Geoff Molson, président du Groupe CH, a récemment pris une décision qui a ébranlé le monde culturel québécois : il a décidé d'abandonner Juste pour rire.

Alors que le Groupe CH détenait une part majoritaire de 51 % dans l'entreprise, il a opté pour ne pas injecter les fonds nécessaires pour sauver cette institution en dérive.

Cet abandon brutal révèle une réalité implacable : lorsque les bénéfices ne sont plus au rendez-vous, Geoff Molson n'hésite pas à tourner le dos rapidement.

Les difficultés financières rencontrées par le Groupe Juste pour rire, avec près d'une centaine de mises à pied depuis décembre et l'annulation de la plupart de ses activités, dont le célèbre festival, sont en grande partie attribuables à la pandémie, à l'augmentation des dépenses et à l'inflation, selon l'entreprise.

Cependant, au-delà de ces facteurs économiques, il existe un élément intangible qui a contribué à l'effondrement de Juste pour rire.

En 2017, le mouvement #metoo a ébranlé la réputation de Juste pour rire, mettant en lumière des allégations d'inconduite sexuelle contre son fondateur, Gilbert Rozon.

Bien que Rozon ait été acquitté en décembre 2020 des accusations portées contre lui, la réputation de l'entreprise a été ternie. Rozon fait actuellement face à une série de procès civils de la part de neuf femmes, réclamant près de 14 millions de dollars.

Son départ et la vente ultérieure de l'entreprise à l'agence d'artistes hollywoodienne ICM Partners en 2018 n'ont pas suffi à effacer les nuages noirs qui planaient au-dessus de Juste pour rire.

"Rozon a vendu Juste pour rire en 2018 à l’agence d’artistes hollywoodienne ICM Partners pour environ 65 millions. Quelques mois plus tard, ICM Partners (rachetée depuis par Creative Artists Agency) a cédé 51 % de ses parts à Bell et evenko, afin de s’assurer que Juste pour rire soit admissible aux crédits d’impôt et autres formes de financement public canadien." (crédit: Marc Cassivi, la Presse)

Malgré tous les efforts déployés, l'entreprise n'a pas réussi à se défaire de l'ombre laissée par les allégations contre son ancien patron.

Des partenaires commerciaux potentiels ont continué à hésiter à s'associer au festival, tandis que la réputation de l'entreprise restait ternie.

L'image de marque de Juste pour rire a été sérieusement endommagée, et certains estiment que Gilbert Rozon, avec son passé d'agression, en est en grande partie responsable.

Lorsque Geoff Molson a pris la décision de se désengager de Juste pour rire, il a peut-être sauvé les finances du Groupe CH, mais il a également sacrifié une institution culturelle majeure.

L'annulation du festival, à quelques mois d'avis, a porté un coup dur à l'identité de Montréal. Le vide laissé par la disparition de Juste pour rire risque de se faire ressentir dans le paysage culturel québécois pour longtemps.

Geoff Molson aurait pu jouer le rôle de héros dans ce dossier. Mais un héros ne pense pas à l'argent en premier. Juste pour rire aurait pu être sauvé. Mais le propriétaire du Canadien de Montréal en a décidé autrement.

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