Evgeny Kuznetsov à Montréal? Ouch.
Il y a quelques années, une telle rumeur aurait électrisé la métropole. Evgeny Kuznetsov, champion de la Coupe Stanley, pivot spectaculaire, surdoué de la relance, capable de feinter trois défenseurs en un seul coup de patin. Mais en 2025? À Montréal? Après tout ce que l’on vient de vivre avec Patrik Laine? Sérieusement?
La nouvelle est tombée comme une bombe à Moscou et a rebondi jusque dans les vestiaires du Canadien de Montréal : Kuznetsov est libre comme l’air.
Le SKA de Saint-Pétersbourg et le joueur ont résilié son contrat d’un commun accord. Et selon son agent Shumi Babaev, l’ancien centre des Capitals de Washington est prêt à revenir dans la LNH… si l’offre est alléchante.
“Nous ne sommes pas en train de négocier avec des clubs nord-américains pour le moment. Mais si l’offre la plus intéressante vient de la LNH, alors Evgeny y retournera.”
Traduction? Montrez-moi l’argent.
Voilà tout le problème.
C’est bien connu : Evgeny Kuznetsov a joué avec Ivan Demidov cette année dans la KHL. Ils ont formé un duo explosif à Saint-Pétersbourg. Les nostalgiques du hockey champagne rêvent déjà d’un remake version CH. Mais ce fantasme tient plus de la nostalgie que de la logique.
Kuznetsov a beau s’être remis d’une infection virale et de deux commotions cérébrales cette saison, il n’est plus le joueur qu’il était. Il n’a plus les jambes. Il a ralenti.
Pire : il a vieilli mentalement. Le feu sacré semble l’avoir quitté depuis au moins deux ans. À Washington, on ne parlait que de ses absences, ses humeurs, ses conflits. Il a même dû faire un séjour au programme d’aide de la LNH en mars 2024.
Est-ce vraiment ce profil-là que Kent Hughes veut intégrer à sa jeune culture d’équipe?
Il ne veut rien savoir. C’est clair, net et sans bavure. Depuis qu’il est à la barre du Canadien, Hughes a bâti un noyau jeune, discipliné, affamé… pas une garderie de vedettes en déclin à relancer.
La dernière chose qu’il souhaite, c’est d’importer un autre vétéran instable, usé, qui a déjà un pied dans la retraite et l’autre dans les controverses.
On a essayé avec Patrik Laine. On a vu le résultat. Une catastrophe défensive ambulante. Laine est fini, et tout le monde le voit sauf ceux qui refusent d’ouvrir les yeux.
Montréal a trop souvent servi de clinique de réhabilitation. Ici, on a offert une dernière chance à tous les vétérans surpayés et finis de cette terre et la liste continue. Kent Hughes est justement en train de faire le ménage de cette culture-là.
Pourquoi donc aller chercher un joueur de 33 ans, souvent blessé, qui traîne un lourd bagage extra-sportif, uniquement pour plaire à Demidov?
Le jeune Russe n’a pas besoin de ça. Il est assez mature pour s’épanouir seul.
Bien sûr, on va entendre : “Oui mais il connaît Demidov! Oui mais il parle russe! Oui mais ce serait parfait pour le vestiaire!”
Surtout que Kuznetsov est déjà en mode séduction.
À ses yeux, « Vanya » (le surnom qu'il donne à Demidov) est plus qu’un prodige. C’est un joueur spécial, une âme à protéger.
« Vanya est un joueur extraordinaire qui peut transformer le néant en magie. Il est l’un des joueurs les plus talentueux que j’ai jamais vus, » a-t-il dit avec admiration.
Il l’a comparé à certains des plus grands fabricants de jeu qu’il a côtoyés dans la LNH, tout en insistant qu’il ne veut pas être un mentor autoritaire pour lui. « On parle rarement de hockey. Je réponds à ses questions, mais je ne le dirige pas. Il sait déjà tout lui-même. »
Kuznetsov a parlé de Demidov comme son petit frère.
« Il doit juste avoir du plaisir et continuer de se développer à sa façon. Il est mature, il a une belle famille. Je lui souhaite une carrière fantastique. »
Malgré ces belles paroles, Ivan Demidov n’a pas besoin d’un tuteur. Il est déjà chez lui. Chez lui à Montréal.
Ce n’est pas parce qu’un joueur partage la même langue ou le même passé qu’il est fait pour intégrer une structure saine.
Kuznetsov peut bien être le parrain d’Ivan, leur association n’en reste pas moins un fantasme médiatique. Le CH ne doit pas se transformer en refuge pour vétérans nostalgiques d’un passé glorieux.
Demidov n’a pas besoin d’une nounou malsaine de vestiaire. Il a besoin de glace, de soutien, de minutes en avantage numérique. Pas d’une cohabitation avec un fantôme de la LNH.
Kent Hughes et Jeff Gorton le savent.
Le duo a changé la philosophie de l’organisation. Ils veulent bâtir à long terme. Ils veulent de la vitesse, du caractère, de la cohésion. Pas un contrat one-shot à 5 millions pour un joueur qui sort d’une deuxième commotion et qui, selon ses propres mots, veut aller là où le chèque est le plus gros.
La dernière chose dont ce club a besoin, c’est de rajouter un nouveau dossier délicat dans un vestiaire déjà jeune et fragile émotionnellement. Surtout après l’onde de choc créée par le banc à Demidov et la crise de confiance vécue par plusieurs vétérans en fin de saison.
Montréal n’est pas un refuge
Ce n’est pas pour rien qu’aucune équipe sérieuse de la LNH ne s’est encore manifestée.
Les partisans ne sont pas naïfs. Ils ne veulent plus de contrats gaspillage. Ils veulent des jeunes affamés, pas des vedettes délavées.
Kuznetsov est devenu une distraction.
Et s’il y a une chose que Martin St-Louis ne tolère pas, c’est la distraction. On le voit déjà à fleur de peau quand on lui parle de Laine.
Imaginez avec un Kuznetsov, habitué aux caméras, aux déclarations hasardeuses, aux soirées qui débordent. Montréal n’est pas faite pour ça. Pas maintenant.
Le coach est encore marqué par l’expérience Laine. Il a vu comment le public, les médias, l’ambiance du Centre Bell peuvent tourner rapidement. Ajouter un Kuznetsov au mélange, c’est allumer un feu au cœur d’un baril d’essence.
Kuznetsov, lui, pense business.
Kuznetsov ne cherche pas un rêve. Il cherche un deal. Ce qu’il veut, c’est un contrat. Une enveloppe. Qu’elle vienne de Kazan, d’Omsk ou de Montréal, il s’en fout. Il le dit lui-même : “On prendra l’offre la plus élevée.”
Et ça, ce n’est pas le genre de joueur que veut Kent Hughes.
Pas après avoir envoyé signal clair à toute l’organisation : ici, on récompense l’effort, la discipline, la constance. Pas la nostalgie.
Le hockey est fait de revirements, de "comeback", de rédemption. Peut-être qu’un jour, Kuznetsov retrouvera un club. Peut-être même une ville qui acceptera de le prendre pour ce qu’il est : un joueur autrefois exceptionnel, mais maintenant trop fragile, trop instable, trop… passé.
Mais ce ne sera pas Montréal.
Parce qu’ici, le futur s’appelle Ivan Demidov. Pas Evgeny Kuznetsov.