Colère noire à Pittsburgh: Mario Lemieux a vendu son âme

Colère noire à Pittsburgh: Mario Lemieux a vendu son âme

Par David Garel le 2025-09-10

Il y a des légendes qui semblent intouchables. Des hommes qu’on croit au-dessus de toute critique, protégés par la gloire accumulée et l’amour du public.

Mario Lemieux, à Pittsburgh, faisait partie de cette catégorie-là. Le numéro 66, le sauveur des Penguins, l’homme qui a ressuscité une franchise en faillite pour en faire une dynastie moderne.

Mais aujourd’hui, à Pittsburgh, une colère noire gronde. Une rancune sourde s’installe. Les partisans, longtemps reconnaissants, ont l’impression d’avoir été trahis.

Parce que dans la ville de l’acier, on ne pardonne pas aux héros qui choisissent l’argent au détriment du cœur. Et Mario Lemieux est désormais accusé d’avoir sacrifié les Penguins pour gonfler ses coffres.

Revenons en arrière. En 1999, les Penguins sont au bord du gouffre. Faillite déclarée, dettes monstrueuses, avenir sombre. L’équipe doit encore 32,5 millions de dollars en salaires différés à Mario Lemieux, fraîchement retraité depuis 1997.

Plutôt que de les poursuivre en justice, Lemieux a une idée géniale. Il transforme la dette en coup de circuit d’acquisition.

Vingt millions sont convertis en actions, cinq millions encaissés en argent comptant, et 7,5 millions effacés. En un geste, Lemieux devient propriétaire majoritaire de la franchise pour une bouchée de pain.

C’est un coup de maître, un mouvement de businessman « shark » digne de Wall Street. En acceptant de perdre sur papier, il s’achète un empire. Et il en fait une fierté locale : Crosby, Malkin, Letang, trois Coupes Stanley, une nouvelle aréna, une renaissance totale.

Pendant deux décennies, Mario Lemieux est vu comme le père spirituel de la franchise. L’homme qui l’a sauvée, nourrie, portée à bout de bras.

Mais cette image d’ange gardien s’est fissurée en 2021. Ce jour-là, Lemieux et son partenaire Ron Burkle vendent leurs parts majoritaires à Fenway Sports Group pour environ 900 millions de dollars US.

Pour Lemieux, la transaction est une mine d’or. Selon plusieurs sources, il encaisse près de 350 millions de dollars personnellement, tout en conservant une participation minoritaire symbolique.

Pour les partisans, la pilule passe mal. Comment l’homme qui avait juré fidélité à la ville, qui avait promis de garder l’équipe à Pittsburgh à tout jamais, pouvait-il encaisser et s’effacer ainsi?

Là où certains voient une décision d’affaires brillante, d’autres voient une trahison. Lemieux n’a pas vendu à un groupe local, mais à un conglomérat étranger, un empire bostonnais qui possède déjà les Red Sox et Liverpool. Un groupe froid, sans racines à Pittsburgh.

Cet été, Lemieux a tenté son grand retour. Avec Burkle et son ancien bras droit David Morehouse, il a approché Fenway pour racheter les Penguins. Mais son offre était loin du prix demandé.

Fenway voulait 1,75 à 1,8 milliard, se basant sur la vente du Lightning de Tampa Bay au même prix. Lemieux a tenté un « lowball », un coup de poker. Mais Fenway n’est pas une franchise en faillite de 1999. Fenway est un empire qui sait la valeur réelle de ses actifs.

On connaît la suite. Lemieux a été écarté. Et c’est la famille Hoffmann, un groupe d’affaires floridien, qui s’apprête à prendre le contrôle.

C’est à ce moment précis que la colère a explosé à Pittsburgh. Parce que pour la première fois, les partisans ont compris. Lemieux n’était pas revenu par amour.

Il n’était pas revenu par loyauté. Il voulait simplement refaire un coup d’affaires. Acheter moins cher, revendre plus cher. Encore une fois.

« Mario nous a vendus »

Dans les bars de Pittsburgh, la phrase se répète.

« Mario nous a vendus. »

L’homme qui avait sauvé les Penguins est désormais vu comme celui qui les a livrés à un groupe étranger, qui a encaissé ses millions et qui a voulu revenir uniquement pour spéculer.

Pour les fans, c’est une gifle. Parce que Lemieux, c’était plus qu’un joueur. C’était un frère. Un héros local. Un homme qui avait logé Crosby dans sa propre maison à son arrivée dans la LNH.

Aujourd’hui, Crosby lui-même se retrouve dans l’incertitude. Mario ne contrôle plus rien. Et la famille Hoffmann n’a aucun attachement sentimental à lui. Pour les Hoffmann, Crosby n’est pas un fils adoptif, il est un actif. Un joueur vieillissant de 38 ans avec un salaire de 8,7 millions.

Voilà pourquoi la colère est si vive à Pittsburgh. Parce qu’en se retirant, Lemieux a laissé Crosby seul face à Fenway, puis aux Hoffmann.

Si Mario avait racheté le club, une chose était certaine : Crosby aurait fini sa carrière à Pittsburgh. Mais Lemieux a échoué. Et aujourd’hui, la porte est ouverte à un échange. Vers Montréal, Colorado, Los Angeles.

Et dans la ville de l’acier, on n’accepte pas que « Super Mario » ait laissé son protégé dans une telle situation. Pour les fans, c’est une trahison familiale. Une rupture d’un pacte moral.

C’est le dilemme qui déchire Pittsburgh. Mario Lemieux a gagné. Financièrement, il a tout gagné. Parti d’une dette de 32,5 millions, il a bâti un empire, encaissé 350 millions, et conserve encore une participation minoritaire.

Mais en gagnant son pari d’homme d’affaires, il a perdu son aura de héros. L’argent a pris le dessus sur l’héritage.

Pour les partisans, il aurait dû racheter l’équipe, peu importe le prix. Il aurait dû protéger Crosby. Il aurait dû sacrifier une partie de sa fortune personnelle pour rester fidèle à sa ville.

Mais Lemieux a choisi l’argent. Et aujourd’hui, la rancune est immense.

À Montréal, on observe la situation avec fascination. Parce que l’échec de Lemieux est une bénédiction pour le Canadien.

Avec lui, Crosby n’aurait jamais quitté Pittsburgh. Avec les Hoffmann, tout est possible. Et déjà, Pat Brisson prépare le terrain médiatique, parlant ouvertement de la possibilité d’un échange.

Kent Hughes sait qu’il a le gros bout du bâton. Si Crosby impose Montréal comme destination, les Penguins n’auront aucun levier.

Ils devront accepter une offre réduite. On parle déjà d'Owen Beck, Joshua Roy, un choix de 1ère ronde 2026 protégé, Kirby Dach et Jayden Struble.

Des peanuts... pour une légende...

Mario Lemieux restera toujours une légende du hockey. Un joueur unique, un champion immense, un homme qui a transformé une dette en empire. Mais à Pittsburgh, son image est désormais ternie.

Il est accusé d’avoir vendu l’équipe pour s’enrichir. Accusé d’avoir laissé Crosby à la merci de nouveaux propriétaires sans attachement. Accusé d’avoir privilégié le cash à l’héritage.

Et la colère est noire. Parce qu’au fond, les partisans n’attendaient pas que Lemieux soit parfait. Ils attendaient qu’il reste fidèle. Qu’il protège « Sid the Kid » comme il l’avait toujours fait. Qu’il soit le gardien de l’âme des Penguins.

Mais il ne l’a pas fait. Il a encaissé. Et à Pittsburgh, ça ne passe pas.

Le plus cruel dans tout ça? Si Crosby finit par quitter Pittsburgh, les fans ne blâmeront pas les Hoffmann. Ils ne blâmeront pas Kyle Dubas. Ils blâmeront Mario Lemieux.

Lui, le sauveur de 1999, sera vu comme l’homme qui a ouvert la porte au départ de leur plus grand capitaine.

De héros éternel, Mario Lemieux est devenu… le traître de Pittsburgh.