Selon les médias de Washington, le miroir se retourne brutalement contre nous.
Après deux jours à rire de Tom Wilson, à le ridiculiser pour sa scène honteuse de « fake pleurs » captée par les caméras du Centre Bell, voilà que c’est un joueur du Canadien de Montréal qui s’est transformé en symbole d’immaturité : Jakub Dobes.
Et il faut avoir l’honnêteté de le dire sans détour. Ce que Dobes a offert hier soir, autant sur la glace qu’au micro après la rencontre, est tout simplement honteux.
D’un jeune gardien qu’on aurait voulu ériger en héros, il est devenu en l’espace de quelques phrases maladroites et d’un match raté, la cible parfaite de toutes les railleries, autant à Washington qu’à travers la LNH.
Tout avait pourtant bien commencé pour Dobes dans cette série. On l’avait vu entrer en relève après la blessure de Samuel Montembeault, avec calme, avec courage, dans une atmosphère survoltée.
Mais dès qu’il a été propulsé comme numéro un à part entière, la réalité l’a rattrapé. Sur le premier but de Washington (sur l’erreur de Lane Hutson), il devait geler la rondelle et non la "botter".
Tout gardien de la LNH le sait : un retour dangereux en séries éliminatoires, c’est une condamnation. Il n’a pas gelé la rondelle, il l’a laissé bondir dans l’enclave, et la suite appartient à l’histoire.
Sur le but gagnant en prolongation, Dobes est complètement sorti de son filet, s’est fait déjouer comme un novice par Mangiapane, qui n’a eu qu’à tirer dans une cage abandonnée.
Mais ce n’est pas seulement son jeu qui a été décevant. C’est surtout son comportement après la rencontre. Plutôt que d’assumer, plutôt que de reconnaître que dans les séries, tout repose d’abord sur l’exécution et la rigueur, Dobes a choisi de se plaindre.
De mettre la faute sur les arbitres. De dénoncer les contacts dangereux, de pleurnicher contre le manque d’appels, de donner l’impression d’un enfant pris à ne pas faire ses devoirs qui pointe son frère du doigt.
« Je ne suis pas un expert et je ne veux pas pointer qui que ce soit du doigt », a-t-il lancé pour ouvrir le bal, avant de… pointer tout le monde du doigt, évidemment.
« J’espère que nous n’aurons pas ces arbitres à Washington », a-t-il ajouté, comme s’il croyait sérieusement que la LNH allait réassigner ses officiels en fonction des jérémiades d’un gardien recrue.
Mais le plus embarrassant est venu lorsqu’il a évoqué la mise en échec de Tom Wilson contre Alexandre Carrier, et celle d’Ovechkin sur Jake Evans :
« Je croyais qu’il serait suspendu au moins pour un match. C’est malheureux, on ne veut pas voir un de nos meilleurs joueurs patiner avec une commotion. »
Puis il a poursuivi, dans un aveu de son ignorance des règlements : « J’imagine que je ne connais pas vraiment les règles. »
C’était à la fois triste, maladroit, et profondément nuisible pour l’image de son équipe.
Car il faut le dire franchement : après deux jours où le Canadien s'était comporté comme l'équipe mature, de l’intensité saine, après deux jours à pointer Washington comme une équipe d’arrogants incapables d’assumer leur destin, voir Dobes agir ainsi a tout gâché.
Les partisans des Capitals n’en demandaient pas tant : en quelques minutes, Dobes leur a offert sur un plateau d’argent toutes les munitions pour nous renvoyer à la figure nos propres accusations de “crybaby”.
Et ils ne s’en sont pas privés. Déjà sur les réseaux sociaux, les partisans de Washington partagent des montages photo, comparent Dobes à Tom Wilson, parlent du “baby goalie” de Montréal qui pleure parce qu’il a été incapable de fermer la porte.
À Washington, on s’amuse à ses dépends. Et il faut être honnête : ils ont raison.
C’est d’autant plus navrant que Dobes avait un début d’histoire magnifique devant lui. Un jeune gardien de 23 ans, débarqué dans le feu des séries, propulsé dans un rôle ingrat… il aurait pu incarner l’espoir, la fraîcheur, l’audace.
Mais il a préféré, par inexpérience, par immaturité, endosser le rôle du mauvais perdant. Et c’est tout le Canadien qui écope de cette perception.
Pendant ce temps, dans le vestiaire, Martin St-Louis ruminait. Les journalistes sur place l’ont senti : St-Louis n’était pas content du tout de ce que son gardien avait dit.
Parce qu’un entraîneur sait que dans les séries, il n’y a rien de pire que de donner des excuses publiques aux adversaires.
Que de détourner la conversation du vestiaire pour l’amener sur les officiels. Que d’offrir aux Capitals un nouveau carburant mental pour enflammer leur foule mercredi.
Hier soir, à cause de Jakub Dobes, Montréal a perdu une bataille psychologique importante.
Et il faut aussi rappeler un autre élément troublant : ce n’est pas la première fois que Dobes se fait remarquer pour de mauvaises raisons dans cette série.
Lors du troisième match, on se souvient tous de la fameuse mêlée générale sur le banc des Capitals. Qui avait précipité l’incident?
Qui avait refusé de contourner l’attroupement pour aller au vestiaire? Jakub Dobes. Déjà à ce moment, son comportement avait été perçu comme puéril, provocateur, inutilement dangereux. Et là, après avoir été un des artisans de ce chaos, il revient deux matchs plus tard pour pleurnicher sur les coups durs?
Ce n’est pas ainsi qu’on construit une réputation dans la LNH.
Oui, les arbitres ont été mauvais hier. Oui, la mise en échec d’Ovechkin était ignoble et méritait une suspension. Oui, Tom Wilson aurait dû écoper d’une punition majeure.
Mais dans la LNH, on ne gagne pas le respect en pleurant devant les micros. On gagne le respect sur la glace, en serrant les dents, en ravalant son orgueil et en répondant avec des performances irréprochables.
Jakub Dobes a raté cette leçon hier soir.
Et c’est regrettable, car en le faisant, il a mis à mal non seulement sa crédibilité personnelle, mais aussi celle d’une organisation entière.
Aujourd’hui, au lieu de parler de la performance courageuse du Canadien, on parle d’un jeune gardien qui a pleurniché. Aujourd’hui, au lieu de vanter la résilience du CH, on rit de sa naïveté.
La meilleure réponse, maintenant, serait le silence. Laisser les paroles au vestiaire. Fermer la porte. Rester concentré sur le jeu. Parce qu’en séries, seuls les actes comptent.
Jakub Dobes, en voulant défendre ses coéquipiers, a oublié cette vérité fondamentale. Maintenant, il ne lui reste qu’une chose à faire : se taire, se retrousser les manches, et prouver sur la glace qu’il n’est pas juste un "crybaby"… mais un vrai guerrier.