Ce devait être une soirée de rédemption, un retour triomphal dans l’Ouest canadien. Un match symbolique pour Kirby Dach, disputé à seulement trente minutes de sa ville natale de St. Albert, devant ses parents, ses amis, et plusieurs membres de sa famille qui avaient fait la route pour le voir reprendre là où il avait laissé avant sa blessure.
Mais ce qui s’est produit jeudi soir à Edmonton restera comme l’un des moments les plus embarrassants de sa jeune carrière.
Le scénario était pourtant parfait : un retour attendu, un rôle de centre entre Zachary Bolduc et Joe Veleno (il faut finalement déplacé à l'aile gauche tellement il est mauvais), une chance de retrouver son rythme et de rappeler à tout le monde pourquoi le Canadien avait cru en lui.
Mais ce fut tout le contraire. Dach a été méconnaissable. Lourd sur ses appuis, lent dans ses lectures, incapable de suivre le tempo du match, il a été directement responsable de deux buts des Oilers, terminant la rencontre avec un différentiel de -2, un seul tir manqué et 10 minutes 28 secondes de jeu. Dix minutes de souffrance. Dix minutes d’humiliation, devant les siens.
Une nonchalance inacceptable, selon les mots d’un membre du personnel du Canadien cité après la rencontre.
Martin St-Louis a frappé du poing sur le banc, visible sur les caméras. C’était le signe d’un entraîneur qui perd patience.
Depuis le début de la saison, St-Louis protège Dach, le défend publiquement, parle de son potentiel, de sa force mentale. Mais hier, le coach a vu autre chose : un joueur désengagé, sans intensité, sans réaction.
Et ça, devant sa famille. Le destin est cruel. Sa sœur Hailey, qui partage souvent son soutien pour lui sur les réseaux sociaux, était dans les gradins. Ses parents, eux aussi, venus de St. Albert pour célébrer son retour après trois matchs d’absence, ont assisté impuissants à une prestation catastrophique.
Entre les périodes, Dach a tenté de faire bonne figure devant Marc Denis, mais son entrevue a tourné au malaise. Il a évoqué le fait de jouer devant les siens, parlant de ce que ça faisait de « revenir à la maison », que « ça faisait du bien d’être là, de revoir la famille », et que « tout allait bien ». Mais ses yeux racontaient autre chose. Il était visiblement brisé.
Les mots étaient mécaniques, presque sans conviction :
« Le plus important, c’est que je me sens bien physiquement. J’étais à 100 % prêt à revenir au jeu. C’est spécial de jouer devant beaucoup de membres de ma famille et d’amis. Ça fait du bien d’être de retour sur la patinoire. »
Mais dans le vestiaire, personne n’y croyait. Derrière cette façade polie, il y avait la honte. Celle d’avoir livré un match indigne d’un joueur de son statut, et surtout d’avoir perdu la confiance d’un entraîneur qui l’a soutenu plus que quiconque.
Selon un témoin présent près du banc, St-Louis aurait murmuré à ses adjoints :
“Ça suffit, il faut qu’il se regarde dans le miroir.”
Ce serait la première fois que le coach exprime ouvertement un doute sur Dach.
Même Anthony Martineau, habituellement l’un de ses plus fervents défenseurs, a été cinglant sur les ondes de TVA Sports :
"Je veux être indulgent connaissant son historique. Mais Kirby Dach n’a pas bien paru du tout sur ce but des Oilers. L’engagement n’y était juste pas."
Un commentaire dur, mais juste. Et il reflète ce que plusieurs partisans ont ressenti en regardant Dach errer sur la glace.
Loin du centre explosif qu’on nous avait promis lors de la transaction avec Chicago, Dach donnait l’impression d’un joueur perdu dans sa propre tête, un peu comme ces anciens espoirs qui finissent par s’éteindre sous le poids de la pression.
Le problème n’est plus seulement technique. Il est mental. Le joueur qui devait devenir un pilier du centre montréalais a perdu toute confiance.
Chaque séquence offensive est devenu un combat intérieur. On sent le joueur crispé, fragile, paralysé par la peur de l’erreur. Et le résultat, c’est un hockey lent, mou, prévisible.
Il y a dans cette histoire quelque chose de plus profond. Martin St-Louis s’est senti trahi. Depuis son arrivée à Montréal, Dach a toujours eu droit à un traitement privilégié: un rôle central malgré les blessures alors que St-Louis l'intégrait dans les décisions du coaching staff, une patience infinie de la part du staff, et même un discours protecteur dans les médias. Le coach voyait en lui un projet personnel, un joueur à rebâtir.
Mais jeudi, il a vu un joueur qui n’en voulait plus. Dans ses mots d’après-match, St-Louis a laissé filtrer une rare irritation :
On a des gars qui doivent être prêts à souffrir pour l’équipe. Ce soir, certains ne l’étaient pas.
Tout le monde savait de qui il parlait.
Et cette tension s’ajoute à une saison déjà fragile pour le CH. L’indiscipline, la gestion du banc, les critiques envers les arbitres : tout s’accumule. Le dernier à pouvoir se permettre un tel relâchement, c’était bien Kirby Dach.
Ce naufrage arrive au pire moment pour lui. Depuis l’été, Dach tente de reconstruire son image après une saison marquée par les blessures et un effacement médiatique remarqué.
Il avait modifié ses réseaux sociaux, effacé plusieurs publications pour enlever l'option de laisser un commentaire, tellement il était affecté par ceux qui s'en prenaient à lui verbalement.
Mais la prestation d’hier ruine tout cela. Les internautes ont été impitoyables : sur X, le mot-clé #Dach étaitassocié à des centaines de messages sarcastiques.
Plusieurs rappelaient qu’il avait lui-même parlé, l’été dernier, de « retrouver le plaisir de jouer », alors qu’il traînait maintenant les patins comme un vétéran fini à la corde.
Les partisans de St. Albert, eux, n’ont pas été tendres non plus. L’un d’eux a résumé le sentiment général :
« On voulait voir le gars du coin briller. Au lieu de ça, il a eu l’air d’un joueur qui ne voulait pas être là. »
Dans les coulisses, on chuchote déjà que St-Louis pourrait réduire encore plus son temps de jeu dès le prochain match. Ou tout simplement l'envoyer dans les gradins pour le faire réfléchir?
Ce serait nécessaire, même si tout le monde sait que Martin St-Louis est trop "soft" pour punir ainsi Dach le fragile.
Le Canadien ne peut plus se permettre d’avoir un centre apathique, surtout dans un système basé sur la transition rapide et la relance.
Le trio Bolduc–Dach–Veleno a été un désastre, cumulant les revirements et les présences défensives catastrophiques. Mais là où Bolduc tentait au moins de créer, et Veleno essayait tant bien que mal de se rendre utile malgré le fait qu'il n'a pas de talent, Dach était un spectateur.
Pour un joueur censé être une pièce maîtresse du futur de l’équipe, c’est inacceptable.
Ce match à Edmonton aurait pu être une renaissance. Il restera comme un symbole de déconnexion, le moment où Dach a perdu non seulement un match, mais aussi un peu du respect de ses coéquipiers... et des gens de son coin de pays.
Dans une équipe où l’effort est une religion, il a péché par abandon.
Les caméras ont d’ailleurs capté une image saisissante après le sixième but des Oilers : Dach, tête basse, fixant la glace, pendant que les Oilers célébraient.
Derrière lui, St-Louis se tenait debout, les bras croisés, sans dire un mot. Tout était dit.
Le Canadien peut accepter les erreurs, mais pas la paresse. Et jeudi soir, Kirby Dach a incarné tout ce que Martin St-Louis combat depuis son arrivée à Montréal : la complaisance, le manque d’effort, la peur de s’impliquer.
Revenir devant sa famille aurait dû être une fierté. Ce fut une honte. Et pour un joueur de 24 ans censé devenir une pierre angulaire du projet Hughes–St-Louis, cette soirée à Edmonton pourrait bien marquer le début d’un virage. Parce que dans une organisation où les places deviennent chères, l’indifférence n’a plus de place.
