C’est tombé ce matin, juste avant le départ du Canadien pour son long voyage dans l’Ouest : Joshua Roy et Marc Del Gaizo sont rappelés de Laval, pendant que Owen Beck prend le chemin inverse.
À première vue, c’est une simple manœuvre de profondeur. En réalité, c’est une décision lourde de sens, surtout pour Joshua Roy, qui joue ici sa dernière carte à Montréal.
Ce rappel n’arrive pas pour rien.
Dans les coulisses du Centre Bell, tout le monde sait qu’une rencontre tendue a eu lieu entre Joshua Roy et la direction du Canadien.
Ce n’était pas une discussion sur le développement. C’était un ultimatum.
Roy, frustré d’avoir été rétrogradé après un camp pourtant solide à ses yeux (et terne aux yeux de Martin St-Louis), aurait fait part de son mécontentement à Kent Hughes et Martin St-Louis.
L’ailier de 22 ans, transformé au cours de l’été, s’attendait à débuter la saison dans la LNH. Il avait tout fait pour.
Nouvelle éthique, nouvelle discipline, fini les soirées de party, fini les distractions : Roy voulait prouver qu’il avait mûri.
Mais Martin St-Louis n’a pas été convaincu et la sentence est tombée : retour à Laval, sans explication.
Aucun suivi. Aucun encadrement. Juste une décision froide, administrative.
Ce matin, Roy remonte.
Mais dans le vestiaire, personne n’est naïf : c’est sa dernière chance.
L’organisation veut le montrer. Le tester. Le placer dans la vitrine avant de décider s’il fait encore partie du plan.
Le rappel de Marc Del Gaizo, lui, est purement stratégique.
Le défenseur gaucher, 24 ans, ne sera pas là pour révolutionner la défensive.
C’est un 7e défenseur d'urgence, rappelé pour combler l’absence temporaire de Kaiden Guhle et éviter de gaspiller les minutes d’Adam Engström à Laval.
Personne n’attend de lui qu’il joue beaucoup. Mais il sera là, prêt, au cas où. Et il encaissera le même salaire puisqu'il a un contrat garanti de 775 000 dollars.
C’est logique. Engström doit continuer à prendre du millage dans la Ligue américaine.
Del Gaizo, lui, peut patienter, observer, dépanner. Rien de plus.
Le vrai enjeu, c’est Roy.
Depuis son renvoi à Laval, plusieurs clubs ont appelé le CH pour prendre des nouvelles de Joshua Roy.
Parmi eux : Chicago, Boston, Vancouver, Columbus, Washington et Nashville.
Rappelons que Roy avait été proposé avec Jayden Struble et Oliver Kapanen pour Paval Zacha, mais les Bruins avaient refusé l'offre, qui a été retirée depuis par le CH tellement Kapanen est en feu et que Struble est essentiel.
Reste que le profil de Roy séduit encore : jeune, offensif, capable de produire dans un top-9, mais coincé dans un environnement où il n’a plus de place.
Et ce rappel n’est pas qu’une récompense : c’est un test, mais aussi une exposition.
On veut le montrer.
On veut voir s’il peut redevenir une pièce d’avenir… ou un actif d’échange.
À Chicago, par exemple, la rumeur persiste.
Roy a gardé une forte amitié avec Connor Bedard, depuis leur passage à Équipe Canada junior.
Bedard lui-même aurait glissé son nom à la direction, lui décrivant comme un “ailier intelligent, créatif, qui comprend mon jeu mieux que n’importe qui”.
Les Hawks cherchent des jeunes capables de grandir aux côtés de Bedard. Et Roy coche toutes les cases.
Ce rappel au moment où Chicago évalue ses options offensives n’a donc rien d’un hasard.
Roy, lui, n’a jamais vraiment compris pourquoi il était retourné à Laval.
Lors de la fameuse rencontre avec l’état-major, il aurait exprimé son incompréhension totale.
« Il ne sait pas exactement ce que l’organisation veut de lui pour percer dans la LNH », rapportait Anthony Martineau à TVA Sports.
C’est ce flou qui le ronge.
On lui reproche parfois de ne pas être assez intense, d’autres fois de trop tricher offensivement.
Il n’a jamais eu de directive claire, seulement des critiques changeantes.
Il a été relégué dès le premier faux pas.
Ce matin, il retrouve le grand club. Mais il sait que c’est une audition.
Son avenir se joue sur quelques présences dans l’Ouest canadien.
Pendant que Roy remonte, Owen Beck descend.
Le jeune centre, qu’on espérait voir s’imposer comme pivot de troisième trio quand il a été sélectionné en 2022, n’a pas convaincu.
Ni dans l’engagement physique, ni dans la lecture du jeu.
Il a eu sa chance, et il l’a laissée filer.
Ce renvoi à Laval n’est pas une punition, mais un constat : Beck n’est pas prêt.
Et dans une organisation où l'on a besoin de centres, c’est un signal inquiétant.
Kent Hughes ne peut pas se permettre d’attendre éternellement.
Le Canadien cherche activement un centre gaucher d’impact.
Et c’est là que les rumeurs autour de Hendrix Lapierre à Washington prennent tout leur sens.
Selon Frank Seravalli, les Capitals ont officiellement mis Hendrix Lapierre sur le marché.
Le Québécois, 23 ans, est frustré d’avoir été laissé de côté après deux matchs. Il a depuis réintégré l'alignement, mais les rumeurs de transaction persistent.
Les planètes s’alignent.
Lapierre contre Roy est un échange qui fait du sens pour les deux clubs, mais le CH devra offrir un élément en plus et négocier une transaction plus large. (Owen Beck pourrait aussi intéresser les Capitals).
Lapierre est un centre gaucher, intelligent, encore en développement, qui pourrait stabiliser la ligne de centre du CH derrière Suzuki.
Roy, lui, donnerait aux Capitals un jeune ailier offensif prêt à contribuer rapidement dans un rôle de soutien, alors qu'Owen Beck pourrait être ce centre de profondeur version plombier qui peut être inséré dans le bottom-9 n'importe quand.
Et pour Montréal, ce serait une porte de sortie honorable pour une relation devenue trop compliquée.
Kent Hughes marche sur des œufs.
Il sait que si Joshua Roy demande officiellement une transaction, l’image du Canadien en prendra un coup.
Roy n’est pas un Américain anonyme. C’est un espoir québécois, aimé du public, produit de la province.
Le voir partir frustré, désillusionné, serait un échec symbolique pour une organisation qui prétend développer ses jeunes à long terme.
C’est pourquoi ce rappel est aussi un geste politique.
Une façon d’apaiser les tensions, de donner à Roy l’impression qu’on croit encore en lui, tout en gardant une porte ouverte à une transaction si la situation dégénère.
Mais tout le monde à Brossard le sait : la confiance est brisée.
Roy ne croit plus vraiment au discours de Martin St-Louis.
Et St-Louis, lui, ne semble plus savoir comment utiliser Roy.
Le CH s’envole vers l’Ouest dans les prochaines heures.
Et dans l’avion, Joshua Roy, Marc Del Gaizo et Martin St-Louis seront assis à quelques mètres l’un de l’autre.
Une atmosphère lourde, tendue, où chaque mot, chaque geste, chaque présence sur la glace comptera.
Roy le sait : tout va se jouer dans les prochains jours.
S’il performe, il peut sauver sa place et regagner la confiance du staff.
S’il échoue, il deviendra un pion sur le marché des transactions.
Ce rappel n’est pas anodin.
C’est le moment charnière de la carrière de Joshua Roy.
S’il impressionne dans l’Ouest, il peut relancer son histoire à Montréal.
S’il déçoit, il rejoindra la longue liste des espoirs québécois brisés par un système trop rigide.
À lui de forcer la main du CH... dans un sens ou l'autre...