier qui l'a "shake" comme un enfant.

Avant toutes les fois où il a mangé des coups propres, nets, secs, qui laissent plus qu’une marque sur la joue.

Aujourd’hui, il ne veut plus vraiment se battre.

Et on le comprend.

Dans une ligue où les commotions détruisent des vies, il est normal qu’un joueur commence à se protéger.

Le problème?

Son rôle existait UNIQUEMENT à cause de ça.

Quand il ne se bat pas, quand il ne frappe pas, quand il ne domine pas physiquement, il devient un défenseur ordinaire. Et quand il joue comme un défenseur ordinaire… il devient un mauvais défenseur.

Et la LNH ne protège jamais les joueurs qui n’ont plus de rôle clair.

Alors imagine ce que ça fait, pour un gars comme lui, de regarder des bagarres comme Bauer-Turcotte, des combats où les deux gars donnent des coups qui pourraient faire perdre une vie.

Imagine ce que ça donne à un gars qui, lui, a perdu ses derniers combats, qui s’est fait corriger, qui a goûté au vertige, à la lumière blanche, au monde qui tourne trop vite.

Ça donne des frissons. Dans le dos. Dans le ventre. Dans l’âme.

Parce qu’il sait très bien qu’il ne peut pas revenir dans la LNH comme un défenseur « normal ». Il n’a pas le tir. Il n’a pas la relance. Il n’a pas le positionnement. Il n’a pas les lectures.

S’il ne met pas la peur dans les yeux de l’adversaire, il ne sert plus à rien. Et pourtant, à chaque combat qu’il regarde, à chaque combat qu’il évite, il se rappelle que la LNH ne l’épargnera pas, que les vraies machines à frapper vont le cibler jusqu’à ce que l’un de ses genoux ou l’une de ses tempes cède.

Arber Xhekaj vit un cauchemar. Il sait qu’il marche vers le vide. Il sent le sol se dérober. Il comprend que son avenir n’a jamais été aussi sombre.

Ce n’est pas un coach, un DG ou un agresseur qui l’a mis là.

Ce sont les deux extrêmes : les combats qu’il ne veut plus faire… et le hockey qu’il n’arrive plus à jouer.

Pour un joueur comme lui, c’est l’enfer.

Et l’enfer, c’est maintenant.