Patrick Roy attend. Et il sait que la sentence tombera de la bouche d’un autre Québécois.
Ce soir, alors que l’organisation des Islanders de New York se rapproche de l’annonce de son prochain directeur général, Patrick Roy vit un cauchemar éveillé.
Deux noms sont sur toutes les lèvres : Marc Bergevin et Mathieu Darche. Deux compatriotes. Deux visions du hockey. Deux personnalités aux antipodes. Et au centre de cette tempête décisive : le sort de Patrick Roy.
C’est à la fois cruel et ironique. Toute sa carrière, Roy a été le capitaine d’un destin qu’il forgeait à coups de révoltes, de colère et d'intensité. Mais il avait le contrôle.
Mais aujourd’hui, il n’a plus le contrôle de rien. Il est suspendu aux décisions de deux hommes qui, chacun à leur manière, représentent ce que le hockey moderne veut devenir… ou fuir.
Marc Bergevin, d’abord. L’ex-DG du Canadien qui avait refusé Patrick Roy à trois reprises quand il était en position d’engager un entraîneur-chef à Montréal.
En 2012, il avait ramené Michel Therrien. En 2017, Claude Julien. Puis, en 2021, Dominique Ducharme. Trois fois, Roy était disponible. Trois fois, Bergevin a dit non.
Il y a entre eux une relation froide, une méfiance qui remonte à loin. Certains parlent de jalousie, d’autres de différences de caractère.
Ce qui est clair, c’est que Patrick Roy a peur de ne pas être le choix de Marc Bergevin à Long Island. Et si ce dernier obtient le poste de directeur général, Roy le sait : la porte pourrait se refermer brutalement. Mais selon ce qui circule, lors de son entrevue, Marc Bergevin n'a pas fermé la porte à garder Roy en poste.
D’ailleurs, selon Frank Serevalli, journaliste très connecté au sein de l’organisation new-yorkaise, Bergevin serait dans un sprint final avec Mathieu Darche.
Et ce n’est pas la première fois que Bergevin obtient une deuxième entrevue. Il était là à Toronto, à Columbus, à Pittsburgh. Mais à chaque fois, on lui a préféré quelqu’un d’autre. Cette fois, c’est peut-être la bonne.
Et Mathieu Darche? Lui, c’est l’opposé parfait de Patrick Roy. Calme, analytique, rationnel. Aucune émotion qui déborde.
Darche, c’est l’homme de chiffres, de rapports, de tableurs Excel. Il est le bras droit de Julien BriseBois à Tampa Bay depuis 2019, et il a appris sous l’une des meilleures écoles de gestion dans la LNH.
Si les Islanders veulent tourner la page sur l’impulsivité, sur le chaos des derniers mois, Darche est le choix logique.
Et c’est bien là que le cauchemar nocturne et les nuits blanches commenent. Car Patrick Roy n’a pas seulement peur de perdre son poste. Il voulait devenir DG des Islanders. Mais on ne lui a pas laissé la chance. Et aujourd'hui, il sent que ce sont des Québécois qui lui ont été préférés.
Et ces Québécois, que ce soit Darche ou Bergevin, va maintenant décider si Roy est congédié ou non.
Et ça, c’est insupportable. Il aurait peut-être accepté de se faire tasser par un Américain, un vieux routier. Mais par des gars du pays? Par ceux avec qui il a grandi dans le même univers, sur les mêmes patinoires, avec la même ambition? Ce serait une trahison québécoise.
Bergevin, surtout, est une figure lourde pour Roy. Leur passé à Montréal est encore douloureux. Et le fait que Bergevin puisse revenir dans une position de pouvoir — potentiellement même comme président des Islanders — le rend malade.
Bergevin ou Darche comme DG? Roy n'en dort plus de la nuit.
Pendant ce temps, le coach attend. Il joue au golf à Québec, il parle, il jase, il se confie à tout le monde. Il dit que c’est fini. Il affirme à ses proches qu’il a fait son temps.
Mais la vérité, c’est qu’il n’a jamais autant voulu rester. Et le fait que ce soit "des siens" qui l’évinceraient, c’est un drame personnel.
Il n’y a rien de plus cruel que de voir ses rivaux les plus familiers atteindre ce que l’on désire soi-même. Patrick Roy voulait être DG. Il voulait construire. Il voulait faire les choses à sa manière. Mais à la place, il regarde les autres monter l’escalier du pouvoir.
Dans cette bataille finale à Long Island, ce sont deux Québécois qui s’affrontent. Et c’est un troisième qui attend, en silence, le verdict. La LNH est cruelle. Elle ne pardonne pas les caractères forts, les sorties détonantes, les vieilles rancunes.
Et pour Patrick Roy, le couperet s’apprête à tomber ou non. Il ne reste qu’à savoir qui décidera : Bergevin ou Darche. Mais peu importe lequel, Roy sait qu’il sera celui qui paiera le prix. C’est là, toute la tragédie de ce moment.
Et pourtant, ce qui ronge Patrick Roy encore davantage… c’est qu’il ne peut pas exclure d’être gardé en poste.
C’est là tout le supplice. Il n’est même pas en train de vivre un congédiement net, clair, assumé. Non. Il vit dans l’attente d’une hypothèse. Et cette incertitude-là, elle le détruit plus sûrement qu’un communiqué de presse brutal.
Car Darche pourrait décider de le garder. Peut-être. Par stratégie. Par prudence. Par respect. Mais aussi, peut-être, pour mieux lui couper l’herbe sous le pied à moyen terme. Pour le congédier à la moindre occasion.
Et dans l’esprit de Roy, ce scénario est peut-être encore pire.
Être gardé par défaut. Par calcul. Comme un vestige de l’ère précédente. Comme une lame suspendue au-dessus de sa tête. Travailler dans la peur. Être remercié en décembre. Ou en mars. Un congédiement en différé. Une humiliation encore plus raffinée.
Parce que Patrick Roy n’a jamais voulu survivre. Il a toujours voulu régner.
Il voulait être le cerveau, pas un pion.
Et ce soir, l’idée que Mathieu Darche – ce technocrate froid, respecté, efficace – puisse devenir DG des Islanders tout en le gardant au banc, le réduit à un figurant dans sa propre histoire. Un coach en sursis. Un monument qui se fait polir à coup de protocole.
Roy le sait : Darche est l’anti-Roy. Pas d’explosions. Pas de guerres d’égo. Pas d’altercations dans les vestiaires. Pas de demandes de transactions en direct devant les caméras. Juste du contrôle. Du calme. Du professionnalisme glacé.
Et c’est exactement ce que recherchent les propriétaires des Islanders. Ils veulent un exécutif moderne. Un gars qui travaille en coulisses. Qui ne fera jamais la une pour une déclaration fracassante. Qui saura gérer le repêchage avec des algorithmes. Pas un ancien gardien au sang bouillant qui fait encore trembler les murs quand il parle trop fort dans le vestiaire.
Quant à Marc Bergevin, l’hypothèse demeure enflammée. Car si lui entre dans la pièce, c’est pour tout repeindre aux couleurs du passé. Il a encore la nostalgie du « country club » qu’il avait bâti à Montréal, avec ses chums, ses insiders, ses ex-joueurs.
Et Patrick Roy, dans ce décor-là, n’a jamais eu sa place.
Si Bergevin devient président, ce n’est même plus une question d’opinion : Roy est dehors. Peut-être pas dès la première semaine. Mais l’histoire est déjà écrite.
Un duo de Québécois à la tête des Islanders. Deux hommes qui se connaissent, qui se respectent, qui partagent une vision du hockey ultra moderne. Et au milieu, Patrick Roy, comme une erreur de casting.
Et n'oublions pas que dans les coulisses de Long Island, une autre rumeur commence à prendre de l’ampleur : celle que si Bergevin entre en poste, il nommera Mathieu Darche comme DG.
On ne le consulte plus. On ne l’écoute plus. On le tolère. Et bientôt, on le remercie.
C’est cette image-là qui tourmente Roy. Ce film qu’il a déjà vu. Trop de fois. Celui où les autres grimpent, pendant que lui reste figé à l’ombre de sa légende.
Son sort est désormais scellé par les décisions d’hommes qu’il connaît par cœur. Et c’est sans doute ce qui rend tout ça encore plus cruel.
Patrick Roy ne veut pas juste garder son poste.
Il veut qu’on lui reconnaisse sa valeur. Qu’on lui donne un projet. Qu’on le laisse construire. Qu’on le traite comme un homme de hockey… pas comme un bouche-trou.
Mais la réalité, ce soir, c’est qu’il est suspendu à des noms, à des appels, à des décisions qu’il ne contrôle plus. Et c’est peut-être ça, le plus grand affront de sa carrière.